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Il y en a trois, des mains. La première est la plus belle, elle a entrelacé ses doigts aux miens, chaude, forte. Une main à la Michel-Ange, aux ongles bien dessinés. C'est une histoire uniquement de gestes où les paroles privées de sens sombrent dans le néant. Et le désir reste impossible à combler, enfantin et adulte à la fois comme s'ils appartenaient, ces gestes, à une petite fille mais aussi à son contraire. Une petite fille solitaire et qui a faim de gratifications, et une adulte ingénieuse, experte. Même les odeurs sont des vagues qui vont et viennent et portent en elles tendresse et ténèbres, les narines les suivent comme si elles marquaient une piste pour s'orienter dans cette forêt de silences. L'amour est au centre de ce récit. Paris, Rome, Venise, les années se superposent, mais le regard de la petite fille est le même que celui de la femme qu'elle est devenue. Si aiguisé, si précis, si intuitif, si vrai. Pour la première fois, Rosetta Loy, figure majeure de la littérature italienne contemporaine, publie en France un texte inédit dans sa langue maternelle. Elle peut enfin dire, en toute liberté, toutes les choses enfouies et les restituer dans l'éclat où elles lui sont apparues. Avec violence et nécessité, sans jamais tricher. Rosetta Loy signe ici un grand livre en tressant sa vie intime avec celle de l'Italie.
Alors qu 'elle est une figure majeure de la littérature italienne, c'est d'abord en France que l'auteur a publié ce texte qui a y réfléchir passe pour avoir été écrit sur commande. Car s'est bien en italien que ce roman autobiographique où elle dresse le portrait de l'Italie de la seconde guerre mondiale des des années du fascisme, a été écrit.
La grand-mère comblée qu'elle est aujourd'hui redevient la petite fille éperdue qu'elle fut dans les années 1930 et 40, dernière née d'une famille corsetée de la haute bourgeoisie romaine. On est à Rome, mais aussi à Ostia, puis on part en Suisse, dans le Val d'Aoste pour fuir les bombardement. On entre alors dans l'intimité de cette famille où les personnages principaux deviennent la gouvernante Gina ou le cocher Francesco qui s'occupent de la petite fille davantage que ses propres parents et qui ont marqué son enfance et ont continué à grandir dans sa mémoire bien après leur disparition.
Et elle parle de ces mains qui l'ont touchée, marquée. « Il y en a trois » dit-elle.
La main de l'amour mais peut-être aussi la main qui dit, celle dont il suffit de lire les lignes pour tout connaître de l'être et de son avenir. Et de son passé aussi...
La narration allant de l'un à l'autre, du passé au présent grâce au récit entrecoupé de passages en italique évoquant des souvenirs plus récents de sa vie de femme, d'amoureuse et de photographies évoquant un film amateur noir et blanc en super 8.
Quoi qu'il en soit c'est dans la description de la guerre que la romancière est la plus présente, car le calme avant la tempête est comme figé dans ces images nostalgiques qui illustrent le récit.
La nostalgie en effet coud les passages entre eux d'un bout à l'autre du roman. Mais pas de cette nostalgie larmoyante, bien au contraire. Plutôt de celle qui garde toujours un regard détaché, plein d'ironie.
Attention tout de même l'enfance de l'auteur n'a guère été traumatique plutôt petite cuillère en argent dans la bouche et le livre a été recommandé par l'express, Madame figaro … le Monde aussi quand même.
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