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Berlin décembre 1946, la ville est en ruine, divisées en secteurs qui cohabitent plus ou moins bien, les Berlinois sont affamés et frigorifiés. C’est dans ce contexte que Richard Oppenheimer va devoir reprendre du service : sollicité une fois de plus par un gradé soviétique pour faire innocenter un camarade qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment, l’ancien commissaire retrouve ses vieux réflexes pour élucider une série de meurtres étranges. En effet, depuis quelque temps, des hommes sont retrouvés nus dans les ruines de la ville, le corps couvert de nom recopié sur leur corps à l’encre indélébile. Le plus étrange est qu’à chaque fois ce sont eux-même qui ont patiemment recouvert leur corps de leur écriture. Qui sont-ils ? Et que signifient tous ces noms inconnus?
Quatrième tome des aventures policières de Richard Oppenheimer, « La Vengeance des Cendres » prends place dans le Berlin de décembre 1946, une ville détruite, divisée, affamée et en plus de tout, totalement frigorifiée. Le roman prend longuement, et à maintes reprises, le temps d’expliquer tout ce contexte. C’est d’ailleurs une constance dans cette saga « Oppenheimer », et c’est une chose que j’apprécie particulièrement : Harald Gilbers profite de ses romans pour nous en apprendre beaucoup sur l’Allemagne de la fin de la Guerre et de l’immédiat après-guerre, il n’hésite jamais à faire de courtes et fréquentes digressions pour expliquer telle ou telle question, et moi je suis toujours heureuse d’apprendre des choses. J’ai trouvé cette intrigue policière plus claire et plus lisible que la précédente, moins politique aussi. Les rivalités entre Est et Ouest semblent un peu atténuée dans ce tome, certainement pour mieux rebondir par la suite. Ici, il est question de morts en série sur fond de vengeance. On se laisse emmener tout doucement dans une intrigue simple, dont on devine assez vite les grandes lignes tout en se laissant un peu surprendre par les détails. Il y a même un petit rebondissement à la fin, que j’avais un tout petit peu deviné mais qui est malgré tout assez bien amené. Voilà un tome qui regarde davantage vers le passé, vers les affres du nazisme plutôt que vers l’avenir vers la future Guerre Froide (voir tome précédent). C’est toujours un plaisir de retrouver Richard Oppenheimer et sa femme Lisa, le truculente Hilde et puis cette fois-ci une poignée de nouveaux personnages comme le petit Théo. Ce gamin des rue, qui a eu la mauvaise idée de lâcher la main de sa mère dans le chaos d’une gare, se retrouve à survivre tel un enfant sauvage dans les ruines de Berlin. Il symbolise à lui seul le désarroi d’une population allemande défaite qui n’a pas finit de payer l’addition d’un nazisme que, quoi qu’on en dise en 1946, elle a porté démocratiquement au pouvoir. Ce 4ème tome est, à mes yeux, meilleur, plus clair et agréable à suivre que le précédent et donne très envie de continuer la saga.
Avril 1945, Berlin va tomber, les russes arrivent et rien ni personne ne les arrêtera. Ils sont précédés de rumeurs terrifiantes, qui font particulièrement peur aux femmes allemandes. Oppenheimer et sa femme Lisa sont terrés dans la cave d’une brasserie, ils ne peuvent quasiment plus sortir, ils n’ont pas grand-chose à boire et peu de choses à manger. C’est le chaos à l’extérieur et la seule chose qu’ils attendent, c’est la capitulation de l’Allemagne. Ils vont temporairement avoir un compagnon d’infortune, un allemand qui trimballe partout une valise. L’arrivée des soviétiques est imminente, et le colocataire est assassiné lors d’une sortie hasardeuse par un soldat déserteur. Voilà Richard et Lisa en possession d’une valise fermée et ils sont très loin d’imaginer que l’avenir du monde dépend de ce qui est caché à l’intérieur.
