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Maurice Hannigan, quatre-vingt-quatre ans, est accoudé au bar du Rainsford Hotel « Je suis assis ici et j’ai mes raison, fiston, j’ai mes raisons ». « J’ai une tâche à accomplir tout à l’heure et une longue soirée qui m’attend »
Toute la soirée il parle à son fils et je me suis trouvée dans le rôle du fiston à écouter ce que Hannigan raconte, sa vie dans toute sa splendeur et sa misère.
Pour raconter, il faut une aide et là, puisque nous sommes assis au bar d’un pub irlandais, il porte des toasts à tous les membres importants de sa famille.
Pour commencer doucement, une stout pour parler de Tony, le frère aîné, celui qu’il admire tant qui l’a protégé des autres lui et sa dyslexie (à l’époque on ne connaissait pas), son inaptitude à lire et écrire correctement. Tony n’a pas survécu à une phtisie.
Là, cela devient plus sérieux, plus dur, alors, allons-y pour un verre de Bushmills (single malt 21 ans). « Celui-ci, fiston, est pour Molly, la sœur que tu n’as pas connue. ». Le plus grand remord de sa vie. Ne pas avoir été présent aux côté de son épouse. Oui, il n’a pas voulu penser qu’elle Molly était déjà morte dans le ventre de sa mère, alors, il a été faire ses affaires, acheter je ne sais quels arpents de terre. « Côté boulot, ma situation n’aurait pu être meilleure. Je prospérais. » Cette blessure de n’avoir pas été à la hauteur le poursuit tout au long de sa vie « Il y a quarante-neuf ans, j’ai rencontré Molly, une seule fois et seulement un quart d’heure. Depuis, elle a continué à vivre dans mon vieux cœur fatigué ».
Une nouvelle stout pour évoquer Noreen, sa belle-sœur, handicapée mentale qui a une passion pour tout ce qui brille. Lorsqu’elle est venue habiter chez eux, elle a été le centre de la famille, bien que difficile quelques fois.
Le quatrième toast avec un Jefferson’s Presidential Select en l’honneur de son fils Kevin son fils unique. Kevin a très bien réussi, parti aux USA, il est devenu un journaliste de renom, ce qui fait la fierté de son père bien qu’il ne le lui dise jamais, on a ses pudeurs. Ah ! La journée où il lui a annoncé son désir, m’a offert de très belles pages. Chaque année Kevin lui envoie une bouteille de whisky pour son anniversaire « Cette bouteille de Jefferson wheated de 18 ans d’âge, tu me l’as offerte l’an dernier pour Noël. Elle a passé la soirée à mes pieds dans un sac. » C’est celui qu’il déguste
Le dernier toast est pour Sadie, SA femme, celle qu’il a toujours aimée et qui lui manque tant depuis sa mort, deux ans déjà . « J’ai gardé le meilleur pour la fin, à tous points de vue. »
« Alors, tu veux la vérité pure et simple fiston ? La raison pour laquelle je suis assis là à marmonner dans mon coin, c’est elle, ça ne t’étonnera pas. Je veux que ta mère revienne, voilà tout. Seul, je n’y arrive plus. Quand je l’ai rencontrée, jamais j’aurais pu imaginé qu’un jour j’aurais du mal à respirer parce que sa brosse à dents n’est plus à côté de la mienne ». C’est simplement beau. Le chapitre sur Sadie est une si belle déclaration d’amour. Toute leur vie côte à côte, accepter la vieillesse de l’autre, s’aimer encore et encore. La mort de Sadie, Maurice ne l’accepte pas. Il a réglé ses affaires et... « J’ai compris que je n’avais pas d’autres choix que de rejoindre ta mère ».
