Après avoir établi une liste de trente romans le 20 mars dernier, le jury du Prix Orange du Livre s'est à nouveau réuni ce lundi 28 avril pour sélectionner les cinq finalistes.
Après avoir établi une liste de trente romans le 20 mars dernier, le jury du Prix Orange du Livre s'est à nouveau réuni ce lundi 28 avril pour sélectionner les cinq finalistes.
Cinq romans sont en lice pour le Prix Orange du Livre 2014. Cinq romans sélectionnés par le jury pour leurs indéniables qualités littéraires. Cinq romans soumis au vote des internautes pour déterminer qui sera le lauréat de cette 6e édition. Mais qui se cache derrière ces pages, cette plume, cette verve ? Comment ont réagi les auteurs à l'annonce de leur nomination ? Hubert Mingarelli, Lola Lafon, Marc Lambron et Maylis de Kerangal ont accepté de répondre à quelques questions.
La Lumière volée est un court roman de 120 pages qui met en scène deux personnages : Élie, âgé de onze ans, et Gad, âgé de quatorze ans. Le premier est seul depuis que son père a été déporté et il a élu domicile dans le cimetière du ghetto de Varsovie. Le second est un szmugler, un jeune trafiquant contribuant à l’approvisionnement du ghetto en nourriture. Le cimetière est alors l’un des passages du trafic entre le ghetto et le reste de Varsovie, ce qui va conduire à la rencontre entre les deux adolescents. Gad est intrépide, courageux, déjà bien conscient de tout ce qu’il se passe dans la ville. Élie est plus calme, plus naïf, il trouve du réconfort dans la poésie et se projette avec une grande facilité sur le futur, n’hésitant pas à inclure Gad, son nouvel ami, dans ses projets. Dans ce cocon protecteur qu’est le cimetière, les discussions vont bon train, tantôt légères, tantôt plus sombres, elles sont émaillées de confidences et donnent de l’espoir, malgré les coups de feu récurrents en guise de fond sonore…
C’est un roman assez surprenant par rapport à tous les romans jeunesse consacrés à cette période car il n’y a quasiment pas d’action, le huis-clos favorisant essentiellement les échanges entre les deux protagonistes. Il y a quelques passages poétiques qui disent l’importance de pouvoir s’évader dans un contexte de guerre, surtout quand on est un enfant ou un adolescent. Même s’il ne présente aucune difficulté de lecture et même si je suis contente de l’avoir lu en tant qu’adulte s’intéressant à tout ce qui touche à cette période historique, j’avoue avoir du mal à dire s’il pourrait séduire véritablement les adolescents… Ce n’est pas un incontournable si l’on veut comprendre le fonctionnement du ghetto de Varsovie.
Absalon est un jeune garçon dont la jambe droite refuse de plier, mais cela ne l’empêche pas de marcher. Ce qu’il n’aime pas, c’est que des gens qui ne le connaissent pas déjà, le voient se déhancher et le prennent pour un demeuré. Demeuré, il ne l’est pas, même s’il est un gars simple, ingénu et hypersensible.
Ayant perdu sa mère, enfant, il vit auprès de son père qui a perdu la raison. Ils habitent une petite ville ouvrière, près de collines entre lesquelles, autrefois, a coulé une rivière.
Malmené par la vie et hanté par le passé, Absalon décide de se rendre à Port Elizabeth soigner sa jambe et voir les vagues de l’océan. Ce lieu, le seul cité dans le roman, permet de situer l’histoire en Afrique du Sud.
Après s’être arrêté au passage pour saluer son ami Emmeth qui tient une station-service, il reprend son sac et remonte la rivière asséchée pour rattraper la route de Port Elizabeth. En cours d’ascension, il rencontre Georges Msimangu, un gars un peu étrange qui vit dans son camion dont il a retiré les roues avant. Après discussion, celui-ci lui propose de le payer s’il lui assure quelques ravitaillements. Absalon accepte, l’argent lui permettra ainsi d’acheter un ticket de bus.
Ce sont donc ces nombreux va et vient que fait Absalon entre le bourg et le campement que ce dernier nous décrit.
J’ai vraiment peiné avec lui et souffert physiquement lors des nombreux déplacements qu’il doit faire avec sa jambe estropiés pour rapporter les courses à son commanditaire. J’ai admiré le courage dont il fait preuve, sa persévérance à aller de l’avant malgré les difficultés. Si j’ai souvent douté de la réalisation de ce projet de quitter son environnement pour une vie meilleure, certainement pas lui, toujours porté par ses rêves en lesquels il croit fermement.
Au fil de ce monologue, notre héros partage ses états d’âme, ses joies simples, ses frustrations, son hyper émotivité et sa culpabilité d’abandonner ses amis tout aussi démunis que lui. Peut-être plus que ses amis, la nature, ses collines et toutes les variations de couleurs ont une place prépondérante dans le cœur d’Absalon. Quant à la saison des pluies, elle imprègne les mémoires et s’avère récurrente tout au long du roman.
Je me suis laissée bercer par ce récit, m’attachant au fil des lignes à ce garçon tellement touchant de simplicité et d’innocence même si j’aurais aimé, parfois, un peu plus d’explications ...
