"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Comment se construire à l'âge adulte quand, dès la petite enfance, votre équilibre a été détruit par vos parents ?
Véritable manga-reportage, Survivre à ses parents toxiques est le fruit du travail précieux de Mariko Kikuchi, une autrice spécialisée dans les récits documentaires. à travers onze témoignages, venant de personnes issues de milieux sociaux et d'horizons différents, l'artiste scrute sans fard ni faux-semblants des adultes qui, aujourd'hui encore, cherchent à aller de l'avant...
Alors, pour commencer, j'ai adoré cette lecture.
Par contre c'est d'une extrême lourdeur ! Mais j'ai presque envie de dire que "lecture impérative nécessaire", car ça fait réaliser certains faits, peut-être que certains pourront y trouver des traits qui leur parlent, se rendre compte également de certaines choses.
11 Témoignages parsèment ce manga, qui ne se lit pas d'un seul coup. Trop lourd pour ça. J'ai dû m'y reprendre à 3 ou 4 fois, histoire de ne pas dévorer inutilement mais prendre le témoignage pour ce qu'il est et se l'accaparer.
Et du coup ça en fera un manga dont je me rappellerai, que je conseillerai à n'importe qui. Et qui ne laisse clairement pas indifférent.
Révoltant.
On imagine que tous ces faits se sont produits il y a une vingtaine d'années, cependant, c'est de tout temps, malheureusement intemporel.
Maltraitance d'enfants, éducation parentale défaillante, adult children, bref … voilà un peu les sujets abordés de manière directe, parfois crues, souvent violentes psychologiquement (ou physiquement).
Ça ne fait pas rêver, je me doute bien, mais c'est une part (horrible) de cette humanité que certains sont obligés de cotoyer, subir.
Mariko Kikuchi, après un ouvrage autobiographique pour expliquer son enfance avec un père alcoolique, revient sur la thématique des enfants qui doivent se construire malgré des parents défaillants. Cette fois, la mangaka raconte avec son éditrice le travail de recherche journalistique qu'elles ont effectuées. Elles ont décidé d'élargir au maximum de types de toxicité dont les parents peuvent faire preuve. Différentes personnes vont expliquer leur enfances et leur façon de s’être relever ou pas de ces sévices. La construction est similaire, d’histoire en histoire, notre duo rencontre une personne qui va expliquer à quoi ressemblait son enfance et dans quel état d'esprit elle est maintenant : a-t-elle coupé les ponts ou non ? Si oui, qu'est-ce qui a fait qu’elle a réussi à couper les ponts ? Un petit fil conducteur supplémentaire est présent. Chaque histoire va être très différente et le regard de l'éditrice sur sa propre jeunesse va évoluer à chaque rencontre. Elle commence avec l’idée qu'elle a eu de la chance d'avoir les parents qu'elle a eu et petit à petit va se poser des questions. Ce manga ne se focalise donc pas uniquement vers les personnes qui ont conscience des choses anormales qu’elles ont subi, il laisse une place à toutes celles qui sont potentiellement dans le déni des problèmes de leur enfance. Au niveau des