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Je remercie vivement Babelio et Cours Toujours éditions pour ce livre reçu dans le cadre de Masse critique Littérature.
"Femme de cabane", deuxième roman de Mario Alonso, entre donc dans cette belle collection de la Vie rêvée des Choses, choses parfois oubliées à force de faire partie de notre quotidien et de notre histoire. Il initie également un déplacement "régional" puisque jusqu'alors les objets s'ancraient dans le patrimoine du Nord et de la Picardie. Nous nous éloignons des Hauts-de-France, même si l'auteur y vit, pour aborder les rivages de l'océan. Un dépaysement que je regrette un tantinet tant les ouvrages précédents s'accrochaient à mes souvenirs et à une forme de complicité tendre et nostalgique que je n'ai pas retrouvée par cette lecture déroutante.
Le dépaysement provient aussi bien du lieu, de l'histoire que de la forme de ce roman-poème aussi rêche et tranchant que les huîtres manipulées à longueur de jours, aussi sensuel que la mer qui enveloppe les corps.
Une femme, la narratrice, a dû abandonner son atelier de confection de robes de mariée et travailler dans une cabane ostréicole afin de nourrir sa fille. Un travail en équipes féminines, âpre, acharné, exténuant, répétitif et douloureux jusqu'à la nausée, jusqu'à la folie. Pourtant elle tient bon, cette femme, elle reste debout malgré l'épuisement et la solitude. Les coquilles d'huîtres aux mille replis saillants l'engagent dans une rêverie de dentelles, d'ailleurs et d'autrement. Mais que faire lorsque la mer s'éloigne sans retour ? Comment réagir lorsque sa fille devient un fils et s'élance dans des projets de couture et confection ? Rester debout. Attendre. Espérer et rêver. Peut-être, alors, que l'océan reviendra, porteur d'un nouvel amour, et que la vie se fera plus douce.
Dépaysée, je le fus durant cette lecture étonnante. La manière dont l'auteur dépeint cette atmosphère est si réaliste qu'il m'a semblé être transportée sur cette île minuscule, plongée dans les odeurs d'iode et de fraichin. J'ai ressenti le froid et la morsure de l'eau salée sur des mains, les entailles sur la peau, l'absence de perspective autre que toujours l'océan et les cloisons des cabanes.
Comme un long monologue intérieur, comme une sorte d'auto-exhortation à la résistance, le texte se déroule sans pause et enjambe les temporalités. C'est souvent sibyllin et il faut mettre de côté la linéarité des romans habituels pour se laisser porter par la poésie de l'écriture. Une poésie qui, paradoxalement, s'affaiblit, m'a-t-il semblé, lorsqu'apparaissent les répétitions de certaines sonorités "Il reste un endroit où une robe attend la mariée
Il faut que j'y retourne passer le balai"
Un roman un peu déconcertant, pour moi, lors de la lecture des premières pages si peu conformes à ce que j'attendais. Il m'a fallu renoncer à une logique narrative familière et me laisser porter par le rythme des mots, par les sensations éprouvées et surtout par ce beau portrait d'une femme qui se relève et trouve la douceur de la vie dans le dénuement.
Paul, 12 ans, est un enfant différent. Il ne pleure pas, ne rit pas, parle et mange très peu.
Il a pourtant une certitude : il écrira son premier roman à 13 ans. Il n'a donc pas de temps à perdre. Pour trouver l'inspiration, cette âme du Watergang court dans les polders, non loin de Middelbourg, la ville qui l'a vu naître. Il note ses impressions dans un carnet pour nourrir son livre qui fera de lui un écrivain célèbre sous le nom de Jan De Vaart, né « de père inconnu et de mère incertaine ».
Dans ce premier roman à plusieurs voix s'expriment les proches de Paul, mais aussi des personnages inventées, et même des objets : Kim, sa sœur qui attend son premier enfant ; Julia, la nouvelle compagne du père ; Super, surnom donné par Paul à sa mère, « une femme très ordinaire », comme elle se décrit ; Pol, le narrateur du livre de Paul ; Zac, son ex-meilleur ami ; Lucien, son neveu nouveau-né...
Dans ce chœur, la part belle est faite aux éléments naturels, et surtout à l'eau, témoins des errances du garçon.
