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1969 : Albert Speer, architecte favori et Ministre de l'armement d'Hitler, publie ses Mémoires. Revisitant son passé, de ses mises en scène des congrès nazis à la chute du Reich, il parachève l'ultime métamorphose qui a sauvé sa tête au procès de Nuremberg et va faire de lui la star de la culpabilité allemande. Affirmant n'avoir rien su de la Solution Finale, il se déclare "responsable, mais pas coupable." Les historiens auront beau démontrer qu'il a menti, sa version de lui-même s'imposera toujours.
Comment écrire sur un homme qui a rendu la fiction plus séduisante que la vérité ?
A l'heure des fake news et de la guerre des récits, voici le roman d'un des plus grands mensonges de l'Histoire. Traquant les scènes de la vie de Speer, s'interrogeant sur leur vraisemblance, éclairant certains aspects, allant là où il s'arrête en convoquant les acteurs capitaux d'après guerre, notamment l'historienne Gitta Sereny, l'auteur propose une lecture vertigineuse de celui à qui l'un de ses collaborateurs affirmait : « Savez-vous ce que vous êtes ? Vous êtes l'amour malheureux du Führer ».
Comment cet homme, l’architecte d’Hitler, son ministre de l’armement a t’il réussi à convaincre au procès de Nuremberg, puis auprès de l’opinion public qu’il n’était pas au courant de la solution finale, de l’extermination de tant de juifs ?
Comment une telle pirouette est-elle possible ?
Il a reconnu une responsabilité collective mais pas individuelle…..
Albert Speer, lui le favori du Führer, comment peut-on imaginer qu’il ne savait pas ? Essayait il de s’en convaincre en fermant les yeux sur les atrocités ? Peut-être que s’il n’était resté que l’architecte privilégié d’Hitler aurions nous pu le croire éventuellement….. mais son ministre de l’armement c’est inconcevable !
Comment peut-on réussir à manipuler l’opinion tant d’années ? La communication se travaille mais suffit il de se convaincre d’un sujet pour en parler de manière aussi affirmative ? Les historiens n’auront cessé de montrer qu’il a menti, qu’il savait, mais sa prestance, son physique, sa voix calme et maîtrisée, sa situation familiale l’auront remporté pour une partie de l’opinion publique et des journalistes, un bon nazi….
L’auteur aborde parfaitement l’histoire d’Hitler et de Speer, d’abord avec un point de vue historique avec la rencontre, les œuvres de l’architecte, la montée en puissance du nazisme, la guerre, les liens entre les 2 hommes faisant de lui un proche du Führer puis une seconde partie avec le point de vue d’une historienne, jusqu’à la fin avec une analyse passionnante !
J’avoue qu’au début du livre, je ne comprenais pas vraiment où l’auteur souhaitait nous emmener, un livre sur l’histoire des nazis ? Pas du tout, l’auteur nous interroge sur le rôle des historiens, de la communication, la manipulation médiatique, le pouvoir des mots….
Passionnant !
Des hauts dirigeants du IIIe Reich, il est celui qui s’en est le mieux sorti, échappant à la peine de mort à Nuremberg en reconnaissant sa responsabilité collective, mais pas individuelle. Après vingt ans de prison, la publication de ses mémoires en a fait une star si estimée qu’une historienne a pu dire qu’« aucun survivant connu de la Shoah ne possède une telle aura auprès des foules et des spécialistes. »
Comment cet Albert Speer, principal architecte au service du parti nazi, puis ministre de l’Armement et de la Production de Guerre, si proche d’Hitler que l’un de ses collaborateurs lui avait un jour lancé : « vous êtes l’amour malheureux du Führer », a-t-il si bien pu imposer sa propre version de la réalité historique, retournant l’opinion publique et les juges en sa faveur ? Alors qu’il a fini un jour par admettre qu’il savait, et donc qu’il était complice de l’Holocauste. Qu’il se déclarait très fier de son parcours : « Après tout, J’AI ÉTÉ l’architecte d’Hitler. J’AI ÉTÉ son ministre de l’Armement et de la Production de guerre. J’ai passé VINGT ANS à Spandau et en sortant, J’AI FAIT une nouvelle bonne carrière ! Pas si mal tout compte fait, non ? » Et que, sans mauvaise conscience aucune, il continuait à se déclarer « Flatté ? Flatté ? Mais non ! Ivre de joie ! » à propos de ses liens privilégiés avec Hitler.
