La dernière édition des oeuvres de Marcel Schwob a plus de soixante-dix ans : celle de Pierre Champion chez Bernouard a paru entre 1927 et 1930. La présente édition entend combler une lacune et restituer à Schwob toute son importance, celle d'un grand conteur, d'un éminent théoricien de la littérature, d'un satiriste, d'un critique, d'un découvreur et d'un témoin de son temps.
On connaît surtout Marcel Schwob (1867-1905) pour ses Vies imaginaires, dans lesquelles il dresse par exemple un portrait saisissant de Lucrèce. Condisciple de Paul Claudel, Léon Daudet au lycée Louis-Le-Grand, il suivra les cours de sanscrit de Saussure au Collège de France, s'intéressera de près à la formation de l'argot français, au jargon des coquillards. Schwob a la carrure d'un érudit, mais aussi la plume d'un journaliste (il publiera chroniques et contes dans L'Echo de Paris). A peine âgé de 24 ans, il est loué par Anatole France pour son recueil de contes Coeur double (1891). Il fréquente vite Léautaud, Courteline, Remy de Gourmont, publie le premier Jarry (Ubu roi lui est dédicacé). Il laisse une oeuvre dans laquelle l'érudition se mêle au réalisme le plus précis. Il meurt au début du siècle, malade, diminué, dans la détresse et la solitude, après être parti sur les traces de Stevenson (voyages à Londres, Jersey, Samoa).
Ses oeuvres sont ici réunies en un seul volume, divisé en deux grandes parties : d'une part les textes de fiction, de l'autre les essais, chroniques et textes divers. Schwob a publié d'innombrables articles et chroniques (en particulier les « Lettres parisiennes »). En rassembler l'intégralité eût considérablement alourdi l'édition . On a donc opéré un choix, en faisant en sorte de donner une image aussi large que possible de la diversité des sujets traités .
On a pris le parti de proposer un recueil à mi-chemin entre l'édition savante et l'édition grand public. A la place de notes, des notices substantielles présentent les recueils de contes, les chroniques ou les préfaces. Une chronologie détaillée, bénéficiant de l'apport de recherches récentes, comble certaines lacunes dans la biographie de l'auteur. Le texte des lettres de Samoa, scientifiquement établi à partir des manuscrits, restitue des passages absents des éditions antérieures. Une préface générale fait le point sur les positions adoptées par l'écrivain face aux grandes questions de son temps (anarchisme, antisémitisme...) et tente de montrer la cohérence profonde de ses thèmes de prédilection (masques, doubles, pitié, pandémie), de sa réflexion sur la littérature, en montrant ce qui unit le conteur fantastique et le théoricien du réalisme, l'érudit et le chroniqueur social et politique, l'homme de l'histoire et l'homme du monde moderne.
Pierre Jourde enseigne la littérature française à l'Université de Grenoble III. Il a publié, depuis 1991, huit ouvrages sur la littérature française et européenne des XIXe et XXe siècles, des volumes d'anthologie (en collaboration) aux P. U. de la Sorbonne et organisé des colloques dont « Géographie de Vialatte » et « La voix de Valère Novarina ».
Patrick McGuinness enseigne la littérature française à l'Université d'Oxford. Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur le symbolisme, comme Maeterlinck and the making of Modern Theatre (Oxford University Press) ou l'Anthologie de la poésie symboliste et décadente (Les Belles Lettres).
Alexandre Gefen est agrégé de Lettres modernes et membre de l'équipe de recherche sur les modernités littéraires de Bordeaux III. Il est l'auteur de La Mimesis (Flammarion).
Bernard Gauthier est conservateur à la Bibliothèque nationale de France
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