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« Je crois que je n’avais jamais cru aux esprits ni à ceux qui leur parlent. »
D’origine brestoise, Stéphane Corcuff est un enseignant-chercheur, spécialiste du monde chinois et étudie particulièrement Taiwan.
Un hiver, il quitte Taipei pour se rendre dans le sud de l’île. Lors d’une promenade avec ses amis, il entre dans une maison inhabitée et y trouve une tablette funéraire en bois, abandonnée. Au lieu de la laisser à sa place, il la prend avec lui, l’emporte chez lui à Taipei, la dépoussière et se pose mille et une questions à son propos. Deux noms y sont gravés. Il place l’objet face à la mer, soit face à la Chine imaginant que ces deux défunts devaient de leur vivant, venir de ce pays que les Taiwanais ont fui.
Devant rentrer en France pour trois mois, il ne veut pas laisser la tablette seule. Il va au temple pour lui trouver une place en toute sécurité où ces deux défunts se sentiront bien…
Bref, notre professeur sceptique quant aux esprits, se trouve rattrapé dans les rets des croyances chinoises ancestrales par lesquelles nous vivons dans un monde invisible constitué d’âmes, des âmes que l’on doit honorer, nourrir avec des corbeilles de fruits et faire boire avec un petit bol d’eau toujours rempli et de l’encens pour les protéger du mal, etc…
Au temple et dans son entourage, on pense qu’il n’est pas venu à Taiwan par hasard, qu’il n’a pas trouvé et entretenu cette tablette par hasard non plus. Ces deux noms rattachés à des inconnus et abandonnés vont devenir ses ancêtres. (Ce qui remet aussi le concept de famille en question. Nos familles ne sont pas forcément nos vrais parents hormis par la chair. Et, qui sommes-nous, sinon des âmes ? Des âmes en nos corps qui se retrouvent et font que le hasard n’existe pas…)
« A l’intérêt scientifique, à la curiosité culturelle, s’était en tout cas ajoutée une explosion de la pratique et de l’univers mental de la croyance. »
Alors, le jeune homme va se voir obligé de venir une fois tous les trois mois minimum, honorer la stèle de ses « nouveaux » ancêtres.
Du coup, se trouvant convaincu par cette idée de réincarnation et affiliation divine, il pense même déménager définitivement de France et s’installer à vie à Taiwan. Toujours est-il qu’il ne manquera pas son devoir de passer au temple à chacun de ses séjours en ROC.
C’est une nouvelle érudite, écrite avec beaucoup de tendresse et une affection délicate qui n’essaie pas de convaincre qui que ce soit sinon un constat que l’auteur fait sur lui-même et qui bouscule nos affirmations et vérités occidentales pouvant être, somme toute, présomptueuses.
Les questions quant à ce qui se passe après la mort, restent sans réponse sinon concorder avec de fortes convictions personnelles.
Le texte offre une belle approche de l’ex-Formose, agrémenté d’une postface intéressante sur Taïwan avec « quelques éclairages culturels et historiques ».
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