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Maren Uthaug est née en 1972 en Norvège, au divorce de ses parents elle s’installe au Danemark. « La petite fille et le monde secret » paru chez Actes Sud en 2017, a été sélectionné pour le prix du premier roman danois. Elle connait le succès avec « Là où sont les oiseaux » édité par les Editions Gallmeister, une saga familiale à trois voix. Aujourd’hui, cette même maison d’édition sort (depuis le 22/08) son nouveau bébé « 11% ».
Roman qui ne laisse pas indifférent. Le terrain de jeu se situe dans son pays de résidence, le Danemark, dans un futur lointain. Nous sommes immergés dans la période « post-Evolution », les femmes ont pris le pouvoir, les hommes, désormais, ne représentent plus que 11% de la population. Ambiance post apocalyptique, dans un décor de friche, où les habitations triangulaires ou cubiques, aux lignes cassantes, de l’ère patriarcale deviennent des ruines habitées uniquement par des marginales. Les nouveaux édifices possèdent des lignes arrondies, beaucoup plus douces.
Les hommes n’ont plus de liberté, ils sont enfermés dans des Centres, dressés par des Amazones et suivis par des médecins, ils ne servent plus que pour la reproduction encadrée ou l’amusement. Les femmes peuvent, enfin, se promener en toute confiance, même de nuit, sans la menace du « prédateur ». Il circule, du temps jadis, des histoires atroces de la domination masculine. Cet enfermement ne pouvait avoir d’autres solutions : « les hommes sont esclaves de leurs hormones, ils font tout ce que leur dicte la testostérone. On ne peut pas les élever comme des filles, leur indiquer ce qu’il y a de mieux pour la communauté. Leur sexe prend le dessus sur toute réflexion rationnelle. »
Ce roman choral s’articule autour de quatre héroïnes dont le destin s’entrecroise. Médée habite un couvent, dans la Friche, autour de la Doyenne, elle vit au milieu des oiseaux et des serpents. Mi sœur, mi sorcière, elle utilise le venin des serpents ou le sang menstruel pour des remèdes ou recettes aphrodisiaques. Wica, elle, réside dans les nouvelles habitations, c’est une prêtresse de la foi chrétienne, revisitée dans le « culte de la Mère », qui utilise les morsures de ces gentils reptiles pour entrer en communication avec le guide. Stille, jeune femme recueillie par le couvent, muette, communique avec les animaux et les fleurs. Eve, culpabilisée depuis la naissance d’avoir un sexe mâle, devenue transgenre, exerce la fonction de médecin au Centre.
Chacune de nos héroïnes nous apportent des clés de compréhension de cette nouvelle société.
Quand l’apparition d’un jeune garçon va apporter le trouble dans celle-ci, entre curiosité et dégoût.
Cette dystopie féministe, atypique, dérangeante, à dessein, nous force à nous interroger sur les places respectives des femmes et des hommes. Cette histoire, résolument provocatrice, au premier abord, mérite une lecture plus fine. Ce roman est une caricature des extrêmes, ces dames ne semblent pas véritablement plus heureuses dans ce monde ultra-féminin (pour beaucoup, l’autosatisfaction du désir ne remplace pas la plénitude d’un ébat amoureux avec un partenaire). Les questionnements, après cette lecture, nous portent à penser que la voie de la sagesse reste un compromis où chaque genre humain aura harmonieusement sa place, sans aucun asservissement. Mais le chemin reste long et escarpé, je vous le concède.
On peut louer l’esprit imaginatif de l’autrice.
Tentez cette expérience littéraire pour vous faire votre idée.
Mes chaleureux remerciements aux Editions Gallmeister pour cette découverte.
Dès les premières lignes on apprend que Nicolas, le narrateur, est issu d'une lignée de croque-morts et croque-mort lui-même, qu'il est envahi par des pulsions nécrophiles et qu'il en a honte. Et là, d'emblée, je me suis demandé si j'avais envie de me marrer, ou pas. Ou plutôt je me suis demandé si mes gloussements n'allaient pas être un tantinet démoniaques. Immédiatement ça sent l'humour noir à plein nez et j'adore ça.