Dans son monologue, il raconte sa vie, sa rencontre avec la famille Dollard, riches fermiers où sa mère était servante et lui, à dix ans, ouvrier agricole, enfin, apprenti. Le père Dollard bat son fils comme plâtre !et, pour se venger, celui-ci s’en prend à Maurice qui n’ose répliquer. La revanche arrive avec une pièce en or qu va tout changer
Les Dollard était une famille de possédant, riches fermiers. Le père de Maurice a pu acheter quelques arpents de terre grâce à La Land Commission qui « permit, dès les années 1920… la redistribution partielle des terres agricoles » au grand dam des Dollar qui ont perdu là des sources de revenus et ouvriers agricoles sous-payés. De plus, le père Dollard, joueur, perdait beaucoup, ce qui a précipité sa chute. La déchéance permit à Maurice d’acheter, entres autres acquisitions, petit à petit leurs terres. Même peu instruit, il a le génie des affaires. La revanche que prend Maurice est inscrite dans son passé douloureux avec la famille Dollard, les humiliations, les torgnoles ont façonné l’homme qu’il est devenu, taiseux, opportuniste, mais grand cœur (l’hôtel en est le témoin).
J’ai souri, pleuré, avec ce fabuleux conteur qu’est Maurice. J’ai aimé sa façon de narrer son histoire, sans s’apitoyer sur son sort, avec tant d’amour pour les siens et à travers, la vie rurale irlandaise du vingtième siècle
Ce n’est pas de la guimauve mais une vie emplie de tristesses, de joies, de coups du sort d’une très belle écriture. Un coup de coeur.
« Alors, tu veux la vérité pure et simple, fiston ? La raison pour laquelle je suis là à marmonner dans mon coin, c’est elle, ça t’étonnera pas. Je veux que ta mère revienne, voilà tout. »
https://zazymut.over-blog.com/2022/05/anne-griffin-toute-une-vie-et-un-soir.html
Maurice Hannigan est arrivé au bout d'un long chemin....
A 84 ans, il sirote quelques verres de Wisky irlandais au bar de l'hôtel ou se prépare une soirée de gala.
Face à lui même et son verre, il raconte sa vie en s'adressant à son fils Kevin.
Pendant cette longue soirée, il va porter un toast aux 5 Amours de sa vie :
-> Tony, le frère ainé idolâtré, parti trop tôt.
-> Molly, "la soeur que tu n'as pas connue"....
-> Noreen, "tata non-non".
-> Kevin, mon fils adoré, parti vivre et travailler aux états-unis, célèbre journaliste dont il sera tellement fier.
-> et enfin, Sadie, la femme de sa vie, aimé jusqu'à la dernière seconde et que la disparition rebat les cartes.
Toute une vie déroulée en un soir en buvant quelques verres au bar de l'hôtel.
L'Histoire de l'Irlande et ses blessures (vagues migratoires vers les états-unis et l'Australie)
Une roman tendre ou l'émotion est omniprésente.
L'humeur bonhomme de Maurice cache une terrible solitude et une farouche détermination .
Un superbe moment de lecture !
A quatre-vingt-quatre ans, l’Irlandais Maurice Hannigan ne parvient pas à faire le deuil de son épouse, décédée deux ans auparavant. Ce soir-là, au bar où il noie son désespoir dans la stout et le whisky, il soliloque sur sa vie passée, ses joies et ses regrets, en évoquant les cinq personnes qu’il a le plus aimées : son grand frère Tony emporté par la tuberculose, sa belle-sœur Noreen enfermée en asile psychiatrique, sa fille Molly morte-née, son fils journaliste en Amérique, et surtout, sa si regrettée épouse Sadie.
Au fil du récit se dessine peu à peu le portrait formidablement vrai d’un homme qui, envahi au soir de sa vie par le désarroi du chagrin et de la solitude, contemple sans complaisance ce que fut son existence et décide courageusement de faire ce qu’il faut pour ne pas en perdre le contrôle. Des bonheurs et des épreuves traversés ressortent une profonde tristesse d’avoir désormais tout perdu, mais aussi une forme d’acceptation résignée née de la certitude d’avoir toujours affronté le destin d’un pied ferme et d’être resté quoi qu’il arrive fidèle à lui-même et aux siens.
