La revue de Presse littéraire du mois de mars
Pour son premier roman, Hélène Zimmer a voulu écrire le portrait d'une femme rongée par le quotidien. L'installation en couple, la naissance des enfants, les obligations financières, tous ces éléments constitutifs de la famille participent de la dégradation identitaire. Plus les statuts s'empilent, plus les couches sociales se superposent - femme, mère, vendeuse - plus l'être se disperse, perd en épaisseur.
Coralie existe pour les autres. Sa vie appartient à ses enfants, au père de ses enfants, à son patron. Elle pense avoir choisi librement ce qui l'entrave. Son histoire est celle d'un emprisonnement consenti.
Au lieu d'essayer d'échapper à la servitude, Coralie cherche à maintenir le peu d'équilibre qu'il reste du système qu'elle a fabriqué autour d'elle - son foyer, dont elle considère être la garante. Elle est gouvernée par deux forces, active et passive. Elle témoigne d'une grande résistance. Elle ne renonce pas.
C'est une victime pugnace et endurante. Surtout victime d'elle-même. C'est ce paradoxe qu'Hélène Zimmer met en évidence. Elle réfléchit aux conditions qui conduisent un individu dont l'existence est hostile à l'immobilité. Quand le choix est encore possible, pourquoi se contenter d'une réalité agressive et destructrice ? Pourquoi ne pas transformer cette réalité ?
Pour Coralie, la vie s'est réduite à une unique et longue voie matérielle. L'héroïne est engluée dans des normes aliénantes. Figée dans un système qui néantise sa volonté.
De cette impasse matérielle, affective, mentale, Hélène Zimmer rend compte grâce à l'incroyable efficacité d'une écriture, précise, violente, fouailleuse, de dialogues qui font mouche à tout coup, et d'un talent d'observation sociale rare.
La revue de Presse littéraire du mois de mars
Fairy Tale veut dire conte de fées ! Mais est-ce vraiment le cas dans ce roman décapant et très surprenant !
Très surprise par cette lecture, un langage qui « décoiffe », familier et percutant. Un roman choc, frontal et drôle !
Une prouesse de l’auteure qui traite d’un sujet délicat, et arrive à nous embarquer au sein d’une famille française moyen en y apportant une réelle touche d’humour et d’une réalité incroyable.
J’ai dû hausser les sourcils, ou les froncer parfois mais souvent j’ai souri en lisant les aventures de Coralie, Loic et ses trois enfants.
C'est l'histoire d'un jeune couple qui sombre peu à peu dans la misère...Entre la mère qui porte tout sur ses épaules, son mari chômeur, ses trois enfants qu’il faut éduquer tant bien que mal. Nous sommes loin du conte de fée ! Sans oublier, son boulot de vendeuse qui tourne mal, le manque d’argent, et les tâches ménagères, y a de quoi faire un burn out parental et/ou conjugal !
Une SEULE issue ?! Participer à l’émission Fairy Tale, une émission de la télé-réalité.
L'écriture est crue, directe et les dialogues sont parfois choquants...Les chapitres courts, apportent du rythme à l'histoire de cette famille qui essaye tant bien que mal de s'en sortir...Je peux presque dire que c'est comme un feuilleton, on suit les aventures de Loïc et Coralie et leurs trois enfants Popo, Titi et Lulu.
Certains passages sont écrits avec beaucoup d’humour, comme les vacances en camping ou le tournage à l'émission Fairy Tale.
Ce livre a reçu le prix Marie Claire du roman féminin 2017 et a été présenté dans la presse comme “La réalité dans la gueule !” ça résume très bien le thème de Fairy Tale.
Une lecture que je recommande, un livre complètement décalé, réaliste, véridique ! Un récit rare comme le sont parfois les premiers romans d'auteurs qui gardent une certaines candeur et spontanéité !
J’ai beaucoup aimé. Une très belle découverte. Une auteure à suivre…
https://leslecturesdeclaudia.blogspot.fr/2017/11/fairy-tale.html
Le résumé est annonciateur d'une écriture hachée, sans filtre et sans tabou... On n'est pas déçu.
Zimmer dévoile le quotidien d'un jeune couple avec 3 enfants qui tente de survivre dans ce monde impitoyable qu'est la réalité.
Fini les contes de fées, les princes charmants et les paillettes. Faut travailler pour manger, faut se battre contre son chômeur de mari pour le bouger, faut tenter d'élever ses enfants.
Fini le beau prince qui fait l'amour tendrement, c'est un coït sale et violent, à la recherche de la passion des débuts, d'avant les enfants, d'avant le chômage, d'avant le quotidien de la vie.
Un véritable coup de coeur : autant pour l'écriture et le ton de Zimmer que pour l'histoire tout à fait banale d'une famille parmi tant d'autres.
Je ne le fais jamais, non, je ne lis jamais avant l’œuvre elle-même la quatrième de couv’. Je ne sais pas pourquoi, cette fois-ci, elle a comme attiré mon regard. Je vous la livre ici :
« Fairy Tale, c’est ce qu’il reste de l’amour après la conception des enfants et la répartition des tâches.
- Et l’autre enculé là… Mouret… Avec son avertissement de merde… Il croit qu’on est à l’école le gars. Il croit qu’il peut arrêter de payer nos heures sup comme ça. Il a vu ça où lui ? Je pensais pas que je dirais ça un jour mais Frédéric il me manque finalement.
