Cette semaine, suivez Cécile Boyer-Runge, PDG de Robert Laffont et Betty Mialet codirectrice des éditions Julliard.
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Découvrez le palmarès des romans de la rentrée littéraire 2015 par les explorateurs de lecteurs.com Tous nos conseils de lecture pour les incontournables de cette rentrée
Aussitôt après avoir refermé Brooklyn, roman où on fait la connaissance d'Eilis, j'ai enchaîné avec celui-ci. Alors que pour moi le précédent s'était fini avec angoisse, le début de Long Island m'a fait l'effet d'une grosse claque. On est vingt ans après.
Un homme veut absolument parler à Eilis et ce qu'il va lui dire pourrait bien changer le cours de sa vie. Eilis a épousé Tony, cet italien avec qui elle a eu deux enfants, mais alors elle a épousé aussi toute sa famille. Tout le monde se mêle de tout. Tous les dimanches c'est repas familial chez ses beaux-parents qui habitent juste en face, des heures à table avec tous ces italiens au verbe haut, qui parlent en même temps, coupent la parole et considèrent que les femmes ne doivent pas contredire les hommes. le patriarche est le Maître absolu. Une épouse doit écouter son mari. Un mari doit tenir sa femme.
Parce que Tony a dérapé et ébranlé les bases de la famille, Eilis part en Irlande voir sa mère qu'elle n'a pas vue depuis vingt ans. Quand la vie vacille, on a envie de retourner chez soi, auprès de sa mère. Ses enfants décident de la rejoindre un mois plus tard pour enfin rencontrer leur grand-mère. Mais vingt ans plus tard, est-on encore chez soi ou est-on devenue une étrangère ? Sa mère est tellement distante avec elle.
C'est une histoire qui nous parle du déracinement, du temps qui passe, très vite, trop vite, des choix qu'on a faits, et des renoncements, peut-être aussi des regrets et des remords qu'on peut avoir. Parce qu'un jour elle a dû partir, contrainte et forcée, c'est comme si elle était pour toujours l'irlandaise en Amérique et l'américaine en Irlande. Plus jamais vraiment à sa place. Ce roman nous parle aussi des non-dits, de l'incapacité de communiquer, des souhaits ou besoins discordants au sein d'un couple, des ultimatums qu'on craint de lancer par peur de tout perdre.
J'ai senti beaucoup de nostalgie. À peine le temps de se retourner et tout est devenu différent. Rien n'a changé à Enniscorthy, pourtant plus rien n'est pareil.
Et puis, loin des yeux, loin du coeur. Non ?
J'ai trouvé Eilis très magnanime. À sa place, aurais-je souhaité sauver mon couple ? Absolument pas. J'aurais explosé l'indélicat.
Un certain nombre d'éléments de ce roman m'ont parlé, comme l'exil, le fait de se demander où est sa place, le bon endroit, où est-on réellement chez soi, la mère refuge, les retrouvailles avec ses amies d'enfance longtemps après... cependant, à part la claque du début, aucune émotion au rendez-vous. Les personnages sont tièdes, ils ont tous l'air stoïques, indifférents. Car la grosse déflagration du début aurait dû occasionner des cris, de la colère, et cela chez plusieurs personnages. Or rien, on a l'impression d'être face à un non évènement. C'est comme si l'auteur était passé à côté de son sujet. D'ailleurs, quel est ce sujet finalement ? le couple ? L'amour au long cours ? La trahison ? La famille ? Les racines ? L'amitié ? La loyauté ?
Malgré mes quelques réticences, c'est un roman qui se lit bien, mais ne provoque pas réellement d'émotions.
J'aime beaucoup le dépaysement dans mes lectures et c'est ce que m'a occasionné ce livre, tant pour le lieu que pour l'époque, qui commence en Irlande dans les années 50. Eilis vit avec sa mère et sa soeur à Enniscorthy, petite ville irlandaise où il n'y a pas de travail. Alors que beaucoup partent travailler en Angleterre comme ses trois frères, Ellis va avoir l'opportunité de partir à Brooklyn et d'y avoir un emploi. Mais c'est loin l'Amérique ! Mais on peut s'y enrichir ! Et que c'est dur de partir si loin quand on a toujours cru qu'on passerait toute sa vie au même endroit. Eilis s'imaginait plus tard, mariée avec quelqu'un de chez elle, en Irlande, mère au foyer... le plus dur, c'est pour la maman qui voit partir ses enfants, loin, trop loin. En réalité, Eilis n'a pas choisi de partir si loin, les autres ont décidé pour elle. Elle voudrait pourtant tellement rester. Et moi toute cette partie m'a exaltée autant qu'effrayée. L'Amérique ! Brooklyn !! Oui mais tout quitter...
Alors qu'Eilis s'adapte tranquillement à sa nouvelle vie dans cette ville si peuplée, dans son travail qu'elle accomplit avec conscience, elle est assaillie par le mal du pays. L'endroit où elle est née, où elle connaissait tout le monde et où tout le monde la connaissait lui manque terriblement, au milieu de cette fourmilière où elle a la sensation de n'être personne. Un énorme sentiment de perte la submerge, de vacuité de cette nouvelle vie, d'inutilité.
