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Depuis son apparition en 1829 dans un retentissant pamphlet de Henri de Latouche, la notion de «camaraderie littéraire» est devenue inséparable de l'histoire sociale du romantisme français. Les cénacles romantiques ont été soupçonnés l'un après l'autre d'élaborer collectivement des stratégies de solidarité pour fabriquer des gloires factices. La querelle de la camaraderie, loin d'être circonscrite aux préparatifs de la bataille d'Hernani, a agité toute l'époque romantique puis a été fréquemment relancée jusqu'à nos jours. Cet essai en expose les enjeux et en reconstitue les principales étapes.
Pourquoi le phénomène de la camaraderie a-t-il suscité une telle effervescence critique et mobilisé, pour en défendre ou en fustiger les principes et les effets, les plumes de Stendhal, de Balzac, de Hugo, d'Eugène Scribe ou de Sainte-Beuve ? Afin de répondre à cette question, Anthony Glinoer a intégré à son analyse de fond un grand nombre de pamphlets, préfaces, satires et romans qui en nourrissent le débat. Ces textes témoignent de l'intensité et de la diversité de la controverse entourant l'avènement du mouvement romantique. Ils font également valoir, sur le plan des discours, que le «sacre de l'écrivain» a coïncidé avec une collectivisation accrue de la vie littéraire : s'il se représente volontiers seul face à la foule, l'écrivain dépend désormais étroitement, dans sa quête de reconnaissance, de ses pairs réunis en cénacles, en académies ou en réseaux. La querelle de la camaraderie accompagne ainsi l'émergence du romantisme tout en interrogeant la structuration même du champ littéraire au XIXe siècle.
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