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À Paris, Houmam, Warda et Souleymane, trentenaires, partagent le même appartement depuis leurs années d'études. Les deux garçons gravitent autour de Warda, tempétueuse journaliste au sex-appeal ravageur. Alors que le pacifique Souleymane couche avec elle dès qu'elle l'y invite, Houmam, empêtré dans son désir d'écriture et une appartenance arabe embarrassante, se meurt d'amour pour la jeune femme, sans jamais oser l'avouer. Un reportage de Warda en Irak va briser l'équilibre du trio.
Sexe, identité et rock'n'roll, un cocktail détonnant pour ce roman où se percutent de Grandes Questions d'aujourd'hui, société patriarcale, droit des animaux, soif de vérité, qui suis-je, d'où viens-je, où vais-je... Difficile de passer à l'âge adulte.
« Le caprice de vivre » pourrait être une pièce de théâtre mélodramatique et contemporaine. Tant ce récit dans la complexité des émotions, de bruit et de fureur, de claquements de porte, de passions amoureuses, de ce désir violent est irrépressible et magistral.
Magnétique, sensuel, dans cette éclosion de trois trentenaires, deux hommes et une femme, « Le caprice de vivre » est un triptyque de prodigalité.
Vibrant, le cri de la vie, la quête d’un existentialisme qui se tisse au fil des pages.
Ici, nous sommes dans une scène de rage, politique et sociologique.
L’écriture de Jadd Hilal est signifiante, posée au plus juste, avec une maturité majeure pour la compréhension de notre monde. Des diktats migratoires, l’identité comme gouvernail. L’écriture tisse une trame qui nous revient à la figure comme un boomerang. Il sait. N’impose rien. Parle en son nom et aux peuples qui bordent ses lèvres.
C’est un livre intuitif, qui dévore les a priori. On pénètre la scène de ce trio qui vit ensemble dans un appartement à Paris depuis quinze ans. Jusqu’au jour où les chaises vont voler en éclat. Où les luttes et les évènements, les changements de cap seront le baisser de rideau.
Houmam est le narrateur, écrivain, dont ses romans « Hors-Sol » et « Jamais la nuit » eut un succès pour le moins discret. » On ressent le double cornélien de Jadd Hilal. Houmam est palestinien, bouleversé par son arabité. S’émanciper de cet étau, atteindre la rive de l’universalité. Lui, brillant, vif, intelligent, qui rassemble les fils et tisse en homme qui cherche l’air, le tracé de son advenir. Nous sommes dans une géopolitique visible à l’œil nu. Dans le grondement d’un migrant qui veut donner la preuve de ce qui est juste et vrai. Son appartenance à lui-même et au rythme d’un pas européen. On aime ses rages, ses larmes aux yeux, son amour viscéral pour Warda, « Rose des sables ». Ses silences et ses frustrations et la narration formidablement dressée comme une toile de maître, mature et profonde.
« Pourquoi Phoriche venait-il de me refuser mon dernier manuscrit en alléguant qu’il n’était pas assez dramatique et « donc » arabe ? »
« Vous écrivez : Ce n’est pas que les pays n’existent pas, c’est que les œuvres nous les font parfois oublier. Ces œuvres, il faut les attraper au vol. »
Warda est un feu follet. Ravageuse, entière et engagée, dans une aura sublimée. Elle est grand reporter. Elle travaille pour le journal Le Monde. « Ses reportages sur l’EI lui avaient valu en 2016 le prix Albert-Londres pour la presse écrite. »
Elle déambule dans l’appartement en petite culotte. La pudeur oubliée, libre et désirable.
Elle vit une relation physique avec Souleymane. L’exutoire de ses reportages risqués. Elle évacue un trop plein d’adrénaline en gestuelles assumées.
Souleymane est lisse et flegmatique. Il est ami avec Houmam depuis toujours. Il passe ses journées sur le canapé devant son ordinateur. Il enquête sur les chameaux de course et les violences infligées à ces derniers. Warda, elle revient d’Irak. Elle est troublée par ce qu’elle a découvert. Son grand-père aurait fauté.