- C’est qui Frédéric ?
- Frédéric… Mon ancien chef… Je m’appelle Coralie au fait. Je suis la mère de tes gosses. Tu sais, la chatte que tu remplis quand t’es au calme chez toi. »
Fairy Tale, c’est ce qu’il reste de Coralie. »
Voilà, tout est dit.
Le sujet ? Comme dans une tragédie, il est simple : Coralie est la compagne de Loïc, ils ont trois enfants, Popo, Titi et Lulu. L’aînée a onze ans. Ils habitent un pavillon dans une ville sinistrée. Loïc n’a plus de travail depuis deux ans et Coralie est vendeuse au rayon fêtes ( !) chez Bonnin : vérification des commandes, réassort, présentation des produits, conseil aux clients. Une pizza rapide le midi dans la zone commerciale, un patron harceleur, des tensions avec les collègues. Une heure de trajet. Les enfants, les repas de nouilles, le zapping TV vide de sens, les tensions de la journée qui suintent, dégoulinent de partout, les vacances en mobil-home où l’espace se resserre encore davantage sur des protagonistes empêtrés.
J’arrête là, vous imaginez la suite. Alors, voir Loïc ne rien trouver, ne rien chercher peut-être, c’est dur. D’autant que dans trois semaines, il ne touchera plus ses indemnités chômage. Alors, quand Coralie tombe sur une émission de télé-réalité, Fairy Tale, qui se propose de trouver du travail aux chômeurs de longue durée, elle inscrit Loïc, sans le lui demander. La bonne fée de l’émission va-t-elle changer la vie de Coralie et des siens ?
Lorsque vous entrez dans ce roman Fairy Tale, terrible antiphrase, vous êtes littéralement happé, soufflé, emporté, vous vous cognez à chaque mot, chaque phrase vous pousse brutalement, vous met à terre, vous plaque, vous claque. Vous pénétrez dans le terrible univers de la tragédie. Fairy Tale ressemble à une pièce de théâtre et les répliques, les dialogues, sur un rythme effréné, sifflent, piquent, griffent, giclent. Les mots sont crus, bruts, hard. Ils ne sont pas dits - car on ne parle pas dans Fairy Tale - mais beuglés, hurlés, crachés, vomis.
Et pourtant, on les sent encore loin d’exprimer toute la violence subie par des individus broyés. Une violence terrible, celle de la souffrance pure, celle de la chute que l’on ne peut arrêter, celle de Coralie qui pige tout, qui voit tout, qui tente tout mais qui ne parvient pas à éviter le mur. Se fracasser, telle est l’issue inéluctable. Une vraie tragédie où on avance droit dans le pire, englué dans un cauchemar sans fin.
Un texte d’une puissance rare. J’allais écrire « une vraie claque » mais c’est bien pire que ça. C’est une sorte de précis de décomposition, de pourrissement, d’extinction pour mimer des titres à la Thomas Bernhard. Coralie s’enfonce dans la vulgarité d’un réel abject, sordide, où les gens chaque jour creusent leur trou, piégés par des problèmes matériels. Il suffit de regarder autour de soi… Que dis-je, il suffit de se regarder. Chacun reconnaîtra ici une part de son quotidien, l’usure de la vie, l’aliénation du travail, le combat qu’il faut mener sans relâche pour tout assumer et la lassitude qui fait qu’à un moment donné, ce n’est même plus la peine de lutter. On baisse les bras, on se dit que c’est foutu. Écrasé, piétiné, en miettes, on sait que l’on ne se relèvera pas.
Et cette violence, avant de se traduire par les gestes, passe par les mots. L’auteur dit que c’est par eux que s’exprime la psychologie des personnages. Ils sont en effet saisissants de vérité : je vous assure, l’effet de réel est impressionnant. On y est. Ça fuse dans tous les sens. Coralie encaisse et s’affaisse toujours un peu plus. Elle n’existe plus que pour les autres : son mari, ses enfants, son patron, ses collègues, ses voisins.
Victime de son quotidien, de ses multiples casquettes, de la fatigue qui s’accumule, elle ploie, tangue, s’enlise. Les pieds dans des sables mouvants, elle se débat et ne fait que s’enfoncer davantage. Combien de temps va-t-elle encore tenir ? Fairy Tale, dit Hélène Zimmer, est « ce qui reste de Coralie une fois qu’elle a rempli toutes ses fonctions » c'est-à-dire pas grand-chose.
J’ai lu ce texte dans la journée du 7 mai. L’angoisse qui m’a serré la gorge jusqu’au soir était terrible. Je me suis dit que cette violence des mots, de la vie, cette réalité sociale, on allait la retrouver dans les urnes, que ce désespoir, un jour, nous éclaterait en pleine face. Et j’avais peur.
Le soir, le résultat est tombé. Soulagement, bien sûr. Immense soulagement.
Mais, très vite, j’ai repensé à Fairy Tale, à Coralie.
J’ai pensé à ceux qui n’en peuvent plus et n’ont que la violence pour le dire.
Il faudra faire attention à eux. Sinon, le mur, il est pour nous.
Lire au lit: http://lireaulit.blogspot.fr/
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