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Le sujet commence à être pas mal traité, mais il n'y a finalement jamais assez de témoignage, car chacun le fait différemment, et chacun le vit aussi de manière bien différente ..
Le format est ici un petit livre de poche, avec une ou deux cases par page, en noir et blanc.
L'auteur et son amie devaient aller diner au Petit Cambodge, et finalement la flemme les fait rester chez eux, même pas le courage d'aller chercher à emporter. Ce qui leur sauvera probablement la vie.
Cependant ils vivent la fusillade de chez eux, allant dans la rue une fois les derniers coups de feu tirés.
Et voilà donc le traumatisme que l'on peut imaginer, qu'ils vont devoir affronter, alors même qu'ils ne sont pas directement blessés. Pas physiquement du moins.
On y trouve quelques parallèles avec "Après le 13 Novembre", logique. Et cela permet de comparer les problématiques rencontrées, pour finalement s'apercevoir que c'est à peu près la même chose.
J'ai beaucoup apprécié l'irritabilité de l'auteur au lendemain des attentats pour les gens, l'entourage qui continue à vivre "tranquillement" comme si de rien n'était.
N'ayant pas traversé les évènements de la même manière, je peux dire que j'ai été secoué pendant un bout de temps.
En tous cas une BD qui vaut le coup d'être lue. J'espère que cette Amélie P. va mieux…
Pour moi, l'année 2015 en France, c'est un peu comme le 11 septembre 2001 aux États-Unis. Une date qui renvoie immédiatement aux attentats, à la fin de l’insouciance, de l’invulnérabilité et à la prise de conscience : désormais, ça peut péter ici.
13 novembre 2015, Xème arrondissement de Paris. Kek passe la soirée chez son amie Amélie qui habite à côté du Petit Cambodge et du Carillon. Des coups de feu retentissent. Descendus sur les lieux, ils se retrouvent face à du verre brisé et des « corps avec des trous ». Le bilan est lourd : 13 morts, une dizaine de blessés graves, 121 cartouches tirées et des personnes traumatisées à vie. Kek et Amélie racontent les jours difficiles qui ont suivi entre désarroi, irritation, peur, dépression, stress post-traumatique...
De la colère, de la tristesse, de l’espoir : ce sont les trois émotions qui m’ont parcourue en lisant Du beau dans du moche. Les attaques, c’est aussi des victimes par ricochet : l’image de l’arbre l’exprime très bien (pages 180-181).
La réflexion autour de la phrase « même pas peur » a fait écho en moi : j’habite Paris depuis août 2016 et quand il y a un évènement sportif ou lors du 14 juillet, éclatent souvent des tirs de mortiers. Cela ressemble à des coups de feu et j’ai toujours un frisson qui me parcourt l’échine. La peur n’a pas gagné mais elle pointe quand même le bout de son nez.
Le dessin tout en rondeur de Kek suggère l’horreur : cette mise à distance habile permet d’entrer dans la BD sans être tétanisé. L’auteur a inséré deux photos de leurs amies disparues : on met un visage sur un prénom, c’est un bel hommage.
Je déteste la phrase si peu empathique « la vie continue » alors je préfère terminer sur « la vie doit continuer » pour ceux qui restent et ceux qui vont arriver.
Kek s’est engagé dans les Restos du cœur, Amélie dans un projet culturel qui s’est soldé par une expo réussie à la médiathèque Françoise Sagan. La preuve donc qu’on peut se relever en faisant du beau (après/) avec du moche !
C’est lors d’une séance de dédicace que j’ai pu échanger avec KEK sur son dernier livre.
Ce petit roman graphique de 207 pages aux dessins très simples et épurés dans un camaïeu de gris est totalement autobiographique. Il raconte que le soir des attentats du 13 novembre 2015, il dinait chez son amie Amélie qui habite près du café « Le Carillon ». Ils ont entendu les coups de feu sans savoir ce que c’était. Lorsqu’ils ont réalisé ce qui c’était passé, ils sont descendus porter secours aux blessés.
Tout le roman porte sur l’après : le traumatisme, la colère, la peur, l’extrême vigilance, le sentiment de solitude, l’errance médicale qui transforment le quotidien en tragédie. Le procès des attentats en 2021 a réveillé les démons endormis mais le projet auquel se raccrochait Amélie et auquel il va participer lui a permis de commencer à écrire sa propre histoire.
L’auteur m’a confié que ce livre était pour lui une façon de répondre au plus grand nombre à la question qui lui était si souvent posée : « Tu y étais toi le 13 novembre ? » Il a dessiné pour ne plus avoir à raconter. Ce roman graphique est une sorte de psychothérapie, il lui a permis d’ exprimer tout ce qu’il a vécu pour l’exorciser. Ils furent avec Amélie des victimes collatérales, mais pour elle, le choc post traumatique fut plus profond et la reconstruction bien plus lente. Comme elle gardait toutes les boites de ses anti dépresseurs et anxiolytiques, elle émit le projet de les faire décorer par des artistes et de les exposer…histoire de faire « du beau avec du moche » !
Voici un petit ouvrage poignant qui, sans tomber dans le pathos, exprime bien le traumatisme vécu par tous ceux qui étaient au plus près des attentats sans en être véritablement les victimes. Ils furent « des dommages collatéraux » très souvent laissés pour compte.
En fin de 1ère partie, KEK rend un émouvant hommage à leurs amies Fanny 29 ans et Claire 34 ans , toutes deux tombées lors des attentats, en insérant des photos de ces deux jeunes femmes qui avaient la vie devant elles.
C'est par hasard que Kek se retrouve à distribuer des repas avec les restos du coeur. En effet, son collègue lui propose de l'accompagner, car ils manquent de bénévoles pour le soir-même. Kek saisit cette opportunité avec plaisir, et c'est alors qu'une expérience des plus enrichissantes commence.
Dans ce roman graphique témoignage, l'auteur nous relate toute son expérience : des distributions de repas, aux maraudes, en passant par la confection des plats, la collecte des dons alimentaires, et d'autres aides que, personnellement, je ne connaissais pas.
Kek se rend compte à quel point cela pourrait arriver à chacun d'entre nous d'avoir besoin de cette aide alimentaire, et que ce n'est en rien honteux.
A certains moments, il éprouve quelques réticences, mais l'expérience est tellement enrichissante humainement, qu'il est difficile pour lui de limiter son engagement. On le voit d'ailleurs à travers les différents portraits de personnes qu'il croise (bénéficiaires et bénévoles). Des portraits très touchants emplis de tendresse.
Je ne peux que conseiller la lecture de cet album, qui dépeint très bien la réalité des bénévoles et des bénéficiaires ; Kek a su raconter cela avec sincérité et humanité. En plus, « la totalité des droits d'auteurs et de la marge de l'éditeur provenant de la vente de cet album est reversée à l'association Les Restos du coeur » !
J'sais pas vous, mais moi ça me donne envie de faire comme Kek, et de découvrir ce merveilleux coin d'humanité.
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