Nicolas attaque par la description de ses ancêtres, puis sa mère, puis sa fille et son fils jumeaux, cette famille où visiblement tout le monde est un peu "spécial". Donc voilà qu'il nous raconte l'histoire de cette lignée de Christian, car ils se nomment tous ainsi de père en fils, jusqu'au jour où patatras, sa mère s'appelle autrement et lui aussi. Les filles s'appellent toutes Liliane, mais pas sa mère.
Il part donc du premier Christian au XIXe siècle, naufragé sur une île de Polynésie dont les habitants avaient trouvé une méthode particulière pour empêcher la surpopulation, et nous raconte la naissance de cette vocation à aider les morts à accepter leur sort, de Christian Christiansen en Christian Christiansen.
C'est bien louftingue, c'est drôle, c'est jouissif. C'est politiquement incorrect, totalement irrévérencieux et j'ai adoré, comme un tout petit qui va sortir des bordées d'injures alors que c'est interdit Hi Hi ! Car oui, on a affaire à une vraie famille de barjots ! Et malhonnêtes avec ça ! Mais ça rapporte et puis, si ça rassure les endeuillés... Et au fond ils ne sont pas vraiment malhonnêtes, puisqu'ils font du bien aux gens. Oups !
Les chapitres, qui commencent tous par un arbre généalogique, se suivent et nous parlent tour à tour de Christian I, puis Christian II, Puis III, puis IV, et Nicolas et sa mère indigne, et son père pas comme tout le monde, et on découvre la dynastie Christiansen et ses spécificités. Chaque Christian a une particularité, mais celle de Christian IV est vraiment très spéciale car paranormale, alors que Christian V, lui, est atteint d'un toc envahissant. Et que dire des Liliane ??? Pas très nettes non plus ! C'est comme si à chaque génération, les tares de la famille augmentaient d'un cran. J'ai quand-même eu un peu de mal parfois à m'y retrouver parmi tous les membres de cette famille qui, de génération en génération portent le même prénom. Ou presque.
Et puis les morts. Pas physiques, non ! Ceux qui nous entourent et que nous ne voyons pas. Ils en ont des choses à dire et à faire ! Par exemple regretter leur courte vie parfois, ou tenter d'entrer en contact avec nous, la plupart du temps en vain.
En passant on apprend des choses sur l'histoire de Copenhague, crasseuse et puante comme toutes les grandes villes autrefois, pleines de miasmes et qui empestaient la mort et amenaient des maladie, car les cadavres et les déjections polluaient tout, l'air qu'on respirait et l'eau qu'on buvait. Et les épidémies du XXe siècle, telles la grippe espagnole ou la polio. Puis plus tard la montée du nazisme avec ses idéologies nauséabondes, et la guerre, et l'après-guerre. On voit aussi à travers les décennies l'évolution du rapport à la mort.
Alors qu'autrefois on veillait les morts un certain temps, à présent on expédie et on cache ce moment difficile, comme si ne pas voir les morts faisaient disparaître la mort. Même le terme de mort fait peur aux gens. de nos jours on préfère dire "il est décédé", ou bien "elle est partie". Et l'incinération qui se répand.
Et les plats préparés, en boîte, en plein essor dans les années 60...
On assiste aux changements dans la société.
Voilà que j'ai terminé ce livre désopilant, mais aussi immoral souvent, voire amoral, avec des passages bien écœurants. Oui car la nécrophilie, c'est quand-même un sacré tabou, et heureusement ! Mais s'il n'y avait que ça de répugnant… Une vraie famille de dingues vous dis-je !!!
J'ai aimé ce roman réjouissant, bien que je l'aie trouvé très déroutant et parfois dérangeant. Je ne suis pas sûre qu'il puisse être mis entre toutes les mains, tant il évoque certains sujets vraiment prohibés, à juste titre.
