#RL2017 ça y est, c’est parti ! Découvrez les avis de nos lecteurs sur cette sélection
C'est une histoire intime, deux soeurs grandissent ensemble dans la France provinciale des années 1980 ; et puis l'une meurt.
C'est une histoire politique, on croit qu'on appartient à un tout ; et puis on ne comprend plus rien.
C'est l'histoire du je et du nous, ces deux-là s'intimident, ils se cherchent, parfois ils se trouvent ; et puis ils se déchirent.
C'est l'histoire de valeurs, elles disent qui on est ; et puis elles se laissent bâillonner.
C'est l'histoire d'un chanteur préféré, tendre et rebelle ; et puis il finit par embrasser les flics.
C'est l'histoire d'un hier, où ne comptait que le futur ; et puis des aujourd'hui, malades du passé.
C'est l'histoire d'un monde qui se croyait fort et paisible ; et puis il réapprend la haine.
C'est l'histoire qui nous arrive ; et puis l'impression de ne plus y arriver.
C'est une nostalgie, sans doute, mais pas seulement : dans la mémoire de ce qui fut, demeurent peut-être les graines de ce qui renaîtra, après la catastrophe.
#RL2017 ça y est, c’est parti ! Découvrez les avis de nos lecteurs sur cette sélection
Embarquez avec nos 50 Explorateurs à la découverte des romans à ne pas manquer cet automne...
Chronique d'une génération, celle des enfants des années 70.
Histoire d'une entente fusionnelle entre deux sœurs.
Drame de la mort de l'une d'elle.
Que deviennent nos rêves et nos aspirations de jeunesse ?
Où sont passés nos idéaux ?
Comment se remet-on de la mort d'un être aimé ?
Un livre riche qui pose de multiples questions, qui soulève de multiples émotions, qui ravive d'innombrables souvenirs.
L'auteur a réussi à mêler les faits de société se déroulant de l'enfance à l'âge adulte à l'histoire de sa vie et de l'incroyable complicité qui l'unissait à sa sœur.
C'est émaillé de multiples chansons qui nous reviennent joliment et nostalgiquement à l'oreille.
Un bel exploit d'avoir réussi avec tant de brio et de sensibilité à fondre les événements sociétaux et personnels et à soulever en nous une réelle émotion.
Un beau et grand livre que je suis heureuse d'avoir découvert.
Une enfance lumineuse, une adolescence insouciante mais engagée, puis vient la tragédie à l''âge adulte. Ce livre est d'une beauté vibrante, il nous conte une histoire intime que viennent percuter des évènements personnels et collectifs sur les 40 dernières années. C'est l'histoire de deux soeurs, c'est l'histoire de l'amour fusionnel qui les lie, c'est aussi l'histoire d'une époque marquée de ses faits historiques et politiques (la chute du mur de Berlin, les manifestations des lycéens contre la loi Devaquet, la révolte des banlieues, le 11 septembre) jusqu'aux événements les plus récents, avec les attentats de Charlie et du Bataclan. C'est aussi la chronique désabusée de cette fin de XXe siècle avec ces désillusions face à un monde qui va mal. Et ce sont ces événements qui nous ont vu – ou fait – grandir comme l'auteur. Ces évènements nous constituent, ainsi que les pensées, les sensations, les sentiments qui les ont accompagnés. Nous sommes une époque, un contexte familial et social.
Dans une première partie, Isabelle Monnin égrène ses souvenirs d'enfance d'une façon extrêmement juste et touchante avec force détails qui sont comme une Madeleine de Proust pour la plupart de ceux qui sont de la même génération : le bulgomme, les beaux verts gravés à motifs raisins, l'électrophone (tourne-disque !), les cassettes sur lesquelles on enregistrait nos chansons préférées quand elles passaient à la radio pour les réécouter en boucle, les visites hebdomadaires aux grands-parents, la maison tellement typique de l'époque, cubique à sous-sol, les sous-pulls en nylon, les walkmans, les correspondantes (dites corres'), j'en passe, il y en a tellement. Sans parler de Michel Drucker, « un espace invariant de nos vies, un endroit où échoueront tous nos weekends ». L'ambiance de l'époque impeccablement rendue.
