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Henry Miller est né au mitan de la journée du 26 décembre 1891, à New York. Fils d'un tailleur, Heinrich, et de Louise, femme puritaine, psychorigide et autoritaire. Très vite, Henry s'ennuie, il flâne et lit beaucoup, ce qui n'est pas bien vu dans son milieu. C'est dans les livres qu'il découvre son attrait pour la France et Paris : Rimbaud et Rabelais le fascinent. En attendant, il trouve des boulots, s'y ennuie, se marie, divorce, fréquente June Mansfield et l'épouse. C'est elle qui le poussera à écrire et qui lui paiera le voyage jusqu'à Paris ainsi que lui donnera quelques sous pour y vivre. De 1930 à 1939, Henry Miller vivra à Paris, y croisera Brassaï, Céline, Cendrars... et surtout Anaïs Nin. Ils se rencontrent, s'aiment et s'encouragent tous les deux à l'écriture. En 1934, sort Tropic of cancer, son premier livre, traduit en français une dizaine d'annés plus tard.
François-Xavier Freland fait revivre Miller à Paris et Miller en gestation. C'est à Paris qu'il deviendra un écrivain. Ce n'est pas une biographie qui narre tous les faits et gestes de l'auteur, mais un portrait à un moment donné : les années 30 à Paris. La seconde partie, plus courte évoque les années suivantes et le rapport qu'entretenait l'écrivain avec la France et Paris : ses allers-retours, ses écrits...
L'essai est court et abondamment illustré d'extraits de livres ou de lettres de Miller et quelques autres qui ont écrit sur lui, comme ses proches : Anaïs Nin, Blaise Cendrars, Brassaï ou Alfred Perlès. Ceux-ci sont inclus dans le texte à la fois exigeant et accessible de FX Freland et s'y coulent parfaitement. L'exercice n'a pas dû être simple que de faire coller ces extraits dans sa propore prose, mais l'auteur lui-même belle plume, le fait sans que l'on sente la difficulté. Tout est fluide.
Sans faire l'impasse sur ses frasques, sur son amour des femmes, FX Freland ne s'arrête pas à cela. En son temps, certains l'ont traité de pornographe -il y a d'ailleurs eu un procès en France contre lui pour ce motif et son Tropic of cancer a été interdit aux USA jusqu'en 1961-, mais c'est évidemment très réducteur. On assiste à la naissance d'un écrivain qui influencera bon nombre d'autres, qui libérera l'écriture, un peu comme Céline l'a fait en France, permettant au langage oral une percée remarquée dans le roman. Plus largement, il sera cité par des chanteurs, des écrivains, des artistes de la beat generation, des hippies... et tellement d'autres.
De retour aux USA pendant la guerre, Miller n'aime pas ce qu'il y voit : "L'Amérique change à vitesse grand V. L'industrie de l'armement tourne à plein régime, le pays devient lentement La puissance. Les buildings s'imposent, écrasant les maisonnées. Le bonheur est vertical à en avoir la nausée." (p.136) Lui l'adepte d'une vie simple, anticonsumériste, écolo lorsque l'on ne parlait pas encore d'écologie devrait être (re)découvert par tous en ces temps où la planète va mal. Ce n'est pas la seule raison, mais c'en est une bonne.
Court roman sur la naissance d'un amour, d'un couple, les premiers moments idylliques, puis les premières tensions et incompréhensions et divergences. La différence d'âge, d'éducation, la notion de couple, de liberté viennent alimenter les conversations ou plutôt les disputes.
François-Xavier Freland bâtit son roman avec de courts chapitres, très ancrés dans la société actuelle : "... on dirait que l'urbanisation avance inexorablement, même ici, comme une sorte de rouleau compresseur, une île après l'autre. Je n'aime pas cette modernité uniformisée, Antoine. Je déteste ce monde que l'on construit, pour toujours plus de confort, plus de sécurité, de divertissement." (p.32) Ses deux héros s'interrogent sur eux, sur leur relation mais aussi sur l'état du monde et sur l'avenir, le leur, mais aussi plus largement. Et ils ne sont pas très optimistes ni pour l'un ni pour l'autre, tout en gardant espoir.
Ce très beau texte questionne le couple et la relation amoureuse qui pourraient être un socle dans ce monde qui va mal. Il peut permettre d'avancer, de rester soi-même dans un monde qui s'uniformise : "Mais ce qui m'étonne le plus, c'est le mimétisme, cette façon que la société a de nous imposer ses codes, de vouloir nous donner les clefs du bonheur. On dirait qu'il n'y a plus aucune place pour l'instinct, l'intuition, la découverte. Tout est bordé."(p.44) Et si c'était dans la relation à l'autre que l'on trouvait la force de se singulariser, de rester soi-même, de ne pas céder au conformisme ambiant ? Cultivons notre différence, c'est une phrase que j'aime bien, que je répète sans cesse aux ados qui sont à la maison et que j'essaie d'appliquer quotidiennement.
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