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UN ROMAN AMBITIEUX ET SAISISSANT SUR LE DESTIN DE LA GRÈCE CONTEMPORAINE.
Deux femmes à la retraite, une prof de lettres avec des dons de prophétesse et une prof d'arts plastiques abandonnée par son mari et remplie d'amour pour son fils Oreste, cohabitent dans un « foyer », résidence sociale située dans un quartier défavorisé du centre d'Athènes.
Elles ont pris la décision de vivre ensemble en plein coeur de la capitale et ont décidé de profiter pleinement de leur nouvelle vie, sous un nouveau prénom : Tirésia, en référence au devin antique ayant averti oedipe des maux qui le menaçaient, et Nymphe, par allusion aux divinités des ondes et des forêts dans la mythologie grecque.
Mais le changement de vie des deux vieilles dames ne se réduit pas à cette métamorphose identitaire. Apprenant que le gouvernement grec s'apprête à fermer les foyers sociaux du pays ? mesure qui risque de les conduire de nouveau à l'asile ?, Tirésia et Nymphe décident de participer elles aussi à la grande manifestation organisée à Athènes contre le deuxième mémorandum imposé par la « Troïka », le 12 février 2012.
Elles projettent ainsi d'échapper à la vigilance de leur entourage : Danaé, une assistante sociale qui vient souvent leur rendre visite en compagnie de sa fille, Sonia ; Catherine, leur femme à tout faire originaire d'un petit village de Crète, qui est folle d'inquiétude pour l'avenir de son fils, Takis ; Yasmine, une femme de ménage égyptienne, souvent accompagnée de son petit garçon, Ismaël ; le « patriarche », un médecin à la retraite, de mèche avec un politicien véreux qui n'est autre que l'ex-mari de Nymphe.
Contre toute attente, les deux vieilles dames réussissent à prendre le large. Commence alors pour elles une extraordinaire odyssée dans une Athènes en pleine guerre où elles retrouvent opposés, dans un face-à-face vertigineux, Takis, le fils de Catherine, qui a rejoint les rangs des néo-nazis de l'Aube dorée, et l'anarchiste Oreste, qui proteste contre les mesures mises en oeuvre par les créanciers de la « Troïka » présidant désormais à la destinée du pays.
Au terme d'un voyage initiatique pendant lequel, après avoir perdu leur chemin, les deux vieilles dames auront été réduites à l'état de mendiantes et de sans-abris, Tirésia et Nymphe retrouveront leurs pénates et apprendront qu'« il n'y a pas d'autre antidote à la peur que l'amour ».
Ouvrir ce livre, c’est fouler la terre grecque, et ses hôtes grands porteurs de l’Histoire, ses diktats et ses controverses mais pas que. Traduit avec une qualité certaine par Loïc Marcou ce roman est une conscience qui lève les yeux au ciel. L’auteur Rhéa Galanaki de grande renommée dans son pays et ailleurs nous prouve par ce huitième livre « L’Ultime humiliation » la confirmation de son grand art. Cette dernière écrit avec une encre empreinte de son île : La Crète dont elle est originaire. Fine connaisseuse de la Grèce, et grande amoureuse ce pays elle dévoile l’ambiance et le rythme et le lecteur est en quasi dépaysement.
Le style est vif, travaillé avec force et maturité. Le changement des narrateurs, la valse des je et des tu renforce la beauté de la trame en chef d’œuvre.
« Tes yeux ont embrasé la même icône, main qui touche une autre main pour se consoler. »
On marche entre ciel et terre, la tragédie écarte les rideaux du calme et se fraye un passage sur la rive des douleurs.
On rentre dans l’histoire dans un réalisme fou qui fait tourner la tête. A pas vifs, dans une rencontre avec les personnages que l’on a envie d’étreindre et d’aimer.
L’histoire se passe en 2012 au moment de la grande révolution, dans cette empreinte qui fait la Grèce et ses habitudes de vie dans cette période troublée et bien plus encore.
Deux vieilles dames Tirésia et Nymphe, qui ont volontairement changé de nom, superbement intelligentes malgré leurs faiblesses mentales dûes à l’âge sont protégés par Baltazar, patriarche et médecin au grand cœur. Autour d’elles gravitent d’autres protagonistes Takis qui a rejoint le mouvement d’Aube Dorée et Oreste celui des Révolutionnaires. Athènes est foudroyée, piétinée, la manifestation éclate les cœurs en mille morceaux.
« Tu tressailles. Takis, le fils de Catherine était vêtu de noir. Dans la minute qui suivit tu fus contrainte de détourner le regard, mais pas de baisser les yeux. »
Ce roman est un pan de vie, bouleversant et sanglant mais si riche d’humanité. On lit comme une intrusion dans ce huit clos qui sonne l’alarme.
« Oreste ? parvint à dire Nymphe. Tu eus le temps de voir l’inconnu vous tourner le dos et revenir en courant pour participer au combat qui battait son plein. »
On est abasourdi par la force langagière de l’auteur. On voudrait épeler lettre après lettre cette histoire tout juste romancée pour retenir les mains de ces grandes dames, de ces fils de tous les habitants avec la force du Verbe qui prend naissance comme un nœud dans la gorge du lecteur.
Humaniste, fragile, authentique, initiatique, ce roman est une belle leçon de courage, de persévérance. Sa fragilité intérieure est le sentiment du devoir dans toute sa splendeur.
Ce livre est un cri de fraternité à ciel ouvert. L’histoire prend vie, électron palpitant en armure face à la douleur. Le lien fort du Vivre-Ensemble est ce liant qui abat les cartes des injustices et des vaines batailles. Publié par les Editions Galaade qui sont incontestablement dans la plus haute cour des Grands. C’est un livre majeur. On marche à pas feutrés dans ce kaléidoscope où les lumières forcent le passage vers l’altuisme et l’attention actée pour le prochain.
Cette révolution de 2012 est au cœur de L’Ultime humiliation, une fleur qui pousse sur du goudron. Ce livre est un paravent contre le vent, un hymne alloué à La Grèce, à la gloire de la justice. Un chef d’œuvre contemporain.
Rhéa Galanaki est un écrivain de renom, une belle personne.
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