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Voici une novella de Frank Harris (auteur que vous connaissez peut-être pour son roman « La Bombe », Prix Mémorable 2015 – et si ce n’est pas le cas, vous ratez quelque chose) qui nous amène à Kansas City, fin du 19ème.
Le grand magasin de tissu Boulger est une institution dans la ville. Pourtant depuis quelque temps son propriétaire connait de grosses difficultés financières. La concurrence, longtemps inexistante, lui mène la vie dure. Ses stocks sont gigantesques et la mode change. Sans compter que sa femme et ses trois filles mènent grand train. Son employé Tryon a bien quelques idées sur la façon de redresser la barre mais la situation est urgente. Il n’y a plus le temps, la faillite guette. Il suffirait d’un incendie pour que tous les problèmes disparaissent. Une bonne arnaque à l’assurance et le respectable Monsieur Boulger serait tiré d’affaire. Les deux hommes vont s’associer pour commettre ce crime, car si Boulger veut éviter la déchéance, Tryon lui a de l’ambition. Leur plan ne va pas totalement se dérouler comme ils le pensaient…
Frank Harris met en scène un duo - le vaniteux et l’ambitieux, le grand patron et le petit employé – bien décidé à réussir. D’une écriture délicieusement classique, l’auteur manie finement l’ironie et dresse une satire de la société américaine de son époque. 95 pages et une conclusion qui laisse chaque lecteur tirer sa propre morale de l’histoire. Bijou.
Une histoire poignante, celle des travailleurs migrants aux Etats-Unis et de leurs conditions de vie misérables dans ce Nouveau Monde peu humain. Nous sommes à la fin du XIXème siècle, et le destin de ce jeune Rudolph Schnaubelt, allemand d’origine, fraîchement débarqué à New York, va le conduire vers la lutte des travailleurs pour leurs droits. C’est le début du syndicalisme, comme partout ailleurs dans le monde. J’ignorais complètement cet épisode de l’histoire, et j’ai beaucoup appris en lisant ce livre de Frank Harris, publié en 1908 et dont la traduction française ne date que de 2015. La description de la construction du pont de Brooklyn est glaçante, avec ces jeunes, pour la plupart, obligés de passer par des caissons de compression qui les immergent au fond de l’Hudson. Le personnage de Louis Lingg, cet anarchiste que Rudolph suivra jusqu’au bout, est fascinant. En voyant sa photo sur le net, on peut voir un jeune homme qui semble sûr de lui, et il est facile de l’imaginer aller jusqu’au bout de ses convictions et de sa soif de justice sociale. Un roman fort, basé sur des faits réels, qui mériterait, sans doute, une adaptation cinématographique.
« Nous serons sans doute méprisés et traînés dans la boue par les hommes, du moins pendant un certain temps, parce que nous serons jugés par les riches et les puissants, et non par les pauvres et les humbles, pour lesquels nous avons fait don de nos vies. »
Ce livre, écrit en 1908, revient sur les événements de Haymarket à Chicago en 1886. Ce jour là, à la fin d'un rassemblement ouvrier alors que les forces de l'ordre font une nouvelle fois preuve de violence pour disperser la foule, une bombe explose tuant huit policiers.
Très vite un certain nombre d'arrestations vont avoir lieu dans les milieux socialistes et anarchistes. Très vite aussi un simulacre de procès condamnera à mort sept hommes dont Louis Lingg, militant charismatique des droits ouvriers.
Frank Harris, journaliste et écrivain, transforme ces faits bruts en un roman qui donne la voix à celui qui serait le véritable lanceur de bombe: Rudolph Schnaubelt. Ce jeune homme cultivé et sûr de lui vient d'arriver d'Allemagne. Prêt à conquérir l'Amérique il va très vite devoir abandonner ses rêves de journalisme pour gagner sa vie. Il découvre alors la condition des travailleurs étrangers, exploités, sous-payés. Leurs tentatives de protestation sont constamment réprimés par la police. le sentiment d'injustice engendré conduit à la création de comité socialistes, communistes, anarchiques. C'est là qu'il rencontre Louis Lingg.
