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« A propos de ce livre, on parlera de Swift, de Rabelais, de Cervantès, de Dickens, pas moins… Une farce grouillante et grandiose digne de Falstaff. »
Pulitzer, quand même !...
Et j’arrive là, après avoir lu tout ça sur la quatrième de couverture, après avoir vu des avis plus que favorables pour annoncer que je n’ai pas aimé.
Dans la liste des « conjurés », c’est sûr que je vais obtenir une carte à un chiffre !
Voilà un ouvrage rempli de bons mots et de situations loufoques avec un personnage principal dont l’épaisseur n’est ni psychologique, ni tragique, ni comique, mais physique. Pourquoi pas ? C’est une bonne idée, amusante et originale pour un anti-héros qui a de l’allure. Mais à mon avis, l’exercice trouve assez rapidement ses limites. Pour être franc, je me suis ennuyé, cherchant en vain une intrigue, un dénouement, une chute, une surprise. De penser que toutes les critiques dithyrambiques sont le fait de « conjurés » heureux, je me garderai bien. Les « conjurés » doivent être ceux qui, comme moi, ont poussé un soupir de soulagement à la lecture de cette phrase : « Saisissant la natte dans une de ses grosses pattes, il la pressa chaleureusement contre sa moustache humide. » Ils n’en ont pas apprécié le phrasé, le rythme, la sonorité ou la construction mais ils ont salué, comme le marathonien amateur épuisé franchissant la ligne d’arrivée, le point final. J’ai bien tenté, passé la mi-course, de me faire aider de Fats Domino, le musicien le plus célèbre de la Nouvelle Orléans, rien n’y fit, je l’avoue piteusement.
L’ensemble ne m’ayant pas semblé particulièrement drôle, au-delà de quelques situations et assertions, j’y ai cherché et trouvé, je crois, quelques satires. Peut-être celle des péquenauds de Louisiane, des étudiants attardés qui n’étudient que pour continuer à glander et qui se transforment en activistes lorsqu’on finit par leur expliquer qu’ils ont passé la limite d’âge pour s’asseoir dans un amphithéâtre ; ou celle des profs de fac qui n’enseignent pas grand-chose, juste assez pour séduire une étudiante ou deux et faire bouillir la marmite ; celles, encore, des patrons qui ne dirigent rien en se contentant de vivre sur la bête, des employés qui en font le moins possible, des policiers qui n’ont pas inventé le fil à couper le beurre et des « artistes » de music-hall qui ne proposent que des attractions de gargotes.
N’ayant jamais entendu parler, avant cette lecture, de Boèce, ce philosophe latin abondamment cité par Ignatius, (joli prénom dont la correspondance française est Ignace), je dois ranger aux mérites de ce roman de n’être plus ignare (à ne pas confondre avec Ignace) sur ce point. Et en m’inspirant du professeur Talc du roman qui dirige un cours sur les rois légendaires d’Angleterre et… « qui s’était taillé une réputation d’humoriste sarcastique dont les généralisations aisément assimilables faisaient, en particulier, le bonheur des étudiantes et aidaient à dissimuler son ignorance dans tous les domaines et plus particulièrement dans celui de l’histoire d’Angleterre », si je ne jure pas de me jeter immédiatement et à corps perdu dans la lecture du chef d’œuvre de Boèce :« La Consolation de Philosophie », celui que la patronne de cabaret utilise pour se donner un genre en prenant la pose (ceux qui ont lu auront décrypté)… je promets solennellement à mes prochains convives d’égayer leur repas en leur vantant les mérites de ce bon vieux Boèce ainsi que ceux de cette Conjuration dont, à un moment ou à un autre et à notre corps défendant, il faut bien reconnaître que nous sommes tous.
C'est le livre que j'aimerais sur une île déserte si on me faisait la mauvaise blague de ne m'en laisser prendre qu'un. D'une grande noirceur, d'un cynisme terrible, et d'une drôlerie fabuleuse. Le personnage est une légende. Gros, sale, souvent méchant, asocial, déplacé, incongru, délirant. On ne s'y identifie pas, on ne le trouve pas sympathique. Mais c'est Raskolinok aux States au 20ème siècle, raconté par une sorte de super- Woody Allen qui aurait réussi à être Ibsen, et drôle en même temps.
Chef d'oeuvre absolu.
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