Lara entame un stage en psychiatrie d’addictologie, en vue d’ouvrir ensuite une structure d’accueil pour jeunes en situation d’addiction au numérique...
Au coeur d'une famille en pleine implosion, le beau-père atypique capte toutes les attentions. Mythomane, dépensier, capricieux, suicidaire, généreux, élégant, clochardisé, sincère, menteur, enthousiaste, dépressif, Jacques est tout cela à la fois. Entre la France et la Côte d'Ivoire, il entraîne la narratrice, sa soeur Irène et leur mère dans un tourbillon qui finira par le tuer.
Depuis toujours, Florence Seyvos est comme hantée par ce personnage mystérieux... et toxique. Avec Un perdant magnifique , elle n'a jamais été aussi proche de la vérité. Une vérité douloureuse qu'elle restitue avec ce mélange de pudeur et de violence qui est sa marque de fabrique. Comme dans Le Garçon incassable , son plus grand succès à ce jour, elle parvient à poser un regard précis, parfois cruel, sur toutes les situations, mais avec une délicatesse infinie.
Florence Seyvos décrit dans Un perdant magnifique, les dernières années de la relation d’un père par une fille (en fait son beau-père), plutôt admirative, malgré toute l’étrangeté de son comportement. Magnifique, Jacques l’est assurément. Personne ne peut le contredire. Malgré tout, tout le monde le trouve irrésistible, mais pas tout à fait ses deux belles filles. Perdant, il semble l’être aussi tant il a promis que la belle affaire arriverait, bientôt, mais elles savent qu’elles devront toujours attendre !
Car Anna, la narratrice, quatorze ans, vit au Havre avec sa mère et sa sœur aînée Irène, âgées de deux ans de plus qu’elle. La famille s’était installée à Abidjan où sa mère continue quelque temps et de façon irrégulière à accompagner son mari dans ses affaires commerciales.
À aucun moment, Florence Seyvos évoque le trouble psychique dont semble souffrir Jacques. Pourtant, la description de ses excès et de sa dernière phase de dépression l’évoque grandement. Jacques est un dépensier sans limite qui fait régner un ordre et une énergie à sa démesure. Sa femme semble ne s’apercevoir de rien sauf à chercher à combler ses dépenses ou ses échecs. Ses belles-filles savent que rien ne tourne rond, mais font tout pour ne rien en laisser paraître, et même éprouvent certaines fois une attention attendrie, surtout à la fin de sa vie.
Florence Seyvos raconte combien il absorbe toute l’énergie de la famille. D’ailleurs, Anna et sa sœur soufflent lorsqu’il retourne à Abidjan pour ses affaires, même si tout le monde doit continuer de le soutenir à distance.
Florence Seyvos décrit l’adolescence empêchée de ces deux jeunes filles. Honteuses d’un comportement que leurs amis ne doivent pas voir, mais qu’il faut soutenir pour empêcher qu’il ne s’effondre. En même temps, il les regarde avec amour et affection. Alors que leur mère, notamment avec Anna, lui fait jouer des rôles qui ne concernent pas une jeune fille de son âge. Le vertige entre la mère qui devrait protéger ses filles, et ses filles qui la remplacent lorsqu’elle le décide, comme ça l’arrange, révèle aussi les failles de cette relation maternelle.
Septième roman de l’écrivaine scénariste, Le perdant magnifique est saisissant de précision sur l’époque, sur les failles de ses personnages et sur les conséquences sur le vécu de chacun. D’une écriture ciselée, Florence Seyvos étonne par cette fiction si frappante de justesse par rapport au réel tout en maintenant des zones de flou magnifiques ! Seulement, l’écrivaine ne revendique aucunement la particularité de son sujet, comme si elle ne voyait, comme la plupart des retours dithyrambiques, qu’un être fantasque, juste Un perdant magnifique !
Chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2025/02/05/florence-seyvos-un-perdant-magnifique/
L'homme le plus seul au monde
Dans son nouveau roman, Florence Seyvoz met en scène une famille recomposée luttant constamment contre des problèmes d'argent, le mari étant incapable de gérer son budget. Son épouse et ses deux belles-filles forme "le cœur et le prétexte" de son utopie, à la fois fascinées et victimes.
Une fois le livre refermé, je ne sais pas s'il faut d'abord retenir le côté attachant de l'homme dont on va suivre ici l'histoire ou bien son inconscience. À l'image du jugement de sa belle-fille (la narratrice), mon cœur balance.
