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Nous assistons, depuis deux ou trois décennies, à une extension du domaine de l'autobiographie, désormais légitimée, pratiquée, encouragée et consommée sous des formes extrêmement variées. Cependant, il serait erroné de croire que l'écriture du moi est un phénomène récent dont l'Occident aurait le monopole. Elle s'inscrit au contraire dans une longue histoire que l'on ne peut plus réduire, paresseusement, à la trilogie Augustin - Montaigne - Rousseau.
Le témoignage autobiographique apparaît dès l'Antiquité, en Chine, au Moyen-Orient, en Grèce et à Rome, parmi les rois, les fonctionnaires, les poètes, les historiens, les philosophes, les rhéteurs. Puis le christianisme, l'islam, le bouddhisme intériorisent sa thématique tout en prônant le renoncement à la vie d'ici-bas. À Byzance, le " je " se glisse dans l'Histoire, l'hagiographie ou la règle monastique. Au Japon, des poétesses retracent leur vie amoureuse. Les érudits arabes et chinois glissent leur histoire dans leurs ouvrages. En Europe, plus d'un moine cède à la tentation de se raconter. Les nobles dictent leurs Mémoires pour rehausser leur prestige. Les bourgeois tiennent des livres de famille. Les écrivains et les artistes deviennent les héros de leurs propres oeuvres. Montaigne, enfin, érige le souci de soi en art de vivre. Et, en même temps, certaines périodes, certaines cultures, certains milieux se passent d'écriture du moi...
Ce premier volume, qui sera suivi de deux autres, est consacré à l'avant XVIe siècle.
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