Mais en Amérique, les migrants forment des communautés, presque des fraternités. On est seule sans l'être tout à fait, tout en souffrant énormément de solitude. Heureusement, le père Flood, qui est à l'origine de son départ à Brooklyn, est là quand il le faut. Un vrai prêtre, altruiste et généreux.
Ce qui m'a vraiment frappée dans un premier temps, c'est la solitude du migrant, au milieu d'une multitude de gens.
Ça a été le dépaysement assuré pour moi, avec cette Amérique telle que je la vois dans mon imagination, peut-être à tort, cette terre accueillante, formant des communautés solidaires, la main tendue vers leurs semblables, tous ceux qui viennent d'ailleurs.
J'ai aimé cette histoire simple qui parle de gens simples qui construisent leur vie, avec les joies et les drames qui la traversent.
Il y a aussi beaucoup d'humour, ça a été un vrai plaisir. Et surtout, ça raconte cette Amérique terre d'accueil, bien avant celle de maintenant en train de devenir terre de rejet.
J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman qui parle d'ambivalence, de désirs contradictoires, de déchirement entre deux pays, deux cultures, entre le nouveau monde et ses racines bien ancrées, deux histoires, deux possibilités, qui nous interpelle nous, lecteurs, et qui m'a fait bondir et espérer une chose plutôt qu'une autre et m'a fait arriver au bout avec une sourde angoisse.
Lire le premier tome d’une trilogie avec le deuxième, cela pourrait paraître illogique, mais après tout, c’st un peu comme un préquell dont ne se privent pas les réalisateurs de blockbusters… Se souvenir de ce qui a lieu dans le futur pour éclairer les événements présents …
Nous sommes donc en Irlande, où Eilis vit de petit boulots dans l’ombre de sa soeur Rose. Lorsqu’on lui propose de tenter sa chance à New-York, le choix n’est pas très compliqué, malgré la réticence à se séparer de sa famille. Et comme aucun potentiel amoureux ne la retiendra, elle embarque pour l’Amérique.
Hébergée dans un foyer strictement tenu par une propriétaire soucieuse de la bonne moralité de ses pensionnaires, Eilis est embauché dans un magasin et suit des cours de comptabilité. Les sorties du samedi sont les seules distractions de la jeune fille, et on ne peut pas dire qu’elle y prenne un grand plaisir. Jusqu’au jour où elle rencontre le beau Tony….
Sur fond d’histoire d’amour, ce roman est aussi une chronique sociale de la vie ordinaire des années 50, avec une héroïne confrontée en permanence à des choix difficiles, l’exil, avec ce qu’il comporte de rupture et de difficultés de communication à une époque où les échanges se faisaient par écrit. Malgré les multiples guides auto proclamés qui l’entourent (famille, logeuse, prêtre …) elle parvient à se faire un chemin personnel.
Devra t-on attendre encore une dizaine d’année pour connaître l’issue de cette histoire ? Espérons que non.
324 pages Robert Laffont 6 janvier 2011
« Long Island » est ma première incursion dans l’œuvre Colm Toibin, l’écrivain irlandais considéré par certains comme un des maîtres de la fiction contemporaine. Même si les lecteurs avisés le conseillaient, je n’ai pas lu « Brooklyn », le livre précédent, avant de me lancer dans celui-là. Mais, je n’ai pas ressenti de manque d’informations qui m’aurait pu contrarier ma lecture. Cette histoire fonctionne bien seule.
En dépeignant les personnages, en fouillant leurs intimités, l’auteur nous fait participer à leurs existences. Le lecteur se retrouve au cœur de cette vague de sentiments qui se propage. Tous les protagonistes sont désorientés par les évènements. Comme ce sont des gens ordinaires, on se reconnait dans leurs dilemmes, on partage leurs tracas intérieurs.
L’écrivain réussit avec brio à écrire les silences. Sans jamais décrire les émotions des protagonistes, il nous les fait ressentir. Ce sont les attributs d’un grand écrivain ! Il ne nous prend pas par la main, mais laisse notre sagacité faire son travail. Ainsi, on se projette dans ces relations hommes/femmes où tout n’est pas dit. Le manque de communication est évident dans les échanges entre les personnages. Les incompréhensions jouent alors un rôle important sur la direction que prend l’aventure.
Colm Toibin fait jouer sa plume somptueuse pour nous offrir une histoire en apparence simple mais qui révèle toute la complexité de l’être humain. Avec subtilité et justesse, il nous raconte les tourments d’individus comme vous et moi, qui se retrouvent face à des décisions difficiles. Pour se faire, ils vont devoir s’arranger avec leurs secrets personnels et le regard des autres. L’auteur nous montre avec ce triangle amoureux que nos vies sont aussi dirigées par la pression de l’image, des qu’en-dira-t-on et que l’on raisonne en grande partie notre vie au regard des autres. Un livre à méditer !
https://leslivresdek79.wordpress.com/2024/12/26/983-colm-toibin/
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