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Nina rejoint Hazebrouck, ville du Nord, où un notaire doit lui lire le testament de son père Teddy. Pianiste de jazz réputé, souvent éloigné d'elle, il l'a élevée seul. Et il a choisi de mourir seul, loin de Bordeaux où réside sa fille.
Le testament libère en Nina une troublante kyrielle de souvenirs. L'étude du notaire devient alors lieu de confidences. Lorsque se termine la lecture, l'aventure ne fait en réalité que commencer et va l'emmener loin, là où sont enfouis les mensonges et les ressorts secrets de sa vie.
De révélations en surprises, cette confession bouleverse tout, passé et présent. Va-t-elle changer la couleur de l'avenir ?
Kyrielle Blues, histoire rebondissante, est peut-être la mélodie d'un bonheur qui arrive lentement, de l'amour qui attend son heure pour dire son nom.
Véronique Biefnot et Francis Dannemark s'unissent une nouvelle fois pour écrire un roman. Pour leur dernier, La route des coquelicots, j'avais émis quelques réserves, cette fois-ci je serai plus positif. Les deux auteurs savent construire de belles histoires avec des bons sentiments sans qu'elles soient gnangnan -j'hésitais à user de ce mot qui me semblait très connoté et je suis rassuré, même JK Huysmans l'a utilisé (dans Marthe, histoire d'une fille), ouf l'honneur est sauf (merci wiktionnaire).
Ils mettent en scène deux personnages seuls et inhibés qui inconsciemment rêvent d'une autre vie, ce sera pour eux une transformation que de se confronter à la réalité, aux secrets de famille bien enfouis, à un monde totalement différent du leur. On présente rarement dans les romans des notaires férus et dingues de jazz, d'autant plus qu'Antoine s'est docilement et doucement coulé dans les traces de son père, notaire lui-aussi. Disons que c'est une profession qui ne fait pas rêver. Amateur mais non connaisseur de jazz j'avoue avoir envie d'écouter tous les titres évoqués par le duo d'auteurs (il faut que je trouve la play-list du roman), ils rythment le livre, c'est comme du jazz, donc, pas survolté mais drôlement bien, un truc qui se lit -ou s'écoute- en cherchant la surprise ou tout simplement en se laissant porter... C'est ce que j'ai fait et je ne m'en plains pas, l'intrigue n'est pas hyper originale, on peut même deviner les liens qui se dessinent entre tous les personnages -mais on est ravi de les voir se lier ainsi, différemment on serait déçu-, mais ils sont tellement sympathiques et le tout baigne dans une ambiance tellement belle et saine qu'il est difficile de faire la fine bouche. Un peu de poésie : "Kyrielle... Mon père adorait ce mot. Un jour, mon fils lui a demandé ce que ça signifiait. Il lui a raconté que c'était le prénom d'une jeune elfe très jolie qui vivait au fond du jardin, dans le tronc creux d'un vieil arbre, et dont il était amoureux quand il avait son âge..." (p.61/62), de la tendresse pour tous les protagonistes qui la méritent sûrement, de la bonne musique,... Le tout est très joliment mis en valeur par les illustrations de Véronique Biefnot, noires et bleues, de différents bleus profonds, très belles, elles apportent indéniablement un plus à l'ouvrage.
L'été est là, et vous n'avez pas envie de vous plomber avec un bouquin lourd, n'hésitez pas, Kyrielle blues est là...
C’est un voyage qu’elle ne veut pas faire mais elle n’a pas le choix. D’ailleurs ce trajet de neuf cents kilomètres, elle le fait en voiture, comme pour se laisser une chance de faire machine arrière. Pour la deuxième fois en peu de temps, Nina doit se rendre de Bordeaux à Hazebrouck dans le nord. La première fois c’était pour l’enterrement de Teddy, son père, jazzman de renom. Cette fois, c’est pour la lecture de son testament. Nina ne veut rien d’autre que la présence de son père mais ce n’est plus possible.
« Je ne veux rien, tu le sais, je ne veux rien, en tout cas rien de ce que pourrait me donner ce notaire. Je voudrais juste que tu t’asseyes au piano, que tu me fasses un clin d’œil et que tu te mettes à jouer « In a Sentimental Mood »et que je sourie malgré les larmes qui me montent aux yeux, chaque fois, chaque fois… »
Ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’elle roule vers une surprise de taille. Cette dernière rencontre avec son père, avec ses mots va bouleverser sa vie, comme celle d’Antoine de Laval, le notaire, ami et dernier élève de son père. C’est la révélation d’un secret qui l’attend, un secret qui va remettre en cause leur passé, chambouler leur présent et illuminer leur avenir, s’ils le veulent bien, s’ils en ont le courage.
Antoine va en faire des voyages entre Hazebrouck et Bordeaux, des liens vont se tisser entre lui et Nina, et Kathy, la lumineuse Kathy, la meilleure amie de Nina. Ces trois solitudes vont se trouver liées par le souvenir de ce Teddy si absent et pourtant si présent et par sa musique, celle à qui il a voué sa vie, délaissant pour elle les gens qui l’aimaient. Mais ce n’est pas si simple.
Ce voyage entre Hazebrouck et Bordeaux, entre le froid et la douceur, entre l'ombre et la lumière, entre le Blues et la joie, entre la solitude et l’amour, nous le faisons avec les personnages, bercés par la musique de Teddy, ces standards de jazz qui jalonnent le récit. Les mots de Véronique Biefnot et Francis Dannemark, ces deux auteurs belges de talent, une nouvelle fois réunis après La route des coquelicots, sont empreints de cette musicalité, de cette nostalgie, de cette poésie. Je vous encourage d’ailleurs, si vous pouvez lire en musique, à découvrir ce texte en écoutant les morceaux cités, pour vous fondre encore un peu plus dans l'ambiance de ce voyage. Ce roman plein de poésie et de tendresse est de ces livres qui font du bien et nous en avons bien besoin en ce moment. Ce livre est aussi un très bel objet : le texte est accompagné des superbes illustrations de Véronique Biefnot. Mettez-le dans votre valise pour vos vacances d’été, vous passerez un excellent moment.
« Parcourant encore et encore les couloirs de la maison, comme s’il allait y croiser autre chose que des fantômes, il finit par s’asseoir au piano. Il laisse faire ses mains, ses doigts, qui frôlent des mélodies et les perdent, s’égarent jusqu’à mimer la pluie qui balaie inlassablement les vitres, tel un batteur de jazz longtemps après minuit. »
Voici un roman qui prend le temps, le temps de séduire son lecteur, mot après mot, le temps de le promener dans une histoire d'amour à la recherche des sentiments les plus forts. Un père et une fille, des secrets qui permettent de comprendre enfin le pourquoi et le comment des choses, des secrets comme des fleurs qui naissent à l'aube et se ferment quand tombe la nuit. C'est beau, c'est bien écrit, c'est un peu comme un rêve. Douloureux mais libérateur.
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