"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une femme a rendez-vous avec un homme en gare de Lyon.
Du moins, c'est ce qu'elle croit. Cela fait trois mois qu'ils se sont rencontrés. Trois mois au cours desquels ils ne se sont pas vus. Elle a décidé de venir très en avance, de prendre ce temps de l'attente, assise au café. Le hall de la gare revêt l'allure d'une salle de spectacle, d'une pièce de théâtre où chaque personnage qu'elle croise la renvoie à ses propres souvenirs, aux moments-clefs de la trajectoire qui l'a menée jusqu'ici et qui a façonné le décor de sa vie.
Dans ce premier roman, Aurélia Ringard décrit avec minutie une poignée d'heures de la vie d'une femme, dans un huis clos magistral, époustouflant de maîtrise et de mélancolie.
Jour bleu en référence au café « Le train bleu » emblématique de la Gare de Lyon. Pendant quelques heures la narratrice s’y installe, attendant l’arrivée de l’homme rencontré trois mois plus tôt et dont elle est tombée amoureuse.
Jour bleu de la couleur des banquettes du célèbre établissement depuis lesquelles elle observe des inconnus, des couples et des familles.
Jour « blues » où au fil des heures elle se plonge dans ses souvenirs retrouvant dans les inconnus observés depuis les dites banquettes un peu de l’enfant, de l’adolescente et de la jeune femme qu’elle était.
Elle a 35 ans, est au milieu de sa vie, et ces heures d’attente, ces instants suspendus sont comme un sas entre celle qu’elle était et celle qu’elle rêve d’être. Entre l’enfant un peu triste, ballottée entre des parents qu’elle aimait plus que tout mais qui ne s’aimaient plus et la femme en devenir qui projette son avenir avec l’homme attendu. Dans ce café « elle flotte comme une ombre entre un passe revisité et un présent provisoire », dans cette gare, lieu de transitions entre départs et retrouvailles, entre espoir et séparations. Viendra? Viendra pas? Les heures s’égrènent dans le doute entre crainte et excitation, et le passé peu à peu remonte le fil de la mémoire laissant deviner une petite fille triste, une jeune femme mélancolique.
C’est un court roman nostalgique et tendre où l’on accompagne Chloé dans ses souvenirs incertains et son attente magnifiée. Un huis clos plein de délicatesse sur l’espoir d’un amour naissant et la puissance des liens familiaux. Un regard tendre et sensible qui je dois l’avouer m’a touchée pour des raisons très personnelles, faisant remonter des souvenirs d’enfance, des peines enfouies. A découvrir!´
Chloé a rendez vous avec une homme rencontré trois mois plus tôt lors d'un vernissage d'une expo photo. Cet homme qui n'est autre que le photographe lui a, en fin de soirée, glissé un mot avec le jour et l'heure de son train de retour à Paris.
Le jour venu venu, Chloé se rend à la gare de Lyon pour attendre le train qui lui ramènera celui qu'elle espère. Elle s'installe au Train bleu et laisse son esprit vagabonder entre ce qu'elle pense des gens qui passent dans son champ de vision, ce qui fait sa vie et ses attentes quant à son avenir. Pour se donner une contenance, elle écrit quelques notes dans un petit carnet.
Observer les gens et s'imaginer leur vie et les raisons qui font qu'ils sont là à ce moment précis donne au récit un côté voyeuriste passif qui n'est que la façon dont Chloé perçoit les choses et cela peut être très loin de la réalité ou alors tout proche. Ainsi certains évènements du passé vont remonter à la surface et nous aider à comprendre qui est Chloé mais aussi lui permettre de rendre l'attente moins anxiogène.
Ce récit introspectif m'a complètement happée même si on se doute de ce qui va en découler. L'écriture intimiste appelle à une plongée dans les sentiments, à l'appel du large avec cette envie de lâcher prise et de partir mais non sans possibilité de retour.
