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Doux comme de la soie. Une marelle entre ciel et terre. L’éphéméride d’une enfance à hauteur d’enfant.
On pénètre chacune des pièces de ce récit sensible et olympien. Avec cette certitude ne pas craindre le froid.
« Arpenté » une déambulation dont chacun des mots pourrait être un modèle pour un livre plus âgé.
Sorti de l’enfance, en sachant enfin, où se trouve l’espace du sourire et de la raison.
C’est en cela que ce livre est singulier. Entrelacs de cet enfant, un petit garçon de quatre ans, grandissant au fil des pages. Les pieds bien ancrés dans les grandes importances. L’exactitude des souvenirs, ce qui arrime encore à la ferveur de cette trame éloignée des images d’Épinal. L’écriture moderne, tactile, descriptive, dans un avant-gardisme osé et architectural.
Les mouvements, les gestuelles, la cuillère que l’on tourne dans le bol de lait sucré. Les regards observateurs et attentifs à ce qui frémit subrepticement. Les genoux lisses d’une enfance qui n’a pas changé de couleurs. « Arpenté », les ombres sur le sol, les rémanences comme des joyaux sociologiques. Ce texte est une marche signifiante qui parlera à beaucoup. On arpente les routes, les tracés, les bois et les habitations. Les jardins et les albums à colorier. Les espaces de jeux comme ceux des découvertes et des premières trahisons.
« Arpenté », plus on avance, plus le champ de vision devient vaste. « Devant le magasin, sur la place du village, le camion du boucher vient s’arrêter une ou deux fois par semaine. C’est toujours un grand moment, j’y vais parfois avec ma mère. On entre d’un côté par une petite échelle, on défile le long de l’étal, et on sort par l’autre bout du camion. Cette pure horizontalité, presque unidimensionnelle comparée aux magasins ordinaires, cette construction qui ne permet qu’un déplacement en ligne dans un sens, provoque un effet spatial de détermination qui m’est agréable. » « Ces passages, ces sas, ces cachettes, sont une nouvelle et excitante découverte des espaces. »
Ce livre est vivant, éperdument intime, éblouissant de confiance. Au cœur des bruissements des années passées, comme du papier cadeau que l’on déchire vite, pour voir ce qui se cache à l’intérieur. Ici, ce sont les sens qui sont en alerte. Aucune photographie, mais le plan vif, de toute l’idiosyncrasie d’Alain Freudiger. Une spirale, un cercle, « Arpenté », « ces moments forgent à la fois une conscience du danger et un sentiment d’excitation. Ils aiguisent les sens, l’écoute et la vue surtout…. C’est à la fois une première expérience de l’endurance, et une première expérience de l’idéalisme. »
Ce livre ultime murmuré d’une voix calme est le regain d’une enfance. Une invitation dans cette croisée des chemins, où l’étendue du ciel est une carte d’image. On aime l’écoute, ce guide qui nous offre la vue la plus estimable, le doigt pointé vers le ciel et la terre. Le triomphe des mots pour arpenter cette spirale qui palpite encore. « Arpenté », l’initiation à la vie, dont l’expérience de vivre devient un cahier du jour maîtrisé à l’extrême. L’équilibre, la marche habillée de panache. « À l’intérieur de la maison de la maison de Léon , il y a une pendule-coucou, que j’observe avec intérêt, je veux toujours voir le coucou sortir. Il y a quelque chose de très forestier dans cet objet, peut-être des feuilles de chêne, des glands, des pives, du bois en tout cas : c’est un morceau de forêt dans la maison...Elle est aussi une première conscience du temps qui passe : un livre de « Yok-Yok » d’Étienne Delessert m’a beaucoup marqué, qui montre un oiseau sortir de l’horloge-coucou à différentes heures de la journée... »
Le halo de ce récit d’enfance et de confidences est une cour d’école en pleine lumière.
Une époque dessinée à la craie que la pluie n’effacera jamais.