Une lecture passionnante qui ne pouvait que me plaire. Avec « la bombe » Franck Harris s'inscrit dans la littérature prolétarienne et soulève la question de la violence dans les luttes sociales et politiques. Quelle est la voie la meilleure, la révolte ou la soumission ?....
La bombe de Haymarket mit fin (pour un temps) aux violences policières contre les travailleurs. Elle contribua à l'adoption de la Charte des enfants et à la création du 1er mai.
Traduit par Anne-Sylvie Homassel
Kansas City, dix-neuvième siècle. La soif de grandir, les self-made men, le pays de toutes les possibilités… Les villes s’agrandissent, les commerces fleurissent
Monsieur Boulger, est le patron d’un grand magasin de tissus, un des premiers à s’être installé et gère son magasin de façon pépère. Oui, mais voilà, la concurrence fait rage et les nouveaux magasins attirent le chaland parce que Boulger n’a pas su saisir le train en marche, la mode change, et les chiffres sont de plus en plus mauvais. Cela marchait bien, alors pourquoi changer. Et puis, madame a un train de vie à assumer.
Pourtant ce n’est pas faute de l’avoir prévenu, surtout le jeune David Tryon ; les chiffres qu’il donne à son patron sont mauvais, de plus en plus mauvais.
David Tryon est un self made man. Il est entré en bas de l’échelle dans le magasin pour en grimper les barreaux grâce à son travail, son assiduité, sa volonté… bref, un travailleur acharné. C’est bien simple, il est encore au boulot à dix heures du soir.
Tryon lui propose des solutions comme les soldes pour éponger le stock énorme, mais le boss ne veut rien entendre c’est qu’il a sa petite idée le bougre, une idée radicale ; incendier son magasin. Mais bon, on est le patron ou pas… Il ne va pas se salir le revers de la veste et puis, il vaut mieux qu’il ne soit pas là, des fois que, les assurances et leurs enquêtes…. Un petit peu couard le patron à moins que ce ne soit son statut qui l’empêche de se pencher sur les propositions honnêtes de Tryon.
Toujours est-il que, malgré une éducation rigide, son honnête, sa conscience, qui sait qui va s’y coller ?... Tryon bien sûr. Comment l’appâte-t-il ? En lui faisant miroiter un mariage avec sa fille dont il connait l’inclinaison pour David et vice-versa, une position sociale, un intéressement. Il sait y faire le patron, se disant que tout peut changer…
Sérieux et besogneux, Tryon choisit son temps et son heure sans en parler à personne, même pas à sa mère. Tout est prévu, le feu prend, Tryon est au café devant une bière et là, le hic, l’imprévu, le non-envisagé se produit. Le grain de sable noir qui fera de Tryon un héros, mais il faudra qu’il vive toute le restant de sa vie avec ça, sans jamais pouvoir en parler. Une punition non pas divine, mais terrible.
Frank Harris, tout au long de ce court roman ou nouvelle, manie l’ironie avec classe et délectation pour mon plus grand plaisir. Pas ou plutôt, plus de morale. Le patron est dédommagé par les compagnies d’assurances, l’employé » paiera toute sa vie durant. Le gros mange le petit, le petit subit, même s’il épouse la fille. Il passera sa vie en compagnie de ce beau-père qui a barre sur lui car, après tout, il n’y a rien d’écrit, la demande de foutre le feu est orale, rien, Tryon est doublement prisonnier. Voilà la morale de l’histoire : le gros mange toujours le petit.
La fin du livre « Un héros ? Si tous les héros avaient été comme… » est cynique, au lecteur de continuer… Ou pas.
Un petit livre qui se lit d’une traite, court, mais qui en dit long.
Belle découverte chez « La dernière goutte »
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