J'ai apprécié l'écriture tout en retenue, en délicatesse, en douceur. J'ai accompagné Chloé dans son attente, partageant les pérégrinations de ses pensées et la manière qu'elle a de lutter contre la crainte d'un rendez-vous raté.
Ce roman, lu dans le cadre des 68 premières fois 2022, est une réussite et on ne peut que souhaiter à Aurélia Ringard, une longue carrière dans le monde de l'écriture.
https://quandsylit.over-blog.com/2022/09/jour-bleu-aurelia-ringard.html
Chloé, trentenaire, a croisé lors d'une exposition un photographe, avec lequel elle a passé la soirée. Celui-ci devant partir pour un long reportage, il lui a donné rendez-vous trois mois plus tard à la Gare de Lyon. Elle décide de s'y rendre bien à l'avance et passe quelques heures dans une brasserie de la gare, munie de son carnet de notes. Tout en observant les autres voyageurs, de nombreux souvenirs du passé remontent et peuplent cette attente.
Pour la jeune femme, les trains revêtent l'odeur douloureuse de son enfance ou elle effectuait chaque semaine des trajets ferroviaires entre ses parents divorcés, moments de séparations difficiles pour cette petite fille tiraillée entre ses deux foyers.
Elle alterne chaque chapitre court en utilisant la première personne pour ses souvenirs de jeunesse et la troisième personne pour la rencontre avec cet homme et son attente dans la gare, comme une vue extérieure de sa vie actuelle. Elle se questionne sur l'avenir , son changement de métier, ce rendez-vous incertain.
On suit Chloé dans son observation des clients avec grand plaisir et sans aucun ennui ; l'écriture précise et légère nous entraîne dans ses réflexions sur l'attente heureuse et frémissante ; cet amour naissant souhaité ; la peur de demain ; les douleurs anciennes.
L'auteur a réussi à donner de l'ampleur à ce temps suspendu , en nous rendant si attachante cette jeune femme ou chacun peut se reconnaître.
C'est une lecture agréable avec une fin émouvante .
❝Le bleu ne fait pas de bruit. C'est une couleur timide, sans arrière-pensée, présage, ni projet, qui ne se jette pas brusquement sur le regard comme le jaune ou le rouge, mais qui l'attire à soi, l'apprivoise peu à peu, le laisse venir sans le presser, de sorte qu'en elle il s'enfonce et se noie sans se rendre compte de rien. Le bleu est une couleur propice à la disparition. Une couleur où mourir, une couleur qui délivre, la couleur même de l'âme après qu'elle s'est déshabillée du corps, après qu'a giclé tout le sang et que se sont vidés les viscères, les poches de toutes sortes, déménageant une fois pour toutes le mobilier de ses pensées. Indéfiniment, le bleu s'évade. Ce n'est pas, à vrai dire, une couleur. Plutôt une tonalité, un climat, une résonance spéciale de l'air. Un empilement de clarté, une teinte qui naît du vide ajouté au vide, aussi changeante et transparente dans la tête de l'homme que dans les cieux. L'air que nous respirons, l'apparence de vide sur laquelle remuent nos figures, l'espace que nous traversons n'est rien d'autre que ce bleu terrestre, invisible tant il est proche et fait corps avec nous, habillant nos gestes et nos voix. Présent jusque dans la chambre, tous volets tirés et toutes lampes éteintes, insensible vêtement de notre vie.❞
Une histoire de bleu, Jean-Michel Maulpoix
❝Je me demande si, par la convocation de ce lieu, c'est mon avenir que je suis venue chercher ou mon passé que je suis en train de retrouver.❞
Le premier roman d’Aurélia Ringard est de ceux dont le sujet tient en quelques mots : une femme et un homme se sont rencontrés brièvement avant de devoir se séparer et cette brassée d’heures passées ensemble sont de celles qui bouleversent une vie.
❝Cela sonnait juste et ne sentait pas le coup d'un soir.❞
C’était il y a trois mois au vernissage de l'exposition de ses photographies à Paris et ils ne se sont pas revus depuis. Il partait dès le lendemain en reportage dans les Alpes, en Haute-Tarentaise et lui a donné rendez-vous.
