Un style à couper le souffle ! Car du style, il en a : de la broderie de soleil et de sang qui s'étire sur une gaze irréelle... Et puis, quelle promesse ! À travers cette orfèvrerie arrachée aux carcasses de tôles fracassées... Celui qui en est revenu... Celui qui a... « Vu quelquefois ce que l'homme a cru voir »... Il avait l'âge du jeune Rimbaud, quand son bateau a chaviré... Il a été rejeté au monde IVRE DE VIE. Françoise et Thierry Maclet Tehel est l'exemple rare du voyageur sans bagage passé de l'autre côté du miroir... et qui est revenu. C'est un revenant ! Le choc accidentel dont il a été victime ne le tua point. Mais une partie de lui était morte : gommés des pans de sa mémoire. Effacés les souvenirs. Pas tous les souvenirs. Son amnésie est sélective : le passé lointain reste présent. La minute d'avant est oubliée. Tehel souffre du syndrome de Korsakoff, du nom de celui qui a décrit ce trouble neurologique. Sa recherche du temps passé lui a dicté ce livre. Sans son talent d'écriture, à la fois nourrie d'envolées poétiques et de résurgences d'études classiques brillantes, ce ne serait qu'un banal témoignage sur l'amnésie. Or, les pages qu'il nous livre sont poignantes de beauté. Beauté du langage et du style. Beauté des images. Beauté de l'âme d'un écrivain hors du commun. Tehel, disciple d'Épicure, ne gémit pas, ne se lamente pas. Il conjugue ironie et autodérision. Émotion et drôlerie alternent. « Le plus important, nous confie-t-il, c'est de se faire aimer ». Dans cette optique, il a réussi : le livre refermé, on ne peut qu'en aimer l'auteur. Un grand auteur, désormais reconnu comme tel. Alain GRANDREMY Ancien journaliste au Canard Enchaîné
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