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Le silence de plomb le surprit, puis l'arrêta...
La lumière était allumée dans le salon. Seul le tic tac du coucou mural rythmait le temps qui passe dans l'absence angoissante des êtres familiers. Où étaient-ils ? Un évènement grave avait dû se produire... Maman ne sort jamais à cette heure, elle sait que je reviens de l'école... Et tout à coup il sursauta : le coucou jaillissait de sa niche pour annoncer joyeusement cinq heures... Franz lui asséna à la volée un coup de la batte de base-ball qui traînait par là et lui cloua définitivement le bec.
Il se raidit. La batte était poisseuse de sang, avec des cheveux collés. Une angoisse terrifiante le saisit au creux de l'estomac... Du sang ! « Oh mon Dieu, non, par pitié ! » Il suivit les traces, les intestins noués... et maintenant l'odeur fade et douçâtre étreignit ses narines, lui nouant la gorge : une odeur qu'il sut aussitôt être celle de la mort, mêlée à celle d'aliments congelés et de moisi... L'horreur ! Ses cheveux se dressèrent... un hoquet lui souleva l'estomac... il vomit la glace dont une partie se déversa dans ses narines, manquant de l'étouffer... Il tituba, toussant et crachant, vers la chambre froide, grise, sinistre, entrouverte et éclairée ; là, pétrifié, il découvrit son père, sa mère, son chat et son chien, égorgés, raides, pendus par leurs pieds ligotés à des crocs de boucher, se couvrant de givre et se vidant de leurs dernières gouttes de sang. Terrifié, il vit les yeux vitreux de son père, jadis bleu acier, mobiles et perçants, qui le fixaient d'un regard vide à jamais figé. Ils l'avaient émasculé et avaient enfoncé son sexe dans sa bouche. Sur son veston, une feuille épinglée où était écrit avec son sang « il faut payer un jour ».
Alors, les yeux exorbités, le regard fou, il se sauva en hurlant dans la rue, tirant par ses pattes serrées dans sa main crispée son chat raide comme un bout de bois qui tressautait sur les aspérités du sol avec un bruit mat. Il traversa l'avenue comme un dément et un taxi pila dans un hurlement de freins bloqués pour éviter de le renverser. La rue se figea. Les gens éberlués, le visage grave, contemplaient cet enfant tétanisé, traînant un corps de chat noir et blanc exsangue, et dont la tête ballante se séparait lentement du corps !
De ce jour, Franz, qui avait frôlé la folie pendant plusieurs semaines, ne songea plus qu'à se venger aussi sauvagement qu'ILS avaient tué sa famille et ses animaux. Il ne vécut plus jour après jour que pour et par cette obsession de tuer implacablement, vicieusement et de sang-froid tous les assassins sadiques qu'il rencontrerait sur sa route. Ce n'est que bien des années plus tard, grâce à l'amour de Charlotte, qu'il arriva à cicatriser sa blessure et à trouver un sens clair, gratifiant, à la vie.
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