Un phare octogonal : ce n’est pas banal ! C’est pourtant le cas de celui de Kjeungskjaer, au large de la Norvège (sur la commune d’Ørland)
En 1920, un homme s’y est pendu avec son chien, totalement inconsolable après la mort de sa femme bien-aimée …
En 1936, Johan y élève (à distance, puisqu’il passe ses journées au sommet du phare …) ses deux enfants : Darling (sa fille, belle et insolente) et Valdemar (son fils, à l’équilibre mental très fragile) en compagnie de Marie, son épouse (fille du pasteur) qu’il évite le plus souvent possible …
Son grand amour, c’était Hannah, qu’il n’a pas su – ou voulu – suivre en Amérique … Amour dont il ne s’est jamais remis, incapable de se décider – à temps – à l’époque, entre veiller sur sa mère et protéger son bonheur …
Aujourd’hui, la vie de Johan c’est le travail et la mer. Même si il n’a jamais pu se résoudre à renoncer à son ultime espoir de voir revenir Hannah …
Un formidable (et âpre) « nature writing », où le lecteur découvrira – au fil des 360 pages – les secrets, souffrances et regrets éternels de chacun …
Un très beau roman choral, infiniment triste ! D’une auteure danoise, indéniablement ultra talentueuse !
Avant même de connaître le contenu de ce livre, je me suis laissée séduire par la beauté de la couverture. C'est toujours comme ça avec Gallmeister, ils savent donner envie au premier regard.
Le prologue, qui se passe au phare de Kjeungskjær en Norvège en 1920, contient une violence qui laisse présager une suite éprouvante. Ce phare qui semble immuable, témoin de toutes les douleurs, tous les déchirements, est presque un personnage en lui-même, imposant, affrontant toutes les tempêtes, guidant les marins.
L'autrice nous pose tout de suite les conditions de vie de l'époque, très dures, où il faut compter avec un climat froid et une géographie difficile en bord de mer.
On découvre la triste vie de Johan, dont les parents étaient fermiers mais qui ne supportait pas de voir mourir les animaux. Johan qui aimait une femme mais en a épousé une autre. Johan qui pense avec amertume que sa vie aurait été tellement différente avec Hannah.
Hannah que les villageois considéraient comme une traînée.
Alors il a épousé Marie, pour devenir gardien de phare et subvenir aux besoins de sa vieille maman. Et toute une vie de frustrations, de quasi-solitude et de non-dits s'est profilée à l'horizon. Mais un jour, le gouvernement envoie Gudrun au phare pour s'occuper de l'instruction de Darling, l'enfant née de cette union. Avec Gudrun, jeune femme solaire, c'est beaucoup de joie qui entre dans la famille.
Le roman est scindé en trois parties. On commence avec Johan, puis Darling sa fille, qu'il a eu avec Marie, puis Marie. J'aime énormément ce type de narration car il offre des points de vue différents et c'est toujours intriguant. Dans la première partie, Darling apparaît comme une petite fille retorse et cruelle avec les animaux, qu'aucun enfant du village n'aime. Elle est même un peu inquiétante, et j'ai eu hâte de savoir ce qu'il y avait à découvrir sur elle.
Marie, elle, m'est apparue comme une femme gentille, victime des frustrations de Johan qui lui fait payer ses renoncements. Et en même temps, tout au début, elle semblait avoir quelque chose à cacher.
Dans chaque partie, bien évidemment, on est au courant de tous les secrets des protagonistes, de toutes leurs pensées, toutes leurs douleurs.
Et Valdemar, le fils, pourquoi se comporte-t-il comme ça ? De nombreuses questions ainsi que l'écriture font que cette histoire est totalement addictive.
C'est un roman qui se dévore. Il nous emmène dans des contrées froides où les gens sont durs car leur vie est dure. Ils sont taiseux. Les gens du nord ont dans le cœur le soleil qu'ils n'ont pas dehors, lalala on connaît la chanson. Mais bien souvent, ils le gardent à l'intérieur ce soleil. Ou bien est-ce l'époque qui n'était pas propice aux effusions de joie ? Toujours est-il que cette histoire est très sombre et on se prend à souffrir pour les personnages. Il y a des moments de violence silencieuse extrême, des événements très choquants.
À mesure qu'on avance dans l'histoire on se rend compte de l'importance des sons de cloche… Avoir les différents points de vue nous fait réaliser à quel point on peut être manipulable.
J'ai vraiment adoré ce roman qui nous montre l'âpreté de certaines vies et fait vraiment froid dans le dos parfois.
Je l'ai tellement aimé que je l'ai lu d'une traite.
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