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Il faut partir de cette vérité que ce n'est pas le corps humain qui intercepte la lumière mais la lumière qui l'intercepte : le capte à son encontre. Une clarté venue des bords de la terre, non pas la lumière immédiate du jour, en détermine la pondération. Le corps se donne par ce jour captateur venu de l'horizon, qui exerce pour façonner les contours charnels un démenti originel. Car le corps humain doit sauvegarder sa cohésion face à ce qui cependant la constitue. Dans tels dessins de Michel-Ange, le corps n'apparaît pas dans la lumière, mais celle-ci délimite son élan arrêté, matérialisant sa défaite annoncée. Ils sont la scène originelle dont se souviendra la peinture de Lucian Freud. La lumière n'est pas ici le médium d'un corps chuchoté dans la granulosité éparse des dessins de Seurat, ou bien ces corps de Bonnard où la chair de la nudité est faite d'écharpes soyeuses et humides, colorées, qui viennent s'appliquer sur nos paupières comme le baume de nos jours. Mais sous le coup de cette captation de la lumière qui semble rendre un verdict, l'intimité des nus de Lucian Freud s'oriente vers le radical extérieur, bien qu'ici même dans une singularité si pénétrante. Face au nu portraituré par Lucian Freud, le regard éprouve la condition du corps humain exposé. De la pièce où tel corps est assis, ou étendu sur un lit, le contemplateur s'élève en pensée vers les nuages, en imagine la fuite aveuglante et obtuse sur la ligne d'horizon, leur présence au-delà de l'espace clos du tableau.
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