Engagé, corrosif et superbement dessiné, le roman graphique du dessinateur turc vient de décrocher le Prix Relay de la BD
Engagé, corrosif et superbement dessiné, le roman graphique du dessinateur turc vient de décrocher le Prix Relay de la BD
Lucide mais drôle, l'auteur de "Jusqu'ici tout allait bien..." évoque la société turque, la censure et son travail de caricaturiste
Récit autobiographique d'un jeune auteur de dessins satiriques qui s'éveille à la conscience politique en Turquie, en opposition à l'installation d'Erdogan.
Furieusement actuel avec les élections en cours....
Pour autant, dans le même genre, j'ai largement préféré les récits de Guy Delisle (Pyongyang, Shenzhen, Chroniques Birmanes / de Jérusalem...) ou de Fabien Toulmé (L'Odyssée d'Hakim, Les reflets du monde : En lutte).
Une superbe plongée dans l'histoire récente de la Turquie à travers les yeux d'Ersin Karabulut.
On perçoit l'évolution de la société turque avec la montée en puissance et l'affrontement des différents mouvements de pensée.
Le trait est vif et enjoué, le récit vivant, ce qui donne du peps à la lecture, malgré l'Histoire et les histoires pourtant pas toujours joyeuses.
Ersin Karabulut naît à Istanbul au début des années 80, de parents instituteurs, ce qui ne garantit pas l'aisance financière. Son père réalise de petites peintures pour boucler les fins de mois. C'est peut-être de le voir dessiner qui donne l'envie à Ersin de devenir dessinateur.
Mais en Turquie, il n'est pas bien vu de faire du dessin surtout si celui-ci égratigne le pouvoir. Le père d'Ersin lui conseille de faire des études d'ingénieur et de laisser tomber le dessin. Ersin obéit quelque temps, puis n'en peut plus et se dirige vers le dessin et la bande dessinée.
C'est un album biographique qui décrit les envies, les doutes, les peurs de l'auteur et celles de ses proches, le pays qui change, qui, après avoir été une démocratie tend de plus en plus vers un pouvoir autoritaire et religieux. Lorsque Recep Erdogan est caricaturé en animal sur des couvertures de journaux satiriques, il les attaque et même s'il perd ses premiers procès, la censure est quand même proche.
Ersin Karabulut dessine ses jeunes années, avec tout ce que cela suppose de faits pas glorieux, de situations adolescentes pas flatteuses. C'est drôle, parce qu'il n'hésite pas à se moquer de lui-même et que le dessin parfois un peu naïf renforce l'humour. Mais paradoxalement, le même dessin renforce également la tension lorsque la situation devient plus tragique.
Bref, Ersin Karabulut est un auteur de BD à suivre, je l'ai déjà lu grâce à Contes ordinaires d'une société résignée, un recueil de nouvelles futuristes et Jusqu'ici tout allait bien..., une critique virulente du capitalisme et du repli sur soi. Et ce Journal inquiet d'Istanbul est un premier tome, qui devrait donc, logiquement voir des suites.
Cette BD est d’abord une autobiographie. Ersin Karabulut, dessinateur de presse et auteur de bandes dessinées, s’y livre sans détour. On découvre un petit garçon angoissé, puis un adolescent qui doute, et enfin un adulte qui souffre de troubles obsessionnels compulsifs. Les trois peinent à trouver leur place dans une Turquie en plein chaos.
C’est donc ensuite un livre sur la Turquie, un pays où tout le monde s’appelle “frère” mais où les frères s’entretuent. C’est une œuvre bavarde, avec bien plus de texte que de dessin. On apprend beaucoup sur l’auteur, sur le pays et sur le monde de l’édition. Certaines pages grouillent de détails sur la Turquie : les bus bondés, les femmes qui font leurs courses, les barbus qui menacent les voisins laïques… Le contraste entre le centre-ville et les banlieues est saisissant.
C’est enfin une œuvre sur une passion, celle du dessin, qu’il soit politique ou non, vécue par un gamin joyeux et acharné. Le traitement des couleurs est inégal : certaines croquis sont en noir et blanc, d’autres sont colorés, avec une majeure pour les teintes neutres. Les personnages sont disgracieux et sympathiques, avec certains traits accentués ou caricaturés : des gros yeux, des nez en patate, des dents apparentes, des oreilles décollées. Il en ressort un joyeux bordel qui contraste avec la gravité de l’ambiance. Mention spéciale pour les héros de ses bandes dessinées préférées qui accompagnent le narrateur et qu’on a la chance de croiser nous aussi.
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