« Que, quoi, Houmam Basara ? Comment dois-je te le dire, que c’est moi qui décide ? Que ce n’est pas ton problème ? Que rendre justice à ces Juifs, attester la vérité envers et contre tout, c’est ce que je veux faire et c’est ce que je ferai ? -Mais… -Je n’attends pas de toi que tu me comprennes. »
Houmam et Warda vont être le symbole des diktats, des influences des origines. La séparation mentale et les déchirures des incompréhensions. Il devine le délitement de ce triangle entre les sentiments inavoués et les blessures incommensurables.
Comme s’ils étaient la cartographie des généalogies. Les identités floutées par les religions, par les disparités. Mais ils sont le libre-arbitre et la citadelle de leurs convictions.
« Il sait que la violence voyage, sur le dos des générations. » « Le chemin que nous n’emprunterions pas ensemble mais dont la terre, le sol, était identique. » « Je sais les conséquences qu’aurait ta révélation sur ce qu’on imagine de nous, de nous les Arabes, alors je me tais là-dessus. » « Rien ne m’est plus « étranger » que le sentiment de venir d’un lieu. »
« Le caprice de vivre » est un feu qui brusque l’entendu. Un livre de renaissance et une fresque de batailles et d’espérances. Ici, tout sonne vrai. Les tragédies pour atteindre la liberté de conscience. Les êtres écorchés vifs par les doutes et les peurs. La volonté d’atteindre les résiliences comme un pardon à soi-même. Les croisements des destinées : « Survivre ou faire survivre ? »
Le macrocosme qui brise les faux-semblants. Un livre brûlant et brillant. Comme la vie.
Publié par les majeures Éditions Elyzad.
Un trio d’amour et d’amitié
Dans son nouveau roman, Jadd Hilal rassemble un ostéopathe, une journaliste et un écrivain qui peine à publier dans un appartement parisien. Ces colocataires vont tenter de se trouver un avenir entre recherche identitaire, amours contrariées et histoire familiale troublée. Une quête intranquille.
Warda, Souleymane et Houmam, le narrateur, vivent en colocation dans un appartement parisien. Souleymane est ostéopathe, mais il s'intéresse de très près à la cause animale. Au moment où s'ouvre le récit, il effectue des recherches sur les mauvais traitements causés aux chameaux, notamment ceux qui sont entraînés pour les courses dans les pays arabes. Warda, quant à elle, est grand reporter. Elle revient d'Irak où elle a effectué une série de reportages, notamment pour Le Monde. Finalement, le moins bien loti est Houmam. Après avoir publié un premier roman qui ne s'est guère vendu, il a vu son éditrice refuser tous ses manuscrits. Et si la dure réalité, à savoir la quasi-impossibilité de vivre de sa plume pour l'écrasante majorité des écrivains en France, il ne se voit pas faire autre chose. Alors, il écrit leur histoire, celle du «trio d'amour et d'amitié» qui pourtant ne va pas fort, Warda ayant choisi de congédier Houmam qui se refuse à elle. Voilà sa «rose des sables qu'il aime à en crever la bouche ouverte» prendre de la distance.
Le malaise qui s'installe tient aussi à l'histoire familiale, à ce sentiment de culpabilité qui habite Houmam qui a choisi de ne pas suivre les siens en Palestine. Alors chaque fois qu'on s'en prend aux arabes, il se révolte, s'imagine que ce sujet est tabou car il ne fait que renforcer les préjugés, souligner leur sauvagerie.
Une position qui va très vite l'opposer à ses colocataires et en particulier à sa rose des sables partie en quête de vérité sur le rôle joué par un ancêtre au passé trouble.
Jadd Hilal raconte avec beaucoup de justesse cette relation d'amour-haine, faite d’élans amoureux suivie de rejets tout aussi intenses. Cette version actuelle de Jules et Jim, d’une femme entre deux hommes, montre aussi combien il est difficile d’aimer tant que l’on n’a pas résolu sa propre quête d’identité. Un mal-être que le sexe et l’humour ne peuvent que dissimuler quelques instants.
Si la femme libre qu’est Warda nous rapproche des personnages de Des ailes au loin, le premier roman de l’auteur, on retrouve aussi dans les questions existentielles de Houmam les problématiques de l’exil qui sont aussi au centre de son second roman Une baignoire dans le désert où on voit le jeune Adel fuir dans le désert suite au divorce de ses parents. Avec moins de candeur, Houmam pourrait être un Adel qui a pris de la bouteille.
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