Sous ses dehors de dur-à-cuire taiseux, pingre et impitoyable, se cache un être d’une profonde humanité, qui se sera attaché toute sa vie à rester droit dans ses bottes, digne et fier de réussir à prendre sa revanche sur une enfance pauvre et marquée par l’injustice. L’ombre de cette vie écoulée est évoquée avec une telle vérité, les répliques y sonnent avec une telle authenticité, que Maurice Hannigan s’incarne sous les yeux du lecteur d’une manière toute cinématographique. D’ailleurs, je n’ai cessé d’y voir la silhouette, et d’y entendre la voix, de Clint Eastwood.
Tout en pudeur et en émotion contenue, ce roman d’une parfaite justesse réussit à poser avec une étonnante légèreté la question de la douleur, de la solitude et de la dignité des personnes vieillies et désormais seules, parvenues au bout de leur envie de vivre.
Lorsque Babelio m'a proposé de lire le premier roman d'Anne Griffin dans le cadre d'un Masse Critique privilégié, je me suis immédiatement senti enthousiaste, et ce, pour plusieurs raisons. La première d'entre elles tient à la nationalité de l'autrice, irlandaise, que je voyais déjà comme la promesse de retrouver ce pays que j'aime tant. La deuxième repose sur la réputation de l'éditeur dont je connais et apprécie particulièrement le travail dans le secteur de la bande-dessinée. Enfin, la troisième et dernière, le simple fait que l'on me propose un roman suffit à aiguiser ma curiosité (je ne refuse jamais un Service Presse).
J'étais donc dans de bonnes dispositions pour me lancer dans cette lecture et pourtant, un peu moins de 300 pages plus tard, disons-le d'emblée, "Toute une vie et un soir" n'a pas tenu toutes ses promesses. La faute, à mes yeux, à Maurice. Cela vient peut-être de moi, mais il m'a fallu plusieurs dizaines de pages avant de commencer à apprécier le narrateur et porteur de toasts de ce roman. Pendant une bonne partie du roman, je dois avouer que je l'ai même trouvé plutôt antipathique, bourru. Anne Griffin dénoue pourtant avec habileté les noeuds embrouillés de sa psyché mais rien à faire, je n'ai su me départir complètement de cette réserve qui, heureusement, a plutôt eu tendance à s'atténuer. Parce que voilà, malgré Maurice, difficile de ne pas être touché par cette vie, par ces toasts. Difficile de ne pas sentir l'émotion monter lorsqu'il évoque les disparitions de son frère Tony et de sa fille. Difficile également de ne pas être intrigué par cette famille Dollard aux lourds secrets. Difficile enfin de ne pas être impressionné par la qualité de la construction que l'on redoute au début, mais dont on loue finalement la complémentarité qu'elle apporte à l'histoire.
Il y aurait sans doute aussi à redire sur le toast réservé à Sadie, trop court, trop avare en anecdotes même si au final le fait que l'on en redemande suppose que le charme opère. Au-delà des personnages, Anne Griffin dresse un portrait de l'Irlande, évoque l'évolution de son pays dont elle convoque l'âme pour mieux en souligner les turpitudes. A travers Maurice Hannigan, son parcours, son regard sur les avancées techniques, sur l'évolution des rapports humains, l'autrice s'interroge sur nos sociétés et donne, l'air de rien, un supplément d'âme à son oeuvre naissante.
Comme je le dis plus haut, "Toute une vie et un soir" ne m'a pas convaincu autant que je l'aurais souhaité, mais je ne peux nier l'intérêt que suscite déjà chez moi l'idée de lire ses prochains romans.
Un grand merci à Babelio ainsi qu'aux éditions Delcourt pour ce Masse Critique privilégié.
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