Détricotant patiemment l’auto-fiction concoctée par Speer, le romancier Jean-Noël Orengo s’emploie à lui rectifier le portrait au fil d’un récit documenté et vivant qui souligne une personnalité ambiguë et troublante, narcissique et totalement amorale dans son opportunisme sans limite. Au-delà des faits, ce sont les ressorts psychologiques que l’auteur s’efforce de creuser, mettant en exergue un duo Hitler-Speer étonnamment affectif et, au final, une incroyable séduction manipulatrice. Speer semble ne jamais souhaiter de mal à personne, juste se faire du bien en visant toujours plus de pouvoir et de reconnaissance personnelle, peu importe les moyens. De fait, les « à-côtés » de sa valorisante relation privée avec Hitler n’ont aucune incidence sur lui. Tout entier à son objectif personnel que l’on associe assez bien à de une forme de réassurance affective, peu lui chaut la « politique » et le sort des Juifs. Il est l’artiste face au guide, le fils face au père, qu’importe les tiers. Si bien persuadé de sa bonne conscience qu’il convaincra le monde en un ultime et inconcevable tour de passe-passe, acte de séduction suprême du bourreau face à ses victimes, ces dernières ne demandant peut-être qu’à se raccrocher au moindre fétu d’apparente humanité dans cet océan de barbarie.
Puissante réflexion sur la réalité historique et sur ce que choisit d’en conserver la mémoire, ici celle d’un homme mais aussi celle de toute la société, cet essai qui se lit avec la même fluidité qu’un roman, aussi fascinant que dérangeant, débouche au final sur le terrible constat de la relativité du bien et du mal, quand leur perception s’avère si changeante et subjective et que le mensonge le plus visible finit par s’avérer plus séduisant que la vérité la plus évidente. Le mal a de telles ruses que « le pessimisme devient la seule sagesse ». Coup de coeur.
Jean-Noël Orengo présente son nouveau roman "Vous êtes l'amour malheureux du Fuhrer", qui reprend le récit d'Albert Speer et l'ausculte à la lumière de l'Histoire.
L‘architecte Albert Speer (1905 -1981) fut un proche d'Hitler même si sa biographie, parue en 1969, a complètement minimisé ses liens. Il ne restait plus de survivants potentiellement susceptibles de lui rappeler son passé. Alors, Speer raconta ce qu'il voulait.
Il fut quatorze ans dans les arcanes du pouvoir nazi. Architecte de la première construction en l'honneur du "Guide", comme il le surnomme Albert Speer, La Zeppelinfield à Nuremberg illustre parfaitement le "talent" du national-socialisme.
Cette architecture de lignes verticales massives avec ce svastika encerclé illustrera le pouvoir nazi à jamais dans l'histoire, comme un péplum de très mauvaise facture. Il a créé de toutes pièces le décorum faisant encore partie de nos représentations actuelles. Il imagina une ville Germania, rassemblant toute la démesure nationale nazie. Nomme Ministre des armées,
Il mit ses architectes au service de la guerre totale. Il utilisa des hommes emprisonnés des camps de concentration pour les usines souterraines planifiées par son Führer et ses généraux.
Accusé au procès de Nuremberg en 1946, il échappera à la peine de mort et a purgé la totalité de sa peine de vingt ans. À sa sortie, ses mémoires furent un best-seller, où il prônait comme à son procès.
Seulement la question fondamentale reste de savoir à quels moments Albert Speer a eu conscience de l'extermination de masse mise en place par le régime nazi ? L'argumentaire de Speer lui-même dans ses écrits, ses interviews, au procès de Nuremberg et après fut toujours d'endosser "la culpabilité collective et de l'innocence individuelle".
L'hypothèse de Jean-Nöel Orengo est que Speer s'est inventé le récit de sa vie dans ses mémoires. À partir des documents, il expose les éléments de cette mise en scène entre l'attirance réciproque de l'homme de pouvoir pour l'artiste. À l'image de Jules II et Michel-Ange, Albert Speer a surfé sur ce couple de légende pour justifier cette relation très particulière qui fit dire à un de ses subalternes "Vous êtes l'amour malheureux du Führer".