J'ai un avis mitigé sur cette lecture. La singularité du début, l'idée d'un enfant qui veut écrire, m'avait vraiment donné envie de lire la suite mais j'ai été déçue, car je m'attendais à autre chose.
Le style n'est pas en cause. Au contraire, elle est une promesse pour la suite. Et il y de belles fulgurances poétiques, dans la lignée de l'auteur islandais Jon Kalman Stefansson.
EXTRAITS
Mon roman déplaira. Parce qu'il renverra chacun à sa propre impuissance, mais tout le monde se l'arrachera, parce que tout le monde est ainsi fait, on voudra le lire.
Que ce sont le bêtes qu'on soigne, pas les humains, les humains, on les aime.
http://papivore.net/litterature-francophone/critique-watergang-mario-alonso-le-tripode/
"Watergang", lu dans le cadre de ma participation au jury pour le Prix Orange du Livre, est le premier roman de Mario Alonso. Je l’ai lu d’une traite, happée par le rythme, l’écriture, la construction, les personnages, l’originalité. J’ai vécu un moment hors du temps, perdue dans les polders autour de Middlebourg. Quelle aventure !
Le rythme de ce roman est calqué sur les pas de Paul, petit garçon de 12 ans, 1m36, 27 kilos et qui a décidé d’écrire son premier roman à 13 ans, c’est bientôt. Et Paul court, le long des canaux, au bord de l’eau. Et Paul raconte. Il raconte sa famille : sa mère "Super" – il l’appelle ainsi parce qu’elle est géniale et travaille dans une supérette – sa sœur Kim, qu’il appelle Birgit, mais aussi les amis, son père parti en Angleterre ou Julia sa compagne et les lieux qu’il aime. Et le "JE" de Paul devient multiple, pluriel, celui de ceux qui l’entourent et s’expriment les uns après les autres, se racontent et le racontent. Et puis des entités se dévoilent, parlent alors "Action", "Canal", "Lande" ou encore "Carnet".
L’écriture est simple, enlevée, envoutante. L’auteur réussit parfaitement à se mettre à hauteur d’enfant. Le style est sobre qui confine au minimalisme. La construction, elle, est aussi tarabiscotée que peut l’être l’esprit d’un enfant qui saute facilement du coq à l’âne. C’est ce qui fait son charme. Les personnages sont attachants, émouvants, à la fois forts et dotés de faiblesse, simples et en même temps complexes.
L’originalité de l’histoire, et l’écriture réunie m’ont complètement conquise.
Le personnage principal est Paul. Il a 12 ans et vit dans un petit village, Middelbourg. Il va écrire un roman quand il aura 13 ans dans lequel il se mettra en scène sous un autre nom, Jan. En attendant il parle peu et prend des notes dans des carnets. Il partage sa chambre avec sa sœur Kim qu’il appelle Birgit, elle a 16 ans et elle est enceinte. Sa mère se prénomme Julia, mais il l’a renommée Super, car elle est super et travaille depuis le divorce dans une supérette. Son père, Jens, est parti il y a quelques années et vit en Angleterre avec sa nouvelle compagne, Julia.
Paul écrit sur le monde qui l’entoure. Et il court beaucoup le long des canaux dans le Watergang. C’est un être solitaire.
Mario Alonso plonge le lecteur dans l’ambiance du watergang et de Middelbourg. Il ne s’y passe pas grand-chose avant que Kim et Paul partent en Angleterre quelques jours chez leur père. Les chapitres courts sont une succession de personnages. Il n’y a pas que des humains qui parlent dans ce livre, Middelbourg et le canal sont aussi des personnages et s’expriment dans un chapitre. J’ai beaucoup aimé le chapitre de « Rose », la couleur, qui est teinté d’humour.
C’est un roman choral original, écrit avec poésie. Mais j’ai un peu décroché au milieu du roman avant de repartir dans ma lecture grâce à l’escapade anglaise. Il faut dire que Paul n’aime pas l’action, il la fui. Un premier roman intéressant avec des qualités indéniables puisque publié par les éditions du Tripode (un chouchou) mais ce n’est pas un coup de cœur pour moi.
La couverture est magnifique, il s’agit d’une illustration de la Mer Baltique de Natalie Levkovska.
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