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Ce petit livre retranscrit un entretien entre Nicole Malinconi (autrice belge) et Frédérique Dolphijn (cinéaste, comédienne, écrivaine belge). Le dialogue se noue autour de mots, choisis par F. Dolphijn et piochés au hasard par N. Malinconi (mémoire, écrire, créer, ailleurs,…), à charge pour cette dernière de nous livrer ce qu’ils évoquent pour elle. Cette méthode amène N. Maliconi à parler avec sensibilité et sincérité de son travail d’écriture, du réel qui l’inspire, de l’effort sans cesse renouvelé que représente le fait de s’installer devant une page blanche alors qu’il y aurait 1000 autres choses à faire, de la difficulté et de l’impuissance à exprimer la réalité avec des mots (« le mot ne dit pas tout »), et malgré cela, de son besoin d’écrire : « j’écris parce que le besoin d’écrire est en moi, comme si c’était le lieu où créer est possible ».
La démarche éditoriale est intéressante et permet d’avoir un aperçu de l’univers personnel de l’autrice interrogée. Mais je pense que ce (type de) livre serait plus agréable à écouter qu’à lire, parce qu’il retranscrit tels quels les propos tenus oralement par Nicole Malinconi, avec leurs hésitations, leurs inachèvements, leurs points de suspension, ce qui ne rend pas nécessairement le texte fluide à lire. L’écrit ne dit pas tout de ce que l’on pourrait percevoir à l’écoute…
En partenariat avec les Editions Esperluète (que je remercie pour le marque-page et les affichettes) via une opération Masse critique de Babelio.
Jeudi, vendredi : Olivia, Sophie, Georgia, Fanny, Lucie vaquent à leurs occupations. L’une s’agite pour sa campagne électorale, l’autre fabrique des cadres dans son atelier, une troisième se bat pour que son mari garde les filles ce week-end.
Elles sont les Women Fly Fishing et vont se retrouver comme d’habitude au chalet de pêche. Elles ne louperaient ce rendez-vous pour rien au monde ! Enfin une pause pour oublier un quotidien pas toujours terrible, des soucis qui vous rongent l’âme, lentement mais sûrement….
Pêcher, ça vide la tête. Elles en ont besoin ! Ah, le grand air ! Et puis, on rit avec les copines…
Enfin toutes réunies ! Ouf ! Elles déballent leurs affaires et s’installent au chalet. Le week-end peut enfin commencer. « Elles entrent dans un autre rythme, un autre temps, un autre espace. Il y a quelque chose de fascinant à les voir se transformer, comme lorsque l’on se prépare pour un bal masqué ou une première d’opéra. »
La rivière gronde, « les herbes hautes, les graminées éparses, les amorces de digitales et d’épilobes frôlent les jambes et le bord de l’été. »
Se taire, s’imaginer « algue au fond de l’océan se laissant traverser par la fluidité de l’eau », oublier qui l’on est, se laisser porter…
Georgia murmure « Vous devez devenir eau, vous devez devenir poisson, vous devez devenir ciel et rivière. »
Silence.
« Le temps plane au-dessus des flots. Il y a de la grâce, il y a de la magie. Les soies dessinent des arabesques. Une écriture s’inscrit dans les airs, des hiéroglyphes racontent. »
Mais l’apaisement ne vient pas.
« Les solitudes rôdent les unes collées aux autres. »
Les non-dits, les violences contenues, les mensonges étouffés, les souffrances tues et refoulées refont surface. Olivia vomit. Fanny détourne le regard. Le bruit de la tronçonneuse « la percute, la déchire », Georgia pense à son fils. Elles pleurent, dissimulent leurs blessures et leur haine…
« La nuit, elles rêvent d’assassinats, de tortures, elles trouent le corps des autres, elles les lacèrent. »
La tension est de plus en plus palpable. « Un coup de tonnerre, proche. »
Comment trouver les mots pour traduire les émotions que j’ai ressenties à la lecture de ce livre ? L’écriture poétique et sensuelle m’a littéralement envoûtée, je me suis sentie intimement liée à ces femmes, dans leurs douleurs intimes, leur solitude profonde au milieu de cette nature à la fois apaisante et hostile. J’ai fait corps avec elles. La tension m’a tenue jusqu’au bout, prisonnière que j’étais du drame imminent, pressenti et redouté.
Un texte vraiment éblouissant, accompagné de références musicales dans les marges pour un plaisir total, absolu…
SUPERBE !
Retrouvez Marie-Laure sur son blog: http://lireaulit.blogspot.fr/
Cheyenne et Abeille, quels drôles de prénoms pour ces deux sœurs (jumelles ?) ! D’ailleurs Granny s’est posé la question.
Abeille, professeur de braille, légère, virevoltante, éthérée, bénéficie d’une écriture plus primesautière. Cheyenne, infirmière, ancrée dans la réalité, est écrite en des termes plus solides. Et si tout ceci n’était qu’apparence, illusion ? Et si c’était l’inverse ?
Derrière tous ces mots, toutes ces phrases, il y a une grande tristesse, beaucoup de fragilité. La cassure ? Le décès de leur mère et d’autres fêlures.
Dans ce livre, pas de chronologie, mais des billets comme ceux que les deux sœurs pourraient s’écrire. Beaucoup de retours en arrière, non pas vers leur mère, mais auprès de Granny la Grand-mère. Cheyenne et Abeille sont des femmes entières, emplies de leur monde fait de tendresse, de sensualité, de sexualité.
Au début de ma lecture, j’ai essayé de résister et je ne comprenais plus ce que je lisais. Alors, j’ai décidé de lâcher prise, de voguer au rythme des mots, des phrases et là, je suis entrée dans l’univers de Frédérique Dolphijn. Les dessins d’Annabelle Guetatra, nus aussi impudiques que simples, naïfs, soulignent les paragraphes.
Un livre inclassable, plein de poésie, de mots doux, au rythme langoureux. Les madeleines du passé construisent le chemin qui les mène vers l’amour. Un livre, Objet Poétique, hors des sentiers battus.
Les éditions Esperluète publient des textes et des images, réunissent des écrivains et des plasticiens, produisent des livres et les diffusent... Le monde des éditions Esperluète est très bien défini par cette phrase, trouvée sur la page de présentation de leur site. Une maison d’édition, très attrayante, que je ne connaissais pas.
Maintenant ce livre va poursuivre son chemin vers d’autres lecteurs. Je l’aurais bien gardé pour pouvoir le relire, le re-feuilleter, le caresser.
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