❝Voici l'horaire de mon train de retour, je l'ai déjà réservé, Gare de Lyon, le 19 septembre, 13 h 17❞
Leur rencontre ? Une fulgurance. Alors oui, Chloé sera là.
❝Elle s’est contentée de courir jusqu’ici, d’arriver en avance, très en avance même, dans un mouvement superbe d’abandon et d’entêtement fertiles, bras ouverts à la récolte.❞
❝Bras ouverts à la récolte❞, c’est beau, n’est-ce pas, d’aller vers son avenir prête à tout cueillir, à tout embrasser.
Ce 19 septembre, elle prend le temps d'attendre cet homme ❝à la fois étranger et intime❞, installée à une table du Train Bleu, un peu à l'écart d’où elle a le loisir d’être attentive aux vies qui la frôlent, d’observer le ballet des serveurs et celui des gens qui vont et viennent, entrent et sortent comme ils le feraient d’une scène de théâtre. Elle leur invente une vie sous la surface des apparences, au gré de ce qu’elle a vécu ou croit deviner à cette manière qu’ils ont de se mouvoir, de se parler, de regarder autour d’eux ou, à l’inverse, de s’absorber absents au monde et repliés sur eux-mêmes dans leur lecture du moment ou, comme elle, dans le carnet qu'elle a ouvert pour y écrire.
❝Tout est là et rien ne s’arrête jamais. Les voyageurs des gares disent tout avec le rythme de leurs pas et le volume de leurs sacs. Chacun porte en soi des dizaines d’histoires à raconter. En imaginant les destinées, elle a l’impression d’influer sur le cours de leur existence. L’acte de témoigner ne lui semble jamais vain.❞
Dès les premières pages, l'œil repère des phrases privées de verbe, laconiques, telles ces indications que l’on trouve d’ordinaire dans un script : ❝Mois de septembre. Début de jour❞ ; ❝Arrêt sur image. Fin des vacances❞ ; qu’elles soient empruntées au lexique du cinéma ❝Des plans-séquences de nos amours tentées❞ ou à celui du théâtre ❝la pincée de drame tenue et nécessaire avant que le rideau ne retombe complètement sur la scène et que le monde se retire❞. Et tant d’autres.
De fait, Jour bleu respectant la règle des trois unités, nous sommes bien au théâtre.
✦ Le lieu : on ne sort pas de la Gare de Lyon ❝Un mélange de Chanel et de crasse. De tabac et de sueur❞ et de son restaurant Le Train Bleu, lieu feutré, soustrait à l’effervescence du hall et des quais. Les brasseries, sublimées dans les films de Claude Sautet par exemple, sont des endroits qui permettent de capter l’humain, de retranscrire la vie, d’observer sans que notre présence soit détectée.
✦ Le temps : trois heures de la vie d’une femme, Chloé, sur le point de s’élancer vers l’inconnu ; trois heures qui correspondent peu ou prou au temps de lecture du roman ;
✦ L’action : si les récits secondaires ne sont pas absents, seule ❝la pellicule de la mémoire [recolle] les morceaux❞ pour visionner les souvenirs tremblés que ce lieu particulier fait remonter de son passé d’enfant de divorcés qui, avec son frère, voyageait de l’un à l’autre en train, trajet de quelques heures pour combler la distance entre leurs parents.
