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L'inspecteur Dalil, fin limier de la police marocaine à la retraite - toujours accompagné de son inséparable Petite voix -, est fermement invité par les services de sûreté à se rendre à Paris pour mener une enquête en collaboration - un peu forcée - avec le commissaire Maugin, boss du 36 quai des Orfèvres. Bader Farisse, un étudiant marocain qui préparait une thèse sur le transhumanisme, a été enlevé devant la mosquée de la rue Myrha. Il venait de mettre au point une micropuce qui, une fois reliée au cerveau humain, permettrait, non seulement, de se connecter directement à Internet mais aussi de multiplier à l'infini les facultés du greffé... Une invention diabolique qui semble intéresser beaucoup de monde... services secrets et groupes terroristes compris ! Dalil et Maugin - deux hommes et deux cultures policières que tout oppose - vont alors tout tenter pour désamorcer cette bombe à la puissance inédite !
Qui diantre vient déranger l’inspecteur Dalil « déchu de son titre par le temps », alors qu’il s’adonne à son passe-temps, la pêche. Mais bon, l’ex inspecteur a reconnu de loin l’importun qui marche difficilement sur le sable. Il est « invité » à se rendre auprès de son ex-chef pour une mission qu’il ne peut refuser : rechercher un étudiant marocain kidnappé, en France.
Malgré son horreur et sa peur, le voici dans un avion direction Paris « Dalil avait les machines volantes en horreur » où il doit rencontrer l’inspecteur Machin, non, enfin, euh.. Voilà, l’inspecteur Maugin, au 36.
Le courant ne passe pas trop entre les deux hommes, normal me direz-vous, la concurrence, la peur d’être battu en brèche par l’autre… Bref tous les clichés des polices ! En plus, Dalil n’est pas seul, il est accompagné de sa « petite voix » intérieure, oui, sa conscience qui lui parle et à laquelle il répond, se faisant passer pour un original.
Dalil a sa ligne de conduite, sa vision du monde et, ici, de Paris, du métro qu’il déteste… Il n’est pas un cloporte. Il aime enquêter seul, suit ses intuitions, très observateur, il ne flingue pas à tout va, non, il réfléchit beaucoup et synthétise dans un coin de son cerveau ses observations et réflexions.
Parlons un peu de l’enquête. Le jeune étudiant marocain enlevé, Bader Farisse, prépare une thèse sur le transhumanisme, l’homme amélioré capable de se connecter directement que ce soit dans le cerveau de son vis-à-vis ou sur Internet sans passer par la cas ordinateur. Avouez que c’est tentant pour qui met a main sur une telle prouesse ! Les plus rapides ont dégainé,l’étudiant kidnappé et cela pourrait venir des islamistes.
La joute entre les deux inspecteurs est amusante. Maugin est, du début, quelque peu condescendant avec ce collègue marocain et Dalil adore jouer avec Maugin au jeu du chat et la souris.
Dalil, par l’intermédiaire de Soufiane Chakkouche, à moins que ce ne soit le contraire, distille ses idées, sa façon de voir les choses, toujours avec la dérision qui s’impose, sans oublier la profondeur qui sied. J’ai aimé qu’il joue sur le jargon policier, qu’il donne à Dalil cette vision parisienne naïve et un peu dépassée «Comment la Ville a pu bannir les cabines à sous, jadis si chères aux gangsters, après plus d’un siècle de bons et loyaux services ? » pense t-il en parlant des cabines téléphoniques.
Un polar comme je les aime qui prend son temps, qui ne défouraille pas dès la seconde page. Un inspecteur vieillissant, bougon, intelligent, solitaire, à qui on ne la fait pas. Oui, cela donne dans le cliché policier que Soufiane Chakkouche utilise pour mieux le dépasser. Et puis, cette façon d’aborder, l’air de rien, des sujets graves et sérieux !
Un polar comme je les aime. Court, avec des héros rugueux, pas forcément sympathiques, ni antipathiques. Ils ont des humeurs, des emportements, des avis tranchés et restent avant tout des professionnels de la traque des malfrats. Dalil a ce petit plus d'avoir sa Petite Voix qui lui parle et à laquelle il répond. Un peu désabusé, un peu à côté, un peu vieux, un peu has-been, c'est l'image qu'il donne aux autres, qui devraient se méfier, car la nonchalance de Dalil cache une grande réflexion, une capacité de déduction et une intelligence de haut vol.
Soufiane Chakkouche a la bonne idée d'enjoliver son texte, déjà fort plaisant, décalé, de réflexions drôles, de remarques qui jouent sur les mots, les expressions, Dalil parle certes bien le français mais pas parfaitement l'argot ni même le jargon des flics parisiens. Et dès le début, dès que je lis le portrait suivant de Dalil, je sais que la suite sera à mon goût :
"A vrai écrire, Dalil était à l'adolescence de la vieillesse ; il entrait dans sa soixante et unième année, mais il en faisait 51, et il s'en foutait éperdument. "Comment peut-on ressembler à un chiffre ?" avait-il l'habitude de répondre à ceux qui le saupoudraient d'un tel compliment. Cette illusion physiologique était principalement due à deux attraits de son physique : sa ligne et ses cheveux." (p.8)
Et la suite ne m'a pas déçu, bien au contraire. J'ai pu visiter Paris avec les yeux de Dalil, qui fait un peu comme quand moi j'y vais avec mes yeux de Provincial : une certaine innocence et un émerveillement évident en même temps qu'un agacement de la pollution et du bruit. Voilà un roman qui met le terrorisme en fond sans pour autant être plombant, angoissant. Une belle enquête d'un flic atypique à qui on ne la fait pas. Un héros qui gagnera à être rencontré de nouveau et qui, très franchement, sans jamais faire qu'on veuille le revoir -il cultive sa liberté, sa solitude et une certaine agoraphobie-, donne au lecteur très envie de le revoir.
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