Le troisième volet des aventures de Richard Oppenheimer, « Derniers Jours à Berlin » prends directement la suite du tome précédent « Les fils d’Odin ». Le récit reprends pile où l’intrigue avait laissé Richard et Lisa (sans abris, sans ressources, sans rien), et leur amie Hilde (dans une prison du Reich, sur le point d’être exécutée). C’est une saga à impérativement lire dans l’ordre et sans laisser top de temps entre les livres. Toute la première partie du récit de ce troisième volet n’est en définitive qu’une sorte de roman survivaliste. Pendant toute cette première partie, il n’est question pour les personnages principaux de survivre, la véritable intrigue « policière » ne pourra débuter que lorsque les soviétiques auront envahis Berlin. A ce moment là le couple est séparé, Oppenheimer est embarqué par un colonel russe et Lisa est violée par un soldat déserteur de l’Armée Rouge. Le sort de tout le reste du roman est déterminé par ces quelques chapitres, qui interviennent au bout d’un tiers du livre environ. Au centre de cette intrigue, une mystérieuse valise tombée aux mains du violeur de Lisa, et comme tout le monde veut absolument cette valise, et qu’Oppenheimer veut venger le viol de sa femme, cela embarque l’ancien commissaire de la police de Berlin dans une traque sans merci. Naviguant entre les soviétiques et les alliés (qui ne sont plus très loin de la ville), Oppenheimer ne cherche qu’à se venger, il ne mesure pas ce qui se joue avec cette fameuse valise. Chaque chapitre débute par un compte à rebours qui compte les jours jusqu’à la fin de la Guerre, et le livre se termine avec le compte à rebours, donc en aout 1945. Même si l’intrigue est complexe, même si, lorsque les soviétiques débarquent, le nombre des protagonistes augmentent subitement, on réussi à garder le fil de l’intrigue sans trop de difficultés. Harald Guilbert ne dépeint pas l’Armée Rouge comme un ensemble monolithique de soldats assoiffés de vodka et de viols, comme cela a souvent été fait. C’est une réalité historique et évidemment un bon nombre des personnages russes se comportent ainsi. Mais pas tout, il y a chez ces russes des communistes convaincus, des ukrainiens réfractaires au pouvoir de Moscou, des pauvres types surtout intéressés par faire du marché noir, des petits gars qui tombe naïvement amoureux de jolies allemandes et n’ont aucune envie de les violenter (et qui peuvent même chercher à les protéger), des gradés qui essaient d’empêcher les exactions, d’autres qui les couvrent sans y accorder de l’importance, etc… Oppenheimer, encore plus que dans les deux tomes précédents, se retrouve par hasard au croisement de son histoire personnelle et de la Grande Histoire. Il ne le sait pas, il ne s’en rendra réellement compte que dans l’épilogue du livre, mais le petit commissaire juif de Berlin dévasté, en cherchant le violeur de son épouse, est devenu un pion dans l’ébauche d’une nouvelle guerre qui se profile, la Guerre Froide. Berlin n’est pas encore totalement libéré qu’elle a déjà commencé. « Derniers Jours à Berlin » est le roman charnière entre deux guerres, celle qui se termine, celle qui a déjà commencé.
Berlin, janvier 1945, le Reich « qui devait durer mille ans » est à l’agonie. Les bombardements alliés sont quasi quotidiens et terriblement destructeurs, les troupes russes avancent et rien ne semble être en capacité de les arrêter. Devinant une fin désormais inéluctable, le pouvoir hitlérien semble vouloir emporter le peuple allemand avec lui dans le néant, ses tribunaux condamnent à mort à tour de bras, pour un petit délit de rien, pour une simple parole. C’est pour la mort de son mari qu’Hilde, la grande amie d’Oppenheimer, est incarcérée et va être jugée et sûrement condamnée puis exécutée. Son mari, un médecin SS, avait préparé sa fuite vers l’Ouest et emportant les résultats macabres des expériences innommables qu’il a conduit en camp de concentration. Hilde le détestait, mais elle ne l’a pas tué. Oppenheimer, qui a changé de nom et vit plus ou moins clandestinement, va tout mettre en œuvre pour prouver l’innocence de son amie. Mais cela suffirait-il à la sauver face à une justice aux ordres du parti nazi ?
Deuxième volet des aventures de Richard Oppenheimer, « Les Fils d’Odin » prend la suite quasi immédiate de « Germania ». Même s’il n’est pas absolument indispensable d’avoir lu le premier tome pour s’attaquer à ce roman, c’est quand même préférable car sinon comment comprendre qui est Oppenheimer, pourquoi vit-il sous un nom d’emprunt et séparé de son épouse Lisa, pourquoi est-il si attaché à son amie Hilde et pourquoi connaît-il personnellement la pègre berlinoise ? Cette seconde enquête est bien plus personnelle pour Oppenheimer puisqu’il s’agit de trouver la preuve qu’Hilde n’a pas assassiné son mari. Et c’est un compte à rebours qui s’est enclenchée car la justice du Reich est désormais aussi expéditive qu’elle a toujours été exclusivement à charge. Hauser, le mari d’Hilde, était un médecin SS qui officiait en camps de concentration, pas besoin d’en dire davantage sur les exactions qu’il a commis. Nazi mais néanmoins déserteur, il fuit l’avancée des Russes ses précieux résultats sous le bras. Voilà par Harald Guilbert l’occasion de jeter une lumière crue sur deux aspects de l’Allemagne nazie, une très connue et une beaucoup moins. La première notion est celle du dévoiement de la médecine par des médecins nazis criminels, coupable d’expériences innommables dans les camps de concentration (Hauser symbolisant dans le roman tous les petits Mengele passés sous le radar de la dénazification). Sur ce point, rien de nouveau, ce genre de crimes étant aujourd’hui bien connu et documenté. En revanche, on connaît moins l’attrait des nazis pour l’occultisme et les cultes païens, et notamment pour des cultes scandinaves dont l’idéologie est parfaitement adaptée au nazisme et qui existent encore de nos jours, voire même qui ont encore pignon sur rue dans certains pays nordiques. Voilà qui éclaire d’un jour nouveau l’attitude d’une partie de la population scandinave pendant la Guerre. Le roman met en scène une secte, « Les Fils d’Odin », dont les préceptes vont presque au-delà du nazisme, ça laisse songeur… L’intrigue est bien menée, le rebondissement final m’a surprise, et la fin en forme de point d’interrogation (le roman se termine sans que toute l’intrigue ne soit dénouée) donne furieusement envie de continue la saga. Et puis il y a le contexte historique, au-delà même de l’intrigue : Berlin de janvier à mars 1945, Berlin terrassé par les bombes, Berlin dans laquelle les nazi(e)s dissertent sur les meilleures manières d’en finir, Berlin bruissant de rumeur affolées sur les combattants russes (dont bon nombres s’avéreront justifiées), Berlin qui agonise lentement être les deux fronts qui se rapprochent et le pouvoir aux abois qui veut emporter toute la population dans sa chute. En lisant ce roman, on voudrait compatir aux malheurs du peuple allemand, mais on a un peu de mal : les exactions, le tapis de bombes, ces allemands-là semblent les découvrir et aucun d’eux ne mentionne jamais le passé récent : l’examen de conscience n’est pas encore d’actualité. C’est le drame du peuple allemand : avoir amené Hitler au pouvoir démocratiquement, c’est être condamné à être assimilé à lui, et qu’importe si Oppenheimer et bon ombre des protagonistes du roman sont anti-nazis. Très bon deuxième tome, passionnant d’un point de vue historique et à l’intrigue bien charpenté « Les Fils d’Odin » est un polar historique fort recommandable.