L’épopée d’un monde en grand angle. Ce livre exhaustif, « la vision est-elle d’abord affaire de parole ? Ce n’est même pas croire, croire est totalement court-circuité, les lutins sont là et je les vois, à partir du moment où on en parle », est magistral. Un livre à lire à voix haute ou basse avec une veilleuse qui resplendit d’essentialisme.
« Arpenté » comme un cerf-volant en plein ciel, dont la narration est la mémoire vive. À l’instar du pays natal qui ne s’oublie jamais.
Voici le cinquième livre d’un auteur de pièces sonores, dont le dernier livre : Le mauvais génie (Une vie de Matti Nykänen), une biographie du sauteur à ski finlandais, a reçu le Grand Prix Sport et littérature en 2020. Publié par les majeures Éditions la Baconnière.
Saynètes croquées sur le vif où le fil conducteur, le lien entre ces historiettes disparates (et souvent un peu bizarres) semble être la solitude : celle qui accable un vieil homme seul, celle qui accentue la colère d'un père, celle encore qui rejette ce membre d'une association...
Une humanité un peu à l'abandon, perdue dans sa tristesse et dans des situations parfois cocasses, parfois teintées de nostalgie.
Il y a pourtant dans toutes ces nouvelles une grande tendresse pour ces personnages un peu de guingois, un peu cabossés : j'ai beaucoup aimé Molly et ses illusions déçues, ou encore Flambeaux ; j'ai souri en lisant A la plus belle ;o)
Dommage cependant que l'ensemble soit inégal, je n'ai pas compris le sens de certains récits (je pense à Espagnes qui donne son titre au recueil : l'histoire d'une "construction" soudain rongée par les vers ?) et j'ai trouvé certaines chutes un peu "conceptuelles".
Cette couverture est magnifique, le titre prometteur, mais les 13 nouvelles sur le thème, parait-il, de la rupture et la recomposition (?!) m’ont laissée de glace, et même parfois agacée. La narratrice de la 11ième s’angoisse à cause d’un haricot moisi quand le locataire de la 4ième est persuadé qu’un castor ronge les poutres de l’immeuble et que des collègues, dans la 9ième, règlent mollement leur compte en réunion. Je n’ai eu aucune empathie pour les acteurs, aucun sentiment pour leurs situations, aucune indulgence pour leurs préoccupations, excepté pour Molly, la seule qui a su éveiller mon intérêt. Mais l’écriture est très intéressante, parfois poétique, parfois pincée, parfois drôle, toujours juste elle change et s’adapte à chaque nouvelle. Pour cela je suis allée jusqu’au bout, pour l’écriture…
J'aime beaucoup les recueils de nouvelles, ça permet de faire une pause entre deux lectures un peu musclées et puis, c'est pratique, car on peut les lire dans l'ordre que l'on veut et y consacrer un temps court. Ici 13 nouvelles sans lien entre elles, totalement indépendantes et très différentes les unes des autres. J'ai aimé l'écriture générale, de nombreuses figures de style, des jeux de mots, du vocabulaire. En revanche, j'ai parfois été surprise par le choix d'univers, le concept de certaines nouvelles auxquelles je n'ai pas trouvé beaucoup d'intérêt. J'ai donc eu des impressions et un intérêt inégal pour chacune d'entre elles, parfois souriante, perplexe, amusée, surprise, dubitative... La temporalité aussi est très différente certaines nouvelles se passent aujourd'hui ou dans un passé plus ou moins lointain. Mes préférées sont "Molly" et "Flambeaux", celles que j'ai le moins appréciées sont "tout va bien" et "
Ce n’est donc pas totalement conquise, mais pas totalement déçue que j'ai fini ma lecture. Le format et le livre sont vraiment sympas, les nouvelles sont courtes et l'ensemble est plutôt pas mal. Ce fut une découverte pour moi ne connaissant pas l'auteur.
VERDICT
Comme c'est le cas pour beaucoup de recueils il y a du bon et du moins bon, à vous de vous faire votre idée. Un cadeau sympa à faire.
https://revezlivres.wordpress.com/2016/10/07/espagnes-alain-freudiger/
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