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Dès l'origine, le destin de Raguse tut déterminé par sa situation géographique. Située sur une route de navigation fréquentée depuis la colonisation grecque, elle devint place forte maritime de l'empire byzantin, contrôlant les routes commerciales entre l'Occident, les Balkans et l'Orient. Elle conclut avec Pise, en 1169, un traité faisant d'elle la rivale de Venise pour le commerce avec le Levant. La prise de Raguse par les Vénitiens, en 1205, ne contrarie pas l'essor économique de cette cité de marchands et d'armateurs (libérée en 1358), qui atteint son apogée aux XVe et XVIe siècles, grâce à sa prudente diplomatie : elle paie tribut aux Ottomans dès 1442. Sa flotte, rappelle Fernand Braudel, domine en Méditerranée, et ses voiliers sont présents sur toutes les mers, à Londres, à Goa, et jusqu'au Pérou. Son port neutre attire les marchands catalans, siciliens, juifs, grecs voire turcs. Par l'exploitation des mines de Bosnie et de Serbie, Raguse contrôle les deux tiers du commerce de l'argent. Prospérité et indépendance dureront jusqu'à la conquête napoléonienne, en 1806. Nada Grujié évoque l'esprit d'entreprise et le sens aigu de l'organisation des Ragusains. Dès le XIIe siècle, l'urbanisme est raisonné : rues parallèles, de même largeur, découpant de petites parcelles égales, allouées aux familles d'artisans et de commerçants. Le développement de la ville vers le nord, à partir du XIIIe siècle, et l'aménagement, depuis le port et le centre civique et religieux de la Platea, du Stradun, principale artère commerçante, confirment cette exigence. Les séismes et les incendies qui ont ravagé la ville au lit des siècles sont le point de départ d'un surcroît d'activité réglementaire et organisatrice : suppression des auvents débordant sur les rues, installation d'un réseau d'égouts et des célèbres fontaines d'Onofrio di Giordano et Pietro di Martino (1438 et 1442)... Il y a beaucoup de palais et de maisons de grande beauté, note un témoin, en 1440 : tous semblent construits du même matériel par le même architecte et au même moment. " L. e grand séisme de 1667 qui détruisit une large partie de la ville, tuant la moitié de ses 6 000 habitants, déclencha un plan de rénovation urbaine encore plus radical. Alternant plans d'ensemble et détails de constructions, de sculptures, de décors, le livre déploie les facettes de l'architecture religieuse, civile et militaire. Des artistes célèbres venus d'Italie - Jacopo di Bonino et Maso di Bartolomeo, au couvent des Dominicains ; Michelozzo di Bartolomeo, architecte de Cosme de Medicis, pour les remparts ; Andrea Pozzo, à Saint-Ignace - collaborèrent avec les Ragusains, architectes, et sculpteurs, dont le plus renommé fut Ivan Duknovic, connu à Rome sous le nom de Giovanni Dalmata. Le meilleur exemple du style de Raguse, outre le palais des Recteurs, est la Sponza, la nouvelle douane, alliant, comme lui, les styles gothiques tardifs et Renaissance. Son architecture intérieure est fonctionnelle mais sa façade et son portique à chapiteaux composites s'harmonisent à celle du palais communal et aux belles demeures de la Platea. Symbole éclatant de la noblesse de Raguse, le goût du luxe et le souci de l'utilitaire convergent en une somptueuse unité.
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