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Revue Des Sciences Sociales, N 30/2003. Les Cicatrices De La Memoire

Couverture du livre « Revue Des Sciences Sociales, N 30/2003. Les Cicatrices De La Memoire » de Herberich-Marx Gene aux éditions Pu De Strasbourg
Résumé:

La préservation de la mémoire des événements collectifs est une condition de la transmission intergénéra-tionnelle. Elle participe à l'intégration des plus jeunes par les anciens, des nouveaux venus par ceux qui sont déjà là, et d'une façon générale, donc, à la cohésion sociale et à la pérennité... Voir plus

La préservation de la mémoire des événements collectifs est une condition de la transmission intergénéra-tionnelle. Elle participe à l'intégration des plus jeunes par les anciens, des nouveaux venus par ceux qui sont déjà là, et d'une façon générale, donc, à la cohésion sociale et à la pérennité du groupe social.

Cette mémoire est fixée et transmise par l'intermédiaire de traces, écrits et monuments, qui opèrent une sélection dans ce qui est considéré comme significatif, tant du point de vue des populations que de celui des institutions. Les souvenirs liés à des épisodes tragiques fonctionnent comme des cicatrices visibles dont l'évocation régulière a pour enjeu d'éviter qu'un jour l'horreur, la douleur, les massacres se répètent. Le non-sens de l'événement initiateur crée une béance, un traumatisme, que l'oeuvre de mémoire permet de cautériser en lui attribuant le sens minimal de l'exemple de ce qu'il ne faut pas reproduire: "Plus ja-mais ça".

Mais ce tri des traces signifiantes, la construction de marques visibles du souvenir: ossuaires, monuments aux morts, cérémonies périodiques... s'organisent aussi autour de discours qu'ils étayent et légitiment. La cohésion du groupe se réalise au bénéfice d'objectifs qu'il faut analyser, religieux, nationaux, idéologi-ques, voire simplement commerciaux si l'on considère l'entreprise du tourisme. Les systèmes de valeurs y sont exprimés, et s'affrontent aussi.

Parmi ces affrontements, celui qui oppose l'histoire au témoignage n'est pas le moins vif. Si l'historien, de par sa formation et la rigueur de ses méthodes d'investigation et de contrôle, peut prendre conscience de ses présupposés et du caractère arbitraire de son modèle interprétatif, le témoin, lui, se réclame de "la vé-rité". Acteur ou spectateur, sa participation à l'événement lui confère un savoir qui ne saurait être remis en question. Pourtant, lorsqu'il transmet son témoignage, il inscrit celui-ci dans un récit qui le modèle et l'interprète. Et ce récit est d'autant plus délicat à interroger qu'il est depuis quelques années obligé de se durcir, de se faire militant contre les tentatives de déni de la mémoire: les thèses négationnistes visent à présenter l'holocauste comme une invention intéressée de ses victimes, révélant ainsi dans sa forme cari-caturale les reconstructions dont l'historien est capable. Se référer au travail de la mémoire, c'est donc aussi envisager autrement le rapport du témoignage et de l'histoire.

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