Marcher sur la rivière est un livre délicat, plein de sensibilité, un livre aux chapitres courts, un livre puissant qui touche directement au cœur et qui m’a emportée hors du temps. L’écriture simple, sobre et poétique de Hubert Mingarelli témoigne à merveille des sentiments multiples aussi bien de détresse que d’euphorie éprouvés par le narrateur.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Avec son écriture pure et concise, Hubert Mingarelli livre un plein d’images et de sensations, avec cet huis-clos dont le cadre est posé dans la campagne enneigée aux lacs gelées de la Pologne envahie par l’armée de l’Allemagne nazie qui alors reçoit et fusille des juifs par wagons.
Trois soldats ordinaires soumis aux ordres d’un capitaine autoritaire et sadique, écœurés par cette activité d’assassinat en masse, préfèrent partir en mission commando pour dénicher des Juifs cachés au fin fond des bois.
Après une longue marche éprouvante, qui somme toute leur a donné le temps de faire connaissance, les trois militaires finissent par trouver un jeune Juif qui s’était terré dans un bois au-delà d’un lac gelé. C’est la chaleur d’un feu qui l’aura trahi.
Les trois soldats repartent avec leur prisonnier vers leur base où il sera exécuté mais le soleil se couche et transpercés par le froid glacial qui sévit, ils décident de s’arrêter pour la nuit dans une petite maison polonaise abandonnée.
Faire du feu dans l’âtre de la cuisinière se révélera compliqué par manque de combustible et ils se serviront du bois des meubles, des volets et des portes intérieures.
Leur ration de nourriture est pauvre mais avec la neige fondue, un demi saucisson, un oignon, du saindoux et une poignée de semoule italienne, ils entreprennent de faire une soupe car au-delà d’être frigorifiés, ils ont faim.
Venant du dehors, avec son chien docile, un homme polonais, une espèce de brute édentée au regard mauvais, va s’imposer en s’invitant à leur maigre repas. Au-delà d’être antipathique au possible, il se montrera ravi qu’un Juif se soit fait prendre et sa hargne antisémite va résulter sur un taux d’estime de la part des 3 soldats allemands à l’égard de leur jeune prisonnier.
Les valeurs d’humanité, de partage, d’empathie, de conscience et de tolérance sont chères à l’écrivain qui par ailleurs reste attaché dans ce roman, aux relations père-fils comme souvent dans son œuvre.
Autour d’une modeste soupe bien longue à cuire, c’est un huis-clos tendu au style épuré qui en taisant les mots sait nous fait ressentir le froid et le chaud d’une guerre cruelle et inutile où les individus de tous bords, sont pris au piège malgré eux.
Un récit intense avec une mise en images remarquable, talentueusement écrit par le très, (immensément), regretté Monsieur Hubert Mingarelli….
Nous sommes en Pologne pendant la seconde guerre mondiale. Les troufions sont réunis dans la cour, le lieutenant Graaf, un peu sadique, leur annonce une prochaine livraison. Trois soldats allemands n’ont pas envie de s’attaquer à cette livraison. Je comprends qu’il s’agit de juifs qu’ils vont devoir exécuter, et, tout allemand qu’ils sont, ils répugnent à ces exécutions.
Passant outre leur lieutenant, ils vont demander à aller à la chasse à) l’allemand dans la campagne polonaise, autour du camp.
C’est l’hiver, beaucoup de neige et le froid, mais nos trois soldats sont heureux d’échapper à l’exécution.
L’œil aguerri d’Emmerich découvre la cachette d’un homme dans une sorte de tanière, simplement parce qu’à l’endroit de la cheminée d’aération, il y avait moins de givre. Ils ont « leur juif » et, vu que la nuit tombe, ils dénichent une maison polonaise abandonnée et décide d’y passer la nuit avec leur prisonnier. Ils partagent avec le juif leurs provisions
Débute alors un huis clos augmenté d’un polonais et son chien venu chercher refuge et chaleur. La vue du prisonnier déclenche une harangue haineuse chez le polonais alors que les trois allemands le traitent avec humanité, ils partagent la même table. Ce repas pris en commun amène réflexion et doute sur ce qui va advenir, change le regard des trois soldats allemands, avec la haine du polonais comme catalyseur
Avec Un repas en hiver, Hubert Mingarelli rappelle que tous les soldats allemands ne sont pas des nazis. Ils sont enrôlés et doivent servir leur pays. Partager un repas, une gamelle, n’est pas une chose anodine et peut peut-être rappeler un autre dernier repas pris en commun (la cène).
J’ai aimé ce regard allemand-juif où l’humanité dépasse l’idéologie. Ce repas amène la réflexion et la prise de conscience, le débat, mais…
Un livre humaniste, court, concis, sobre, sans un mot de trop qui nous met en face, non pas de salauds de boches, mais d’hommes confrontés à une guerre qu’ils subissent. Le salaud antisémite, polonais, leur permet d’ouvrir la voie au doute. L’auteur, sans démonstration grandiloquente, avec une économie de mots, de paroles montre la complexité des sentiments qui secoue les soldats allemands et les traces laissées par cette rencontre.
Je découvre Hubert Mingarelli avec un livre qui laisse des traces. Très belle lecture.
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