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En matière de déclamation, le classicisme, entre 1715 et 1730, possède une doctrine. Les ouvrages d'où on peut la dégager sont d'ordre très divers : grammairiens, comédiens, hommes de lettres se livrent tour à tour à des discussions dogmatiques ; en particulier les musiciens, que la question intéresse spécialement, nous apportent des réflexions curieuses et minutieusement exposées. Tous ces témoignages s'ordonnent en un système qui n'est pas absolument identique à celui du xviie siècle, mais qui en est directement issu. Les théories esthétiques se modifient en effet lentement sans qu'on veuille abandonner encore les grands principes de la période précédente. Ceux-ci subsistent donc : on admet qu'il y a des règles fixes, une perfection dont l'Antiquité a donné les modèles et dont on doit s'approcher le plus possible, une raison souveraine qui prime la sensibilité. Ces principes, qui gouvernent tous les arts, puisqu'aussi bien tous sont semblables quant à leur essence et quant aux buts qu'ils poursuivent, s'appliquent aussi à la déclamation. Rien de ce qu'on exige du comédien n'est différent de ce qu'on demande au musicien, au peintre ou au sculpteur : les idées fondamentales qui régissent la poétique du siècle dominent également toutes les réalisations qu'on peut attendre de la voix humaine. Il y a donc, pour les domaines les plus divers, une étroite unité théorique, et les lois générales communément adoptées s'étendent de l'un à l'autre sans distinction d'objet. Le seul fait nouveau, gros de conséquences, est une évolution du goût public : il se détourne peu à peu de l'art grandiose et raide auquel l'époque de Louis XIV avait accordé sa faveur. Fénelon, dans sa Lettre à l'Académie française, est l'un des premiers témoins de cette évolution ; il est notable en effet qu'il veut ménager à l'émotion et à la sensibilité un rôle plus important qu'elles n'en avaient eu jusque-là : « Je veux un sublime si familier, si doux et si simple, que chacun soit d'abord tenté de croire qu'il l'auroit trouvé sans peine... Le beau qui n'est que beau, c'est-à-dire brillant, n'est beau qu'à demi : il faut qu'il exprime les passions pour les inspirer, il faut qu'il s'inspire du coeur ».
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