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Le 17 juin 2018, trois bateaux accostent au port de Valence.
À leur bord, des centaines de migrants. Ximo Abadía raconte le destin de l'un de ces anonymes qu'il a rencontré. Le périple de Natan, un jeune Érythréen, commence dès son plus jeune âge. Pour fuir la dictature, sa famille part en Éthiopie. Mais la situation n'est guère meilleure dans le pays voisin. Très vite, l'existence de Natan devient un vrai enfer. Faim et misère n'entament toutefois pas son optimisme et surtout son instinct de survie. Après une succession de séjours en prison, il décide de tout tenter pour rejoindre l'Europe...
Une bande dessinée puissante qui conjugue une fascinante économie de mots et un trait qui devient génialement abstrait.
A l’âge de 4 ans, Natan fuit l’Erythrée, son pays natal et dictatorial, avec son père. Ils se réfugient en Ethiopie, dans un ghetto sordide de la capitale Addis-Abeba. La situation y est à peine meilleure qu’en Erythrée : faim, soif, misère, situation sanitaire et sociale catastrophique, violence, insécurité. Pendant des années, Natan et son père survivent en fouillant les décharges pour revendre ce qu’ils y trouvent. Puis, parce que Natan et ses semblables ont osé manifester pour attirer l’attention des autorités sur leur sort misérable, ils passent à plusieurs reprises par la case prison, où ils subissent tortures et privations, parfois jusqu’à ce que mort s’ensuive. Après en avoir réchappé une énième fois, Natan décide de tenter sa chance en Europe. Soudan, Tchad, Egypte, Lybie sont les stations de son calvaire, jusqu’à finalement atteindre le port de Valence en Espagne.
« Khat, journal d’un réfugié » est le récit d’un parcours migratoire tristement, dramatiquement, banalement semblable à celui de milliers d’autres migrants africains fuyant la violence ou la misère de leur pays, et qui échouent, pour beaucoup, abandonnés en plein désert par leurs passeurs, ou noyés au fond de la Méditerranée.
Les couleurs sont criardes et le trait enfantin (je ne suis pas très fan), et le texte et les dessins à la craie grasse sont minimalistes mais néanmoins suffisamment évocateurs pour que le public auquel s’adresse cette BD (« à partir de 12 ans ») comprenne le message et les horreurs vécues par Natan et ses compagnons d’infortune. L’approche est sans doute efficace pour frapper les esprits des ados (mais il faudrait leur poser la question), mais elle ne constitue qu’une introduction à la problématique, et elle laissera donc sur leur faim ceux/celles déjà sensibilisé.e.s et/ou qui voudraient approfondir le sujet.
Le 17 juin 2018, l'Orion, l'Aquarius et le Dattilo accostent dans le port de Valence en Espagne. A bord de ces trois bateaux, 630 migrants dont Natan, un jeune Érythréen.
« Khat », à mi-chemin entre l'album et la bande dessinée, est le récit du périple du jeune homme. L'auteur mêle habilement l'histoire personnelle de Natan à un côté documentaire afin que le lecteur puisse contextualiser les pays dans lesquels évolue son personnage.
Très jeune Natan et son père fuient leur pays en guerre afin de rejoindre l’Éthiopie. Rapidement, ils se rendent compte qu'ils ne sont pas les bienvenus et que la situation n'est pas meilleure qu'en Érythrée. Ils essaient de subsister comme ils le peuvent. Ils vont connaître la faim, la misère et la violence. Le père tombe malade, et le jeune garçon doit très vite arrêter l'école pour travailler. Natan va être emprisonné à deux reprises : une première fois pour avoir squatter une maison et une deuxième fois pour avoir fabriquer des faux papiers. Lors de son second séjour en prison, il arrive à s'échapper et n'a d'autre solution que de fuir le pays pour pouvoir survivre. Natan décide de passer au Soudan mais il devra continuer seul car son père ne peut l'accompagner.
J'ai trouvé les choix graphiques de Ximo Abadia originaux et astucieux. Tout d'abord l'utilisation des pastels à la cire mais aussi la colorisation. Mon regard a été instantanément attiré par la page de couverture dans les teintes orangées et rouges représentant un homme marchant dans le désert sous un soleil de plomb. Dans ce récit graphique, le dessin prédomine. Il y a plusieurs doubles pages mettant en avant les magnifiques illustrations de l'auteur et permettant de faire une pause dans l'histoire. Les couleurs sont vives et lumineuses teintées d'optimisme et d'espoir d'autres fois noires et sombres afin de représenter toute l'horreur et la violence de certaines situations rencontrées par le jeune garçon. Les personnages n'ont pas de visage la plupart du temps. L'auteur ne fait pas de gros plan sur un personnage. Ces derniers sont souvent en second plan, ce choix permet de mettre le lecteur à distance de la dureté du sujet sans pour autant occulter la réalité.
« Khat » est un récit d'exil fort, bouleversant et nécessaire qui ne peut laisser le lecteur insensible. Cette bande dessinée est en sélection officielle et en sélection jeunesse 12-16 ans du Festival d’Angoulême 2023.
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