Puis elle nous raconte son adolescence et son rapport fusionnel à sa soeur, qu'elle vit avec intensité « Elle est mon enfance, je suis son adolescence. » « Nous sommes deux » et elles vivent leur adolescence dans la bulle d'une relation fusionnelle mais « personne ne lui fait signe pour la presser d'en profiter. Personne ne se lève discrètement pour me prévenir. Aucune parole amicale pour me chuchoter que nous fabriquons juste un passé. »
Elle nous raconte aussi sa passion pour Renaud, véritable phénomène générationnel dont les paroles des chansons parsèment ce récit. « Avec le chanteur aux cheveux jaunes, nous apprenons la banlieue, Margaret Thatcher, la Palestine, les enfants de Soweto, Bhopal ou Dublin. Il est notre école sur un voilier. »
Puis elle raconte l'absence, « je suis toute seule » même si sa soeur, ou son fantôme, reste omniprésente. « Je suis deux ». Elle raconte le chagrin, la douleur, le désespoir du deuil, de la perte, celle de sa soeur mais aussi, plus tard de son enfant (qu'elle a raconté dans Les vies extraordinaires d'Eugène).
Puis enfin, à la fin, à la quasi moitié de sa vie d'adulte, elle parvient à écrire « Je suis Je ».
Elle écrit aussi cette mémoire qui fait défaut, qui nous fait oublier les traits de ceux qui ont pourtant compté on le sait, et dont il reste des traces. Elle raconte son métier de reporter, qui lui fait « observer la vie des autres et en saisir l'écho universel ». Finalement elle nous donne à observer sa vie pour que nous en saisissions l'écho universel et c'est réussi.
De très belles pages à la fin sur son rapport à l'écriture, sa « grotte d'écriture », « dans le secret vivant de la clairière, une phrase prend forme, puis une autre… »
Dernières pages sur le temps qui passe, inéluctable, des pages empreintes de nostalgie. On ne sort pas indemne d'une telle lecture.
Enfin, parlons du titre qui est magnifique et qui dit tout, « Mistral perdu ou les événements ».
Anecdote : je cherche ce livre dans les rayons de la FNAC et ne le trouve pas. Je demande à la vendeuse qui au final ne le trouve pas non plus mais me dit : « Une collègue l'a lu et vraiment, elle a été déçu par rapport au précédent."
Du coup, j'ai encore plus envie de le lire.
Et.
Paf. Je le prends en pleine gueule.
Touché en plein coeur.
Générationnel et pourtant tellement personnel. Isabelle Monnin se raconte et nous raconte. Ce temps où on ne mettait pas de ceinture à l'arrière des voitures aux enfants, où on fumait n'importe où, où les téléphones n'étaient pas mobiles … Michel Drucker. Les trente-trois tours. le 11 septembre.
Tous ces petits témoignages universels nous plongent encore plus dans l'histoire personnelle de l'auteur et de sa petite soeur. Tant aimée. Partie.
« Je suis le 11 septembre autant que la seconde où elle est morte.
Je suis tous mes événements. »
Ce livre, c'est de l'émotion. de la pudeur. Des sourires. C'est un livre d'amour, un roman d'apprentissage, un documentaire … Je ne sais pas le qualifier. Pourtant qu'est ce que j'ai aimé cette écriture pleine de poésie. C'est un hommage à sa soeur. C'est un livre politique. C'est un livre écrit par chacun des lecteurs qui l'aura entre les mains.
Ce livre est un poème. Ce livre est une chanson.
