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" Tout système religieux fondé sur un dieu si jaloux de ses droits qu'il s'offense des actions et des pensées des hommes, un dieu vindicatif qui veut qu'on défende sa cause, une telle religion, dis-je, doit rendre ses sectateurs inquiets, turbulents, inhumains, méchants par principes et implacables par devoir.
Elle doit porter le trouble sur la Terre, toujours remplie de spéculateurs dont les idées sur la divinité ne s'accorderont jamais, elle doit appeler les peuples au combat toutes les fois qu'on leur dira que l'intérêt du Ciel l'exige. Mais Dieu ne parle jamais aux mortels que par des interprètes, et ceux-ci ne le font parler que suivant leurs propres intérêts ; et ces intérêts sont toujours très opposés à ceux de la société.
Le vulgaire imbécile ne distinguera jamais son prêtre de son dieu. Dupe de sa confiance aveugle, il n'examinera point ses ordres, il marchera tête baissée contre ses ennemis, et sans s'informer jamais du sujet de la querelle (qu'il serait d'ailleurs incapable d'entendre), il égorgera sans scrupule ou s'exposera à mourir pour la défense d'une cause dont il n'est point instruit. Sa fureur se proportionnera néanmoins, à la grandeur du dieu qu'il croit intéressé dans la querelle.
Et comme il sait que ce dieu est tout-puissant et que tout lui est permis, il ne mettra point de bornes à sa propre haine, à sa férocité : il les regardera comme des effets légitimes du zèle que son dieu doit exciter dans ses adorateurs. Voilà pourquoi les guerres de religion sont les plus cruelles de toutes. En un mot, toute âme en qui le fanatisme religieux n'a point éteint les sentiments de l'humanité, est brûlée d'indignation et déchirée de pitié à la vue des barbaries, des perfidies et des tourments recherchés que la fureur religieuse a fait inventer aux hommes.
Ce fut communément au nom de Dieu et pour venger sa gloire que les plus grands forfaits se sont commis sur la Terre. Si je parcours la Terre en demandant à chacun de ses habitants ce qu'il pense de la bonté, de la justice, de la douceur, de la sociabilité, de l'humanité, de la bonne foi, de la sincérité, de la fidélité de ses engagements, de la reconnaissance, de la pitié filiale, etc, sa réponse ne sera point équivoque : chacun approuvera ces qualités, il les jugera nécessaires, il en parlera avec éloge.
Mais si je lui demande, ce qu'enseignent les prêtres, ce que disent les lois et ses souverains, ce que ses usages demandent de lui : jamais nous ne pourrons nous entendre, jamais nous ne tomberons d'accord sur rien. " D'Holbach (1723-1789) (La contagion sacrée).
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