Le détail du travail d'historien de Gitta Sereny, autrichienne et juive ayant fui aux États-Unis, y est relaté. Pendant près de dix ans, elle suivit Speer lui-même vers les années 70. Jean-Noël Orengo analyse et décortique, présentant une intéressante réflexion sur l'historien et son sujet d'étude.
Ce récit résonne aujourd'hui. Où est la vérité ? De quelle manière, est-elle manipulée ? Albert Speer l'avait bien compris. Du moins, Jean-Noël Orengo soutient cette thèse.
Difficile de penser qu'un proche du Führer n'ait rien su. Seulement, le récit servi au procès évita à Speer la peine capitale et lui permit de vivre tranquillement, adulé même, après son emprisonnement. Évidemment, le vertige envahit le lecteur...
En décortiquant les arguments d'une autofiction inventée, Jean-Noël Orengo illustre les conséquences de la falsification de la vérité, tellement reprise actuellement. Mais, c'est aussi une véritable réflexion littéraire que Jean-Noël Orengo livre sur autofiction et réalité et autofiction et Histoire.
Chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2024/09/16/jean-noel-orengo-vous-etes/
Bien sur il fait parti de ma bibliothèque je l ai acheter ,car j ai très envie de découvrir cette histoire du führer, il a tellement de profils différents, qu on n arrive pas à le cerner ,après tout se qu il a fait ,on découvre tellement de facettes de cet homme horrible
« Vous êtes l’amour malheureux du Führer » est la phrase qu’un des collaborateurs d’Albert Speer, Karl Maria Hettlage, lui lança suite à la très forte relation intimiste qui le liait à Adolf Hitler, bien avant le début de la Seconde Guerre Mondiale.
Ce Karl Maria Hettlage, officier SS, juriste, a été chargé de l’expulsion des Juifs de Berlin (autant dire leur mort) pour la construction de futurs bâtiments. Après la guerre, il devint secrétaire d’Etat aux Finances de la RFA où, ironiquement, il gérera les dossiers d’indemnisation des victimes d’expériences médicales dans les blocs d’expérimentation des camps de la mort.
Albert Speer, lui, fut un des favoris du cercle restreint des intimes du Führer au même titre que Goering ou Himmler. Issu d’une famille bourgeoise, son grand-père et son père eux-mêmes architectes, il se vit confié par Hitler son projet mégalomane d’une avenue pharaonique à Berlin, à la gloire du Troisième Reich.
Il devint par la suite ministre de l’Armement durant la guerre. Malgré cette haute fonction, il prétendit, lors du procès de Nuremberg, ne rien savoir quant à la Solution finale, ce qui lui permit d’échapper à la peine de mort. Il se déclara « responsable, mais pas coupable ». Condamné à « seulement » 20 ans d’emprisonnement pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, il maintint ce discours dans ses mémoires, parues en 1969, sous le titre, « Au cœur du Troisième Reich », qui fut un best-seller en Allemagne.
Ce positionnement a été, à maintes reprises, démenti par plusieurs historiens. Pourtant, Albert Speer devint une star invitée sur de nombreux plateaux télé. L’auteur Jean-Noël Orengo revient sur cette mascarade orchestrée par l’un des plus grands menteurs que le monde eut connus.
Revenant sur ces « fameuses » mémoires, Jean-Noël Orengo met en exergue ces éléments démontrant de nombreuses élucubrations, invraisemblances et enjolivements de la réalité et ce, sans jugement. Ce bouquin, très bien documenté et étayé, livre une autre version de l’Histoire que celle édulcorée du principal protagoniste, Albert Speer.
Ce livre n’est pas une biographie romancée classique et c’est cela qui en fait sa richesse. Mettant d’abord l’accent sur cette relation hautement ambiguë à de nombreux égards entre Hitler et Speer, c’est également la démonstration des mensonges et omissions (étayés par les archives) de Speer qu’il tint aussi dans ses mémoires, où le « fake » est roi et est une réécriture de sa vie.
Finalement, ce récit historique s’apparente aux meilleurs essais sur le sujet et nous offre de manière fascinante tous les éléments pour mieux comprendre un des plus grands mensonges de l’Histoire.
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