« Te raconter enfin qu'il faut aimer la vie et l'aimer même si le temps est assassin et emporte avec lui le rire des enfants … »
Et toujours, oui, toujours, se méfier des vendeuses à la FNAC …
Il était une fois un soir d’octobre dans une librairie. Il était une fois une rencontre avec la nostalgie, le temps qui passe et emporte avec lui les rires des enfants, les mistrals gagnants et une soeur perdue. Un lien défait. Il était une fois ce drôle de pressentiment, celui qu’un livre t’attend, dans lequel tu vas plonger à cœur ouvert. Tu remonteras, tu le sais, un peu essoufflée de cette apnée. Il était une fois Isabelle Monnin. Et aussi Erwan Larher (mais lui, ce sera pour une chronique suivante).
"Mistral perdu ou les événements" est le roman d’une génération. Une génération égarée dans le labyrinthe d’illusions dédalesques, chimériques. Une quarantaine d’années vues tout d’abord par deux paires d’yeux, ceux d’Isabelle Monnin et de sa sœur. « Les filles ».
« Nous sommes deux. Nous sommes les filles… Et ça suffit pour exister », puis soudain par les yeux seuls de la narratrice.
Ce roman est une madeleine de Proust, que ‘l’on savoure avec tendresse, avec la somme de toutes ces choses qui ont bercé unne adolescence, ce besoin d’appartenir à un groupe, d’élargir ce « Nous » à une entité communautaire, celle des poings levés, des revendications , de la main jaune de « Touche pas à mon pote » épinglée sur le col du perfecto, celle qui n’oublie pas Malik Oussekine. C’est la génération Renaud, santiags et bandana rouge. C’est ma génération.
C’est également et peut-être avant tout une formidable déclaration d’amour à une sœur adorée et disparue.
« Nous est morte, vivre n’existe plus et le chagrin est une maladie longue ».
Comment survivre à l’amputation de cette partie de soi, ou plutôt comment continuer à la faire vivre, à faire en sorte que ce « Nous » demeure debout, au-delà de l’atroce cicatrice ?
Isabelle Monnin fait le parallèle, et elle le fait avec un talent incroyable, une fragilité qui n’a d’égal que sa force, entre ses propres deuils et celui de ce monde qui sombre inéluctablement.
« Je nous vois comme un troupeau aveuglé, contraint de marcher sans guide ni but, au bord d’un gouffre que personne n’a cartographié. Il faudrait s’arrêter à l’abreuvoir, profiter d’un repos sous les arbres, attendre les silences, ça s’appellerait réfléchir. »
J’ai été profondément touchée, et c’est un euphémisme, par ce roman à l’écriture aussi simple que percutante, douce et addictive, une écriture tout en failles et fragilités. Ces brisures, ce deuil du « Nous », je les connais. Et qu’il est bon de les retrouver, de se retrouver ainsi , dans les pages d’un livre aux multiples visages, reflet d’années écoulées, de souvenirs gravés, d’espoirs déçus , de peines enfouies, de bonheurs à venir .
« Avons-nous gagné quelque chose de ce que nous avons perdu ? »
C’est un récit magnifique, sur la sororité, sur l’urgence de savoir dire « je t’aime », sur l’absence, sur la présence, sur le souvenir sur ce reste quand plus rien ne reste, sur ces voix , ces rires qui demeurent comme des caresses. C’est vous l’aurez compris, un énorme coup de cœur pour moi !
deux sœurs dans les années 70, souvenirs de jeunesse, lien fraternel jusqu'à ce que la mort les sépare.
