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La « résonance lectorale », thème de la précédente session, nous a amenés à formuler la question d'un partage de la langue, entre auteur et lecteur. La « langue du lecteur » est un des points aveugles de la théorie de la lecture. Selon le sens commun, il est entendu que « l'auteur écrit » et que « le lecteur lit ». Mais dans quelle langue le lecteur pense-t-il ce qu'il est en train de lire? La question ne s'applique pas qu'à la lecture dans une langue dite étrangère: elle vaut aussi pour tous les cas où l'écrivain et son lecteur sont supposés partager la même langue naturelle.Les théories du langage ont nommé idiolecte l'inflexion apportée par un écrivain doté de quelque originalité à la langue commune conçue comme simple outil de communication. Les grandes écritures modifient sans doute la langue du lecteur, le transformant en quelqu'un « qui a lu Céline, Proust ou Joyce ». Mais la lecture active et vraiment littéraire reconfigure le sens en produisant son propre texte, qu'on l'appelle « contre-texte » ou « texte de lecture ». Dans quelle mesure la langue du lecteur critique mime-t-elle celle de l'écrivain? N'y a-t-il, de l'écrivain au lecteur, qu'une seule et même langue à l'oeuvre dans la relation littéraire ou convient-il d'envisager des seuils séparant deux modalités de la même langue, voire trois, si l'on distingue la langue du critique, à son tour inventive, de la langue de communication courante?
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