Quand elle fait la connaissance de Jacques, le nouveau compagnon de sa mère, elle est fascinée par sa générosité et son panache, ne se doutant pas alors ce qui se cache derrière ces belles envolées. Mais n'allons pas trop vite en besogne et commençons par le commencement, c'est-à-dire par... la fin de cet homme, qui arrive très affaibli de Côte d'Ivoire où il travaille. Il ne le sait pas encore, mais ses jours sont comptés.
Il vient chercher du réconfort au Havre, où vivent désormais sa femme et ses deux belles-filles Anna et Irène qui garderont leurs années passées à Abidjan comme une parenthèse enchantée. Car, à l'heure du bilan il faut bien reconnaître que ce dernier n'est guère reluisant.
Pendant quasiment toutes les années de leur mariage, la famille a été confrontée à des problèmes d'argent, aux huissiers, à une précarité dont l'origine est à mettre au débit du côté cigale de Jacques qui dépensait l'argent qu'il n'avait pas pour des meubles achetés chez un antiquaire ou encore un piano. À peine livrés, il fallait songer à les revendre...
"Ça va aller, c'était la seule phrase qui me venait à l'esprit, et je savais que je ne devais pas la prononcer. Prononcer cette phrase, c'était me débarrasser d’elle et de toute cette poisse, cette situation à laquelle je ne parvenais pas à m'intéresser vraiment et dont je ne mesurais pas la gravité." Anna sait fort bien que revendre les meubles, c'est trahir Jacques, même si c'était lui qui les avait trahis en les achetant à crédit, et pourtant, elle attache plus d'importance à sa déception au moment de la revente, qu’au désespoir de sa mère.
À Abidjan Jacques promet de régler la situation, demande sa femme à ses côtés, trouve le temps d'un nouveau contrat de quoi effacer quelques dettes, puis plonge à nouveau, cherchant quelques expédients pour retenir les huissiers.
" Pendant des années, j'ai vu ma mère ne vivre qu'ainsi, dans un temps découpé et sous la menace, passant d’une échéance à une autre, d'un objectif à un autre: il fallait tenir jusqu'à la fin de l'hiver, il fallait tenir encore un mois, faire patienter la banque une semaine, le temps qu’un chèque soit déposé puis crédité — en espérant qu'il ne soit pas en bois. Jacques, lui, n'avait aucune notion du temps. Quand il disait le mois prochain, cela pouvait signifier dans six mois, dans un an, pour lui ça n'avait pas d'importance."
Florence Seyvos rend parfaitement cette atmosphère si particulière de fascination-répulsion, ce quotidien marqué par la précarité financière et par l'envie - sinon le besoin - de croire aux promesses d'un homme pour lequel " le présent n’avait aucune importance. Seul comptait le futur, l'utopie sans cesse réinventée, sans cesse perfectible. Étrangement, nous étions toutes les trois au centre de cette utopie. Nous en étions à la fois le cœur et le prétexte."
On sait depuis Le Garçon incassable, combien la romancière sait marier des sentiments contradictoires, sait repousser les problèmes - fussent-ils graves - par l'imagination. Elle en donne ici une nouvelle démonstration, avec toutes les nuances sur lesquelles sa palette stylistique peut jouer.
En confiant la narration à sa jeune belle-fille, elle en accentue aussi l'intensité.
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici ! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre et en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.
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C’est avec infiniment de tendresse et de compassion que F.Seyvos ( le garçon incassable ) en 95 notamment aborde un sujet délicat et malaisant.
Anna, raconte son beau-père, Jacques. C’est lui le perdant magnifique, salaud peut-être pas, quoique , mais en tous cas, si léger, pathétique . Il s’est fabriqué un costume trop grand pour ses excès, ses foucades, ses mensonges. Anna grandit avec sa sœur Irène dans l’attente de cet homme qui promène sa faillite et sa famille entre Abidjan, le Havre ou Rome.La mère en a pris son parti et essaie du mieux qu’elle peut de colmater les dettes accumulées , faute à la folie des grandeurs de cet homme qui la subjugue elle aussi.
Mais Anna adulte garde ce sentiment ambivalent mêlé de tendresse et d’inquiétude.
De quoi savoir très tôt hélas qu’un adulte qui vous aime peut-être le premier « perdant » rencontré Une bien belle lecture.
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