Pas désagréable à lire, un brin nostalgique, mais vite oublié. peut être avais je lu trop de critiques dithyrambiques...j'en attendais sans doute trop
http://www.leslecturesdumouton.com/archives/2017/11/07/35843164.html
Isabelle est née au début des années 70 dans une famille d'intellectuels de gauche de Franche-Comté. Elle a une relation fusionnelle avec sa soeur, cadette de trois ans. Les parents les appellent « les filles », renforçant cette proximité. Nous les suivons enfants et adolescentes dans leurs joies et leurs peines. le récit est tressé avec les événements politiques et sociaux des années 70 et 80 comme les élections de Mitterrand ou les débuts de SOS Racisme avec la controversée campagne Touche pas à mon pote. Nous vivons ou revivons ces événements avec elles, avec la bande-son de l'époque notamment celle de Renaud qui devient le chanteur-fétiche d'Isabelle. L'entrée dans l'âge adulte coïncide avec le début des années 90. Chute de l'URSS, fin du rideau de fer, on fait croire à cette génération que l'Histoire est finie, celle que les baby-boomers avaient faite (et mieux que tout le monde si on les écoute !). Pourtant, c'est le début d'une prise de conscience. Avec la perte de l'enfance, l'insouciance s'envole progressivement. Mais les espoirs demeurent et on construit sa vie comme si de rien n'était jusqu'à…
Deux chapitres intitulés Mort I et Mort II viennent cruellement mettre fin à ces espoirs. Les rêves sont définitivement brisés. Il y a les pertes de deux êtres chers. Comme si le monde le savait, il se met lui aussi au diapason de la douleur et de la violence : 11 septembre, montée du FN, attentats… le monde d'Isabelle a vacillé, le monde tout court a vacillé. Renaud lui-même a vacillé, a sombré mais est encore là, debout, malgré les épreuves. La génération d'Isabelle est encore là aussi, debout. Elle lutte comme elle peut, avec difficulté. Isabelle a trouvé l'écriture pour mettre des mots sur ses maux… mais que peut-on faire pour le monde ?
e suis ressortie profondément bouleversée de ce récit. J'ai beau avoir dix ans de moins qu'Isabelle Monnin, je me suis retrouvée dans son enfance, son adolescence avec sa soeur. Mais surtout, je suis moi-même perdue dans ce monde tumultueux où l'insouciance a disparu depuis longtemps. Comment faisons-nous pour vivre avec ça ?
Je remercie Isabelle Monnin d'avoir su, à travers un récit intimiste, mettre les mots sur ce qu'une génération a vécu, vit et sur ce qu'elle tente de continuer à être…
Après Les Gens dans l'enveloppe, Isabelle Monnin nous propose la chronique d'une génération, celle des gens nés dans les années soixante-dix. Si c'est votre cas, alors, vous allez vivre l'expérience un peu étrange de la petite madeleine de Proust ou du « Je me souviens » de Perec. Ça n'a l'air de rien comme ça, on s'amuse même au début de tous ces petits détails enfouis dans notre mémoire et qui remontent soudain à la surface mais vous verrez, vous n'allez pas ressortir de là indemnes...
Le travail d'Isabelle Monnin s'apparente à un travail de géologue : elle montre les différentes strates constituant un individu et qui sont les marques, les traces des événements intimes ou collectifs que l'on a vécus, à l'origine même de ce que nous sommes devenus. Ainsi, le roman met en évidence la façon dont une génération se constitue.
Alors, cette petite plongée dans le passé qui va peut-être vous amuser au départ va vite (en tout cas, moi, je l'ai vécu comme ça) se transformer en une grosse boule, mélange de nostalgie, d'angoisse du temps qui passe et prise de conscience - et là, c'est peut-être le pire - de ce que sont devenus notre monde et ce qu'on imaginait pour lui. Amer bilan s'il en est !
Née en province dans un milieu enseignant de gauche, la narratrice évoque à la fois ses années d'enfance avec une sœur dont elle est très proche mais aussi les espaces publics (village, collège) et l'espace privé (la maison des parents, celle des grands-parents paternels) qui ont été les siens.
Ces deux espaces se démultiplient en une série de sous-espaces : le supermarché, les HLM, la salle des fêtes, le car scolaire qui mène au collège avec sa propre géographie interne (les places du fond pour les « crâneurs et les filles à la mode » et celles de devant pour les sixièmes), les bancs de la cour, et, pour l'espace privé : chambre, salle à manger/TV d'où surgissent Michel Drucker (qui traversera tout le livre et tout cet espace-temps générationnel, toujours là, quoi qu'il arrive), Des chiffres et des lettres (ça existe encore, non?), Renaud qui deviendra l'idole de la narratrice et de sa sœur (lui aussi est encore debout !) et L'Heure de vérité avec Le Pen.
