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La narratrice, qui sort d'un deuil éprouvant (la mort de son compagnon avec lequel elle a vécu
vingt ans - il s'agit de Maurice Rheims auquel elle a consacré deux livres (Les Chapeaux de roues
et Désormais Venise) rencontre un homme de son âge (la cinquantaine) : Alexandre. Peut-elle se
libérer de son passé, peut-il changer de vie ? Elle souhaite la vie commune, elle aspire à la relation
fusionnelle, elle est possessive, jalouse, envahissante. Elle en est consciente et constate que son
comportement crée chez son amant, lui-même passionné et vif, des réactions de réticence et de
fuite, moins pour sa personne que pour ses agissements. Il finit par s'éloigner d'elle.
Elle ne tarde pas à en comprendre la cause : une autre femme, plus jeune. Ce qui aurait pu être
une banale rupture amoureuse après une brève liaison, devient l'occasion d'une réflexion profonde
sur l'illusion amoureuse, sur l'idéal, sur le réalisme dans la vie et en littérature. Car Dominique
Muller est un écrivain et qu'elle a une nature lucide, ironique, authentique. Elle va loin dans
l'introspection, dans l'auto-analyse, dans la sincérité. Elle se regarde aimer de façon possessive,
elle se regarde s'autodétruire. Elle s'interroge sur la mécanique passionnelle, sur le désir, sur le
vieillissement, sur la légèreté. Jalouse, oui, elle souffre d'être délaissée, mais elle tente de
comprendre la forme que pourrait prendre cette relation, non qu'elle accepte un ménage à trois,
mais elle accepte les incertitudes de son amant.
Ils partent ensemble en Turquie (c'est un des plus beaux passages du livre) : parenthèse poétique
où ils recréent leur amour et Dominique réfléchit à sa capacité de sublimation et d'abstraction. Ils
partent ensemble en Corse, dans la maison de Maurice Rheims, où Dominique prend le risque de
souffrir doublement (du deuil et du sentiment d'abandon par son amamnt actuel) : en effet, elle
souffre atrocement. Mais elle est bien décidée à vivre, à aimer, à se comprendre et à comprendre
entièrement l'homme qu'elle aime, jusque dans ses faiblesses.
Elle décide aussi de traquer en elle-même la femme petite, mesquine, banale. Et c'est là que se
trouve la plus belle qualité de ce livre intime : à aucun prix, il ne faut tomber dans le mélodrame,
dans l'autoapitoiement, quelle que soit la souffrance de la déception.
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