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La mort est un prisme sous lequel se dévoile la construction de l'État tout en révélant les lacunes et les fragilités de l'État face au mystère de la condition humaine. Oscillant entre une conception de la mort perçue comme un néant et des projections individuelles et collectives conférant, malgré tout, une valeur à la personne et à la vie humaine avant et par-delà le décès, l'État tout en s'émancipant de la religion ne s'est pas déparé complètement de toute dimension « sacrée ». L'État, en répondant aux demandes sociales de respect de l'humanité et de transcendance, doit ainsi se confronter aux projections individuelles et collectives face à la mort. Ainsi se révèle l'expression de la souveraineté de l'État dans un domaine qui, relevant de l'intime et du sacré, semblait pourtant devoir lui échapper. Si l'on a assisté en l'espace de moins d'un siècle à un basculement d'un devoir de ne pas tuer à une obligation de protéger la vie à laquelle la norme juridique fait très largement écho, la nouvelle maîtrise de la vie humaine permise par les avancées scientifiques et médicales transforme l'expression souveraine de l'État. Renonçant progressivement à sa puissance publique comme pouvoir de mort, l'État se voit reconnaître un pouvoir de protection de la vie, et c'est désormais sur la condition biologique des individus elle-même que l'État étend ses ramifications.
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