Berlin sous les bombes, printemps 1944… L’ex-commissaire de la Kripo Richard Oppenheimer (rien à voir avec le concepteur de la Bombe A), juif (et donc interdit de fonction publique depuis des années), survit dans des conditions précaires. Il sait qu’à tout moment, il peut être arrêté et disparaître dans les geôles du Reich, il ne doit son salut fragile qu’à Lisa, son épouse aryenne. Il est donc particulièrement étonné d’être sollicité par la SS pour résoudre une série de violents meurtres de femmes. En acceptant (pas sûr qu’il ait réellement la possibilité de refuser!), il renoue avec son ancien métier d’enquêteur qui lui manque beaucoup, et il y voit aussi une occasion d’être protégé, au moins le temps de l’enquête. Mais collaborer étroitement avec la SS, n’est-ce-pas aussi s’approcher dangereusement de la gueule du loup ?
En commençant cette nouvelle saga berlinoise, difficile de ne pas penser à Phillip Kerr et à son héros Bernie Gunther, difficile de ne pas penser non plus aux « Promises » de Jean-Christophe Grangé. Mais Richard Oppenheimer, qui débute ses aventures dans « Germania », est un héros de saga qui, je le pressens, va se suffire à lui-même. Ce premier tome est épatant, la lecture est fluide, les chapitres courts, l’intrigue est bien menée et claire et surtout le contexte est passionnant. Le personnage principal, Richard Oppenheimer, est un survivant. Son statut de juif aurait du lui couter la vie depuis longtemps. Au printemps 1944 (le Débarquement de Normandie a lieu en plein milieu du roman), dans un Berlin bombardé nuit et jour, avec un pouvoir nazi aux abois et des fanatiques qui ne comprennent pas encore que le vent a tourné, il est à la merci d’une seule visite de la Gestapo. Lui et sa femme ont du mal à se nourrir et passent leur nuit dans les caves de leur immeuble. C’est son statut marital qui l’a momentanément sauvé (ce que j’ai eu un peu de mal à comprendre au début), C’est un héros immédiatement sympathique, un peu désabusé, un peu fataliste (forcement), amoureux de musique classique et passionné par son ancien métier. Il se retrouve à enquêter aux côtés d’un SS dont il ne sait trop quoi penser. Le lecteur, lui, sait quoi penser de Vogler, ce sale type qui n’a pas hésité à dénoncer son propre père à la Gestapo ! Il n’y aura que deux moments où ce SS trouvera un petit peu grâce à nos yeux, coincé dans la cave d’une maison bombardée et à la toute fin. L’enquête, qui mêle idéologie, politique, psychiatrie et mémoire de la Grande Guerre, est claire, passionnante en plus d’être plutôt crédible. Le dénouement n’arrive qu’à quelques pages de la fin, et il est à la hauteur de l’ensemble du roman. Le contexte historique est lui aussi, un personnage à part entière. Le Reich est condamné, bombardé, désillusionné, le Débarquement des Alliés fait naître pudiquement l’espoir dans la population, l’espoir d’une défaite, ce qui est assez paradoxal. L’attitude des nazis pendant cette période est elle aussi paradoxale : ils clament croire encore à la glorieuse victoire, mais ce n’est sans doute qu’une sorte de déni. Il y a une scène, où Oppenheimer est sur le point d’être assassiné en pleine rue par des enfants des Jeunesses Hitlériennes, qui fait froid dans le dos. Cette saga berlinoise, qui commence avec « Germania », s’étale à ce jour sur 6 tomes : j’ai déjà pris rendez-vous pour la suite.
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