Et puis, il y a les détails, les objets, ceux que l'on trouve encore quand on traîne dans les braderies et qui nous ramènent à une époque oubliée : Pif Gadget, les sous-pulls en nylon, les 45 tours, le mange-disque (le mien était évidemment orange et comme recouvert de feutrine : c'est ma grand-mère qui me l'avait acheté avenue de la République à Montgeron et le vendeur m'avait offert, je crois, un disque de Patrick Juvet), les walkmans, les sacs US crayonnés de partout, les rochers Suchard (oui, je sais, ça existe encore, mais on n'en mange plus !) les sweats bicolores manches chauve-souris (ne faites pas comme si vous aviez oublié… J'en avais un rouge et jaune...), les correspondantes (dites corres') chez qui on allait sans les connaître (horrible souvenir de Linda ma corres' anglaise, tout ce que je détestais, on ne s'était pas parlé de la semaine malgré les efforts démesurés de sa mère - un séjour linguistique réussi !), les longs voyages sans ceinture (je me souviens de nous trois dans la Peugeot, départ pour le sud à cinq heures du mat, allongés à l'arrière dans tous les sens, on crevait de chaud, sur le toit les valises dépassaient la hauteur réglementaire et les gens, amusés, nous regardaient passer…), un peu plus tard, il y aura le minitel, les TGV orange...
Et les titres de chansons : « Chacun fait c'qui lui plaît », « Let's dance », « Gaby oh Gaby », « Still loving you »… Ça vous rappelle quelque chose ? Bienvenue au club !
En traversant les époques, la narratrice fait resurgir ce qui l'a construite : « je suis tous mes événements », décrit ce monde qui a fait ce qu'elle est devenue, ces événements, ou non événements d'ailleurs, s'amalgamant, s'agrégeant pour former une espèce de tout qui la constitue, la construit, la définit, la détermine aussi.
Nous sommes ainsi chacun une époque, une quantité infinie de micro et de macro événements personnels et collectifs qui nous constituent et nos pensées sont aussi celles de notre époque, elles sont marquées par son empreinte, elles sont, qu'on le veuille ou non, comme échappées d'un moule dont elles garderont la forme à jamais. Cela paraît évident mais c'est toujours un peu étrange de se dire que, finalement, nous ne sommes que le produit d'un monde, d'événements qui nous ont façonnés et définis. Où est la liberté là-dedans ? J'ai bien peur qu'il n'y en ait guère… « Je me demande par quels chemins l'époque, ce bain chronologique dans lequel le hasard m'a fait tremper, a infusé mon intimité, de quelles glaises elle aura modelé mon existence. Les événements paraissent résonner au loin, leurs échos font pourtant trembler nos murs », « Tout est mélangé, contradictoire, entortillé des milliards de molécules qui constituent un individu, baigné des courants de l'époque, d'un terroir, d'une famille, imprégné des événements, leur otage on pourrait dire tant il dépend d'eux longtemps après avoir cru y échapper. Approcher la vérité des êtres c'est explorer les strates géologiques qui les constituent. Il y a des dépôts de sédiments, des plis, des bosses et des creux, des alluvions et des fossiles, les traces de l'eau et des chocs. Les couches profondes sont épaisses et granitiques, elles soutiennent l'édifice.Mais leur épaisseur ne dit rien de leur importance. N'est-ce pas la fine pellicule de terre, là ou ces quelques cailloux polis, ici, qui font la personne ? On lirait dans les hommes comme dans le flanc d'une montagne, si on savait. »
Après l'enfance, la narratrice évoque l'adolescence et l'âge adulte, les gens aimés que l'on perd, les certitudes qui s'étiolent et disparaissent, le monde qui se complexifie de façon effrayante et qui ne nous permet plus de savoir qui l'on est.
Autant le dire, ce livre, qui est l'histoire de mon époque et donc de ce que je suis, m'a évidemment beaucoup touchée, je me suis retrouvée dans ses mots, dans ses interrogations, dans ses peurs.
Je ressors un peu secouée de ce flash-back, de cette plongée dans le passé, de toutes ces images qui sont réapparues alors que je les avais presque oubliées et de cette prise de conscience soudaine que oui, les autres sont passés par les mêmes chemins ou par des routes parfois un peu différentes mais qui, au fond, étaient bordées des mêmes paysages et arrosées de la même eau de pluie.
Je me suis complètement retrouvée dans les interrogations de la narratrice sur le monde actuel : comment nous définir, nous, qui n'appartenons ni à un parti politique, ni à une religion ni à un courant de pensée, nous qui n'avons ni terres, ni biens, juste nos philosophes des Lumières auxquels nous nous accrochons comme à une bouée de sauvetage en tentant de garder tant bien que mal la tête hors de l'eau ?
« - Qu'est-ce qu'on est, nous ? (demande le fils de la narratrice)
- Que veux-tu dire ?
- Ben à l'école il y a des juifs et aussi des chrétiens et des musulmans. Nous, qu'est-ce qu'on est ?
- Euh.
- Qu'est-ce qu'on est ?
- Nous ? On n'est rien. »
Alors voilà, je ne suis rien, nous ne sommes rien, nous allons, nous qui ne croyons qu'à l'esprit de tolérance, au respect des droits de l'homme, à de vagues notions telles que la liberté, l'égalité, nous qui refusons le racisme, la violence, la tyrannie, nous ne sommes rien, avec nos petites valeurs de rien du tout…
Eh bien tant pis, nous irons comme ça, jusqu'au bout, sur le chemin de notre vie, avec nos petites idées. Dans quelques générations, on dira que nous étions fous ou presque.
Pas grave, on ne sera plus là pour se faire insulter…
Lire au lit : http://lireaulit.blogspot.fr/
https://leslivresdejoelle.blogspot.fr/2017/09/mistral-perdu-ou-les-evenements.html
Isabelle Monnin nous livre ici un récit intime autobiographique sur sa relation avec sa sœur qui est décédée à l’âge de 26 ans.
C’est l’histoire de deux sœurs issues d’un milieu moyen, de gauche et athée. La narratrice est timide, incapable de s'intégrer dans un groupe et vit sa précocité comme un étau. Elle admire l'audace de sa sœur avec qui elle vit dans une bulle dans une relation fusionnelle.
Après leur enfance et leur adolescence en province, c’est la montée à Paris avec le désir de devenir journaliste, les premières manifs, la chute du mur de Berlin et une conscience politique personnelle qui se forme "Plus nous comprendrons le monde, moins nous saurons quoi en penser". Baignées dès leur enfance dans une conscience politique de gauche, elles appartiennent à une génération qui a reçu en héritage une liberté grâce aux combats de leurs parents. Le récit balaye des années de politique, de culture...
Le souvenir de la première apparition de Renaud à la télé, du premier achat d'un de ses 33 tours Renaud la suivent à toutes les étapes de sa vie et accompagnent ses fantômes
Le texte est centré sur elles deux, les deux soeurs, les parents, leur jeune frère et le reste de la famille restent complètement à la périphérie du récit. Mais les " Nous sommes deux" ou "Nous sommes les filles" vont devenir "Je suis deux" après la disparition brutale de la jeune sœur de la narratrice.
Pour moi les passages les meilleurs de ce récit sont ceux qui relatent ses sentiments et ses réactions après la mort brutale de sa sœur à 26 ans et de son dernier né après 6 jours de vie. Les mots sont beaux et justes mais pour le reste du récit j’ai trouvé que l’écriture trop travaillée manquait de naturel. Une écriture très littéraire qui visiblement ne me correspond pas car, moi qui aime relever les belles formulations, je n’ai rien eu envie de noter dans ce récit qui visiblement n’était pas fait pour moi. C'est une déception car j’avais beaucoup aimé le si original "Les gens dans l'enveloppe".
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