❝Tu m’as donné rendez-vous dans une gare. Tu ne pouvais pas savoir. C’est pourtant simple, c’est toute ma vie. Dans ma vie, il y a des gares et des trains. Des trains à attraper, des trains à l’heure, des trains bondés, des trains de nuit, des trains bloqués, des trains en retard.❞
Un prologue et un épilogue écrits par deux « je » différents, le second semblant répondre au premier, bornent une quarantaine de chapitres très courts alternant entre présent et passé, entre Chloé qui se raconte et un narrateur qui relate, à la troisième personne, la rencontre venue la percuter trois mois auparavant Quai de Béthune à Paris. Par cet astucieux procédé narratif qui déjoue avec bonheur la monotonie d’un long monologue, Aurélia Ringard met en mouvement l’histoire de cette attente autrement immobile, ❝tout me revient dans une accélération impossible à maîtriser❞, les plaisirs, les blessures, les doutes, ❝les souvenirs que [Chloé] gratte comme on écorche la roche lors de fouilles archéologiques❞ pour donner un contour approximatif au passé, les traumatismes de l'enfance ❝c’est un été où les châteaux de sable se construisent et où notre famille s’effondre❞, la fin d’un mariage dans la douleur, les pleurs du père dans la cuisine, les étreintes maternelles aux effluves de Shalimar, le désir et l’élan enfin qu’elle choisit, elle, afin de ❝Tout faire pour ne pas finir avec des regrets ou un goût d’inachevé❞.
L’écriture d’Aurélia Ringard a l’élégance retenue qui sied à cette attente où l'inquiétude le dispute à la griserie. Tout n'est que discrétion. Quelques allusions à des textes connus de tous se glissent çà et là : Les Mots bleus de Christophe dès la première page
❝Derrière la vitre, on articule des mots que l’on dit surtout avec les yeux❞
ou encore les premiers mots du poème de Bernard de Ventadour qui ouvrent le chapitre 10 et que citait Sylvain Prudhomme dans Par les routes.
❝Le temps va, vient, vire…❞
Des images déroutantes naissent d’associations imprévisibles, tels ❝cette vie contemporaine qui gifle la poésie❞ ou ❝ce silence à fendre les muscles❞, qui dépaysent le lecteur autant qu'elles le captivent.
Et ce bleu qui calme les fièvres autant qu’il dit la couleur de l’âme mélancolique
❝Bleue est la couleur du regard, du dedans de l’âme et de la pensée, de l’attente, de la rêverie et du sommeil.❞
Une histoire de bleu, Jean-Michel Maulpoix
et dont la chatoyante palette venue du passé nimbe ces heures d’attente et leur donne une tonalité propre : le bleu immémorial, celui du ciel et de la mer, mais aussi celui des lèvres les jours de grand froid, des rideaux, du coton, de la voiture familiale, le bleu-vert des yeux maternels, le bleu de ce jour enfin ❝[…] le grand jour. Le jour sans filet❞ où Chloé attend cet homme au Train Bleu, comme si à l’instinct elle plaçait sa vie à venir, cet amour à éclore, son cœur ❝grenade impossible à dégoupiller❞, sous la protection de cette couleur-talisman au moment où tout s’apprête à basculer vers l’inconnu.
Alors que se tournent les dernières pages de cette histoire en train de s'écrire dans le carnet qu'elle a toujours avec elle,
❝J’essaie de mettre de l’ordre dans l’histoire, mais j’ai la mémoire en vrille, il me manque des photos de famille. Je ne sais pas comment structurer le temps, ni comment le définir. Si je devais en faire un livre, on dirait que je suis une narratrice chaotique. Je recompose, ni plus, ni moins, je tente de décrypter les événements et les choses. Au bout du compte, j’interprète, j’imagine. C’est peut-être imaginairement que l’on aime. Des parents, une vie, une gare. Un homme. On aime l’image que l’on s’en fait.❞
le lecteur se demande — l’identité du narrateur percera-t-elle enfin ? Le photographe sera-t-il au rendez-vous par lui fixé ? Existe-t-il vraiment ? n'est-il qu'un fantasme ? — car le talent d’Aurélia Ringard est aussi de faire de ce récit intimiste un roman à suspense et à énigme. À mon tour, je me suis retrouvée prise dans un entre-deux, entre l’impatience de gagner les dernières pages pour savoir enfin et l’envie de ralentir ma lecture pour rester encore assise à cette table à l'écart, à goûter ces heures lentes au-dessus desquelles planent la persistance de la mémoire et l’incertitude de l’avenir.
❝Convoquer l’instant, celui qui scintille plus que les autres, ne plus bouger, ne plus s’appesantir, c’est un privilège. Rêver. Juste rêver. On ne sera pas jugé pour cela.❞
Comment ne pas tomber sous le charme de ce Jour bleu en équilibre entre passé et présent, entre mémoire et hypothèses, entre l'attente anxieuse et un bonheur à venir qui s'abriterait, pourquoi pas, ❝dans une cabane au bord de mer, ma vie rêvée depuis longtemps ? Un roman qui parle de ceux qui doutent, se trompent, (se) cherchent, vont de l’avant et vers l’autre ❝à pas timides❞ comme l’écrit Cécile Coulon dans le poème sur lequel, après un dénouement théâtral et rapide, tombe le rideau.
Fascinant premier roman.
Lu pour la sélection 2022 des #68premieresfois
https://www.calliope-petrichor.fr/2022/07/24/jour-bleu-aurélia-ringard-frison-roche-belles-lettres/
Je t’attendrai à la gare
Dans un premier roman qui fait la part belle à l’introspection, Aurélia Ringard imagine les heures qui séparent une jeune femme de l’arrivée de son amoureux à la Gare de Lyon. Une attente riche de souvenirs et d’espoirs.
«C’est le grand jour. Le jour sans filet. L’ultime partie. J'ai le sentiment de la jouer serré, mais pour rien au monde je ne voudrais être ailleurs. Je me dis même que je pourrais rester ici toute ma vie. Je ne suis qu’une ombre en transit, pourtant. J'aime les gares, j'aime les trains et je viens te voir. Je glisse à fleur du temps, des choses, des autres et de moi-même, et je laisse l'imagination faire sa part. Je fais semblant de narguer les heures, mais je me sens parfois désarçonnée. Une douleur tenue. J’ai la trouille, quoi. J’étouffe si je fais semblant. Cela fait trois mois que nous nous sommes rencontrés. Cela fait trois mois que nous ne nous sommes pas vus. Trois mois, c'est mille ans, trois mois, c’est jamais.» Pour la narratrice, qui attend l’homme qu’elle aime à la Gare de Lyon, le temps a soudain pris une densité très particulière.
Elle a d’abord observé les voyageurs, essayé d’imaginer leur quotidien, un travail qui les stresse, l’impatience qui les gagne, un groupe d’étudiants partant en vacances. Face à cette ruche qui bourdonne, à ce concentré de vies qui ne font que passer, elle choisit de se poser, de prendre son temps. Elle commande un café au Train bleu et sort son carnet de notes, se remémore sa rencontre avec celui qu’elle attend, le photographe qui «traque les dernières terres vierges». Comme lui, elle aime la liberté absolue, celle qu’il parvient si bien à rendre dans ses clichés: «ses photos tout en nuances de couleurs parlent de l’ennui et de l’ailleurs, de vivre maintenant et de fuir l'ordinaire, de tout ce qui n'a pas de sens et qui peut mener au chaos.»
Les trains et les voyageurs lui rappellent son enfance, après le divorce de ses parents, quand il fallait se rendre à la gare pour rejoindre son père pour le week-end, quand les adieux étaient déchirants, quand le voyage était mêlé d’appréhension. Oui, il lui aura fallu du temps pour apprivoiser ses peurs, aidée en cela par une boulimie de lectures. Car comme le lui écrira quelques années plus tard Christian Bobin «Lire, c’est toujours venir en aide à quelqu'un. Soi-même, les autres ou tous ces fantômes qui nous sont chers et sans lesquels notre vie paraîtrait moins réelle.»
Lire, mais aussi écrire, se rapprocher de sa vérité. «Je gratte mes souvenirs comme on écorche la roche lors de fouilles archéologiques. Tout me revient dans une accélération impossible à maîtriser. À quel âge cesse-t-on de s’interroger sur le sens de sa venue au monde? Je voudrais en sortir quelque chose qui ressemble à quelque chose. Comme on distille un parfum, en recueillir le meilleur.»
Une mission qu’Aurélia Ringard accomplit avec beaucoup de sensibilité pour nous offrir un premier roman où la quête existentielle se teinte de nostalgie, ou l’espoir fou se heurte à la peur d’un rendez-vous manqué. Et si la vie est un rêve, alors pourquoi s’empêcherait-on de rêver?
https://urlz.fr/jo5v
Gare de Lyon. Elle attend le train de 13h17, assise à une table de restaurant. Autour d’elle, la foule déambule ou s’arrête, offrant des bribes d’existences qui resteront secrètes. Cette passivité qui guette la ramène à d’autres trains, d’autres gares, d’autres séparations ou retrouvailles. L’anonymat se dissipe parfois le temps d‘un sourire échangé ou d’une connivence rêvée, égrenant les minutes qui la rapprochent de ce rendez-vous tant espéré, et que le soupçon d’incertitude pimente d’une angoisse latente.
Peu adepte des récits introspectifs, j’ai cependant été immédiatement happée par cette écriture qui dit si bien l’universalité de nos ressentis. L’on se reconnait dans chaque paragraphe, dans l’enfance évoquée, dans les souvenirs parfois incertains. On se prend à attendre aussi cet homme croisé trois mois plutôt et qui n’a laissé qu’un horaire de train sur un bout de papier. Sera-t-il présent ? Comblera -t-il l’attente et la promesse d’un partage futur?
Les champs/contre-champs qui alternent dans le monologue de la narratrice et une mise à distance du personnage qui devient l’observée, donnent un rythme et du relief au texte, comme le fait l’alternance du présent et du passé.
Très beau premier roman, à l’écriture envoutante, à lire et même relire.
186 pages Frison-Roche 15 juin 2021
68 premières fois 2022
Une femme a RDV avec un homme qu’elle n’a vu qu’une seule fois il y a 3 mois. Elle arrive gare de Lyon avec 3 heures d’avance et c’est l’occasion pour elle d’une introspection. Elle nous narre son enfance et la rencontre avec cet homme par petites touches. Livre tendre et plein de poésie.
Chloé est seule à une table du café Le train bleu de la Gare de Lyon. Elle espère retrouver l’homme qu’elle a croisé trois mois plus tôt. Ils n’ont partagé qu’une seule soirée mais elle a remplie toutes ses nuits, ses jours. Elle est venue très en avance et elle se laisse porter par ce qui l’entoure, prêtant des histoires aux visages qu’elle croise. Elle revient aussi sur des souvenirs, ceux qui l’ont fait grandir, ceux qui ont été douloureux, ceux qui lui réchauffe encore aujourd’hui le cœur…
Le premier roman d’Aurélia Ringard est rempli de douceur, de nostalgie, et de jolis mots.
Assise à sa table, Chloé regarde le monde et elle nous fait cadeau de ses souvenirs d’enfance. Avec tout l’amour qu’elle porte à ce passé, elle revoit les quais de gare, les yeux embués, les cœurs qui se serrent. Mais l’attente des jours à venir lui rappelle aussi tous ces instants précieux entre le rire de sa mère et les attentions de son père. Qu’il s’agisse d’un air sur lequel elle a dansé, ou d’un bol de chocolat qu’elle a dégusté, cette jeune femme se perd dans ses pensées.
J’ai trouvé qu’à travers la très belle écriture d’Aurélia Ringard se dégage une grande sensibilité, une tendresse particulière, pour ces jours d’enfance et pour ceux qui les font vivre. Un frère, une mère, un père… Ces êtres chers qui nous accompagnent sur notre chemin, tout en suivant le leur, parfois chaotique…
Cet attachement à sa famille résonne comme en écho à l’amour naissant. Une rencontre qu’on n’attendait pas, ou plus. Ce cœur qui bat et les pulsations qui redonnent l’envie d’avancer, la force de continuer et l’énergie d’espérer…
Merci une fois de plus aux 68 premières fois pour cette douce découverte…
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