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«Une vieille femme câpresse, très grande, très maigre, avec un visage grave, solennel, et des yeux immmobiles. Je n'avais jamais perçu autant d'autorité profonde irradier de quelqu'un... Elle mélangeait le créole et le français, le mot vulgaire, le mot précieux, le mot oublié, le mot nouveau...» Et c'est ainsi que Marie-Sophie Laborieux raconte à l'auteur plus de cent cinquante ans d'histoire, d'épopée de la Martinique, depuis les sombres plantations esclavagistes jusqu'au drame contemporain de la conquête des villes. D'abord, les amours d'Esternome, le «nègre-chien» affranchi, avec la volage Ninon qui périt grillée dans l'explosion de la Montagne Pelée, puis avec Idoménée l'aveugle aux larmes de lumière, qui sera la mère de Marie-Sophie. Dans les temps modernes, Marie-So erre d'un maître à l'autre, au gré de mille et un «djobs» qui l'initient à l'implacable univers urbain. Ses amours sont sans lendemain. Devenue l'âme du quartier Texaco, elle mène la révolte contre les mulâtres de la ville, contre les békés qui veulent s'approprier les terres, contre les programmes de développement qui font le temps-béton. Patrick Chamoiseau a sans doute écrit, avec Texaco, le grand livre de l'espérance et de l'amertume du peuple antillais, depuis l'horreur des chaînes jusqu'au mensonge de la politique de développement moderne. Il brosse les scènes de la vie quotidienne, les moments historiques, les fables créoles, les poèmes incantatoires, les rêves, les récits satiriques. Monde en ébullition où la souffrance et la joie semblent naître au même instant.
150 ans d'histoire de la Martinique racontée à Patrick Chamoiseau par Marie-Sophie Laborieux, descendante d'esclaves, fille d'Idoménée, et d'Esternome Laborieux, esclave affranchi.
Texaco, quartier insalubre qui tient son nom d'une compagnie pétrolière qui a déserté les lieux depuis longtemps. Patrick Chamoiseau nous entraîne dans ce récit avec ce langage très imagé, plein de termes créoles de la Martinique. Le dépaysement est là et il faut s'accrocher : "Un jour (je le suppose car nul n'a milané) il lui fit naître du doigt quinze frissons sur la nuque, puis une charge de douceries au mitan plein du ventre (mieux que celles d'un cul de pipe sucé en fin de soleil à l'écoute des crikettes)." Eh ben ça, je n'avais pas compris de quoi il s'agissait? MDR, tant le vocabulaire m'a échappé.
"Ce que mon Esternome entendait par Mentô, j'eus mauvais cœur à l'admettre. Il m'est toujours difficile d'imaginer la Force esclave sur une bitation ;"
Voilà donc le langage étrange auquel il a fallu que je m'habitue.
La langue est belle, mais le texte est difficile et j'ai rarement lu un livre aussi lentement. Ça a été pour moi comme de découvrir un idiome nouveau. Je l'ai néanmoins trouvé très imagé et incroyablement poétique quand il est question de désir charnel.
Békés, békés rouges, blancs-france, mulatres, nèg-de-terre, nèg-d'En-ville, nègres libres, nègres-marrons, nègres-kongo et tant d'autres encore… tous ceux qui vivent sur cette terre de Martinique appartiennent à des catégories différentes et nombreuses avec une sorte de mépris pour celles auxquelles ils n'appartiennent pas.
Alors j'ai mis environ 150 pages à m'habituer au parler de là-bas, mais même à partir de là, j'ai bien ramé pour ne pas perdre le fil. C'est très intéressant d'un point de vue historique et cette poésie à fleur de lignes, appuyée par le créole, est totalement enchanteresse. C'est beau et douloureux. La vie de douleur des martiniquais est racontée avec énormément de grâce et de gravité.
"Il me raconta tout, plusieurs fois, en créole, en français, en silences."
C'est aussi extrêmement révoltant, mais ça hélas, c'est le destin de l'humanité de devoir faire face à beaucoup trop d'injustices.
Les passages qui parlent des livres et de littérature, je les ai trouvés envoûtants, ils font tant de bien !
Et puis il y a des moments très drôles…
Texaco est un roman qui se mérite. Il faut s'accrocher pendant toute la première partie, en tout cas me concernant, mais ensuite j'ai trouvé que ça en valait la peine.
C'est intéressant et instructif de bout en bout, même si l'intérêt, dans mon cas, a souvent suivi une courbe sinusoïdale.
Ce que j'en retiendrai ? La beauté de ce qui est dit, la façon de le dire, plus tout ce que j'ai appris sur la Martinique et que trop souvent les femmes ont une croix bien lourde à porter.
Captivant, troublant. Voyage aux Antilles (non touristique), voyages dans le passé douloureux mais porteur d'espoirs. Histoires de luttes et de résistances. L'écriture pleine d'expressions atypiques ne facilite pas la lecture mais ajoute de l’intimité, de la connivence. Quelqu'un m'a raconté une longue histoire, son histoire, ses combats. Je l'ai écouté(e).
Esternome un des premiers noirs affranchis de la Martinique, raconte son histoire, par la bouche de sa fille Anne-Sophie. Elle poursuivra ensuite par le récit de sa propre vie.
C’est ainsi que de 1820 à nos jours, Patrick Chamoiseau nous livre l’histoire de la Martinique.
Dès le début, on est pris dans un tourbillon coloré. C’est vivant et réaliste, parsemé d’expressions créoles
Extravagance et sagesse cohabitent chez les personnages hauts en couleur.
Les difficultés de la prise de liberté, la conquête de « l’En-ville », la misère qui succède à l’espoir, l’importance des traditions, la peine à trouver sa place,l’auteur dépeint tout cela magistralement.
C’est très riche, très fourni, tellement même qu’on s’y perd parfois ; j’avoue avoir survolé quelques pages. Mais c’est extrêmement bien raconté et on lit comme on écouterait.
On a à faire à une œuvre majeure qui mérite amplement le prix Goncourt qui lui a été décerné.
Comment expliquer ce que j'ai ressenti pour ce livre ? Il a parlé à mon coeur, il a des mots qu'on savoure comme des bonbons, il fait chanter le créole dans un français précieux. Je le relis tous les deux ans
L' écriture, sombre au début, suit l'évolution des personnages pour devenir fluide et passionnante
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