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Un matin de ce printemps-là ou plus exactement un matin de ce mercredi 9 avril 1975. Ce jour est, dans l’Histoire de la Corée du Sud, à marquer d’une pierre noire.
Huit hommes ont été condamnés et exécutés par pendaison parce qu’ils auraient été des espions au service de l'ennemi juré, la Corée du Nord.
Depuis août 1945, le Pays du Matin calme est séparé en deux états distincts en suivant la ligne du 38e parallèle. En 1948, sont proclamées la République de Corée (Corée du Sud) et, quelque temps après, la république populaire démocratique de Corée (Corée du Nord). L’invasion de la Corée du Sud en 1950 par les troupes nord-coréennes entraîne la Guerre de Corée qui se soldera en 1953 par l’instauration d’une zone démilitarisée entre les deux ennemis. Un no man’s land qui depuis cette date n’aura bougé d’un iota.
1975, le dictateur Park Chung-hee est au pouvoir en Corée du Sud. Son but, se maintenir le plus longtemps au pouvoir et pour cela faire voter une loi l’autorisant à se présenter pour un troisième mandat. L’opinion publique ne voit pas cela d’un bon œil. Alors pour arriver à ses fins et détourner l'attention de sa population, le Président sud-coréen fait arrêter huit hommes au motif qu’ils souhaitent le rapprochement avec le voisin du nord et seraient par la même occasion procommunistes. Ces huit hommes, tous innocents, seront déclarés coupables et pendus à la suite d’emprisonnements, de tortures et d’une parodie de procès.
Avec ce manhua empreint de sensibilité, l’auteur coréen Park Kun-woong nous entraîne à la découverte des ces huit hommes dont le portrait nous est brossé par ceux qui leur étaient les plus proches. Beaucoup d’amour, de tendresse, d’admiration, mais également de révolte, d’incompréhension et de besoin de réhabilitation ressortent de leurs paroles.
Ce n’est qu’en 2007 que l’Etat sud-coréen reconnaîtra l’innocence de ces huit hommes accusés à tort. Une victoire pour ces familles qui se sont vu rendre une dignité.
Un album très touchant puisqu’il donne la parole à ceux qui décrivent parfaitement leur sentiment d'impuissance face à ce régime dictatorial, mais qui réussissent à placer leur amour pour leurs disparus au dessus de tout.
Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis et l’URSS décident d’installer un protectorat sur la Corée, précédemment occupée par le Japon avant sa capitulation provoquée par les bombardements d’Hiroshima en août 1945.
C’est le 38e parallèle qui va servir de séparation entre la Corée du Sud occupée par les Américains et la Corée du Nord occupée par les Soviétiques. La Guerre Froide s'installe entre les deux superpuissances.
La République de Corée (au sud) est proclamée en août 1948 et la République populaire démocratique de Corée (au nord) voit le jour un mois plus tard.
En juin 1950, l’armée nord-coréenne envahit le nord de la Corée du Sud, c’est le début de la Guerre de Corée, qui prendra fin trois ans plus tard.
C’est dans ce contexte que débute l’histoire de Mémoires d’un frêne, écrite par Park Kun-Woong, un des plus grands auteurs de bande dessinée coréen.
Cet album, édité en 2018 chez Rue de l’Échiquier, relate le massacre de la ligue Bodo qui s’est déroulé durant l’été 1950, au début de la guerre de Corée.
Les autorités sud coréennes, l’armée et la police, par peur d’une contagion idéologique, vont assassiner les communistes. 200 000 personnes seront exécutées. Une chape de plomb s’abat, jusqu'à la découverte de charniers au début des années 2000.
Cet album est l’adaptation de la nouvelle éponyme de l’écrivain coréen Choi Yong-Tak. À travers le regard d’un frêne, on assiste aux différentes salves d’assassinats.
C’est noir, c’est sombre. Rien n’est caché, les détails les plus horribles sont montrés et dits. Les regards de ces hommes, qui s'apprêtent à mourir, sont terribles. Les barbelés, qui les enchaînent les uns aux autres, les empêchent de fuir face à des hommes armés, pressés d’en finir pour rentrer chez eux.
Les fosses communes vont se remplir et rougir le sol en profondeur avant que le silence ne revienne et ne laisse place aux familles. Certaines pourront retrouver le corps de proches, uniquement grâce à leurs habits. Les corps et les visages étaient eux en partie méconnaissables.
Un album puissant et dur, dont certains passages pourront heurter les plus sensibles, mais indispensable pour le devoir de mémoire.
1937/1945, c'est la guerre sino-japonaise. Le Japon qui occupe déjà la Corée se sent des envies d'expansion. Les membres du gouvernement provisoire coréen, en lutte contre l'occupant sont alors réfugiés en Chine. C'est le cas des parents de Jessie qui naît en 1938, à Shanghai. L'histoire de Jessie est racontée par sa mère à sa petite fille, la fille de Jessie donc. Cette histoire fut un livre, elle est désormais un roman graphique.
Tout d'abord, ce qui surprend dans ce roman graphique, c'est le noir et blanc et les quelques très rares touches ocre et vertes pour la très courte partie contemporaine. Ensuite, c'est le graphisme : les dessins sont assez naïfs, les visages pas toujours finis, sauf pour les personnages principaux. Les cases sont parfois réduites au minimum et d'autres fois pleines voire débordantes, notamment pour ce qui concerne les bombardements, les explosions. Park Kun-Woong utilise les pages à sa guise : des petites cases, des plus grandes horizontales ou verticales, des pages entières, des doubles pages, ... Les paysages chinois sont décrits et le dessin succinct les évoque plus qu'il ne les montre. C'est un style particulier qui peut frustrer les amateurs de couleurs et de belles planches léchées, de beaux paysages de montagnes, d'eaux et d'arbres. Mais ce style est là pour montrer la violence et la cruauté de l'exil, de la guerre, des bombardements incessants, les départs précipités, les nombreux déménagements de Jessie et ses parents alors qu'elle est encore bébé et durant toute sa tendre enfance.
J'aime beaucoup, parce que c'est très loin de mes lectures habituelles, j'ai lu quelques romans coréens mais pas de bande dessinée. Et aussi parce que j'ignorais à peu près tout de la Guerre sino-japonaise qui se conclura par la capitulation du Japon après Hiroshima et Nagasaki. Autant dire que j'ai beaucoup appris, et j'ai poussé mes recherches plus loin, me renseignant ici ou là sur ce conflit.
Un gros volume d'à peine 400 pages qui se lit avec beaucoup d'intérêt (même si parfois, des pages se répètent et peuvent rendre le récit un peu long), qui permet de découvrir une autre culture du dessin et une histoire terrible, finalement assez proche de ce qu'ont pu vivre les Français et d'autres pendant la guerre, sous les bombardements, avec la question de l'exil en plus. C'est aussi un livre qui parle d'humanité, d'entraide, de la famille, des traditions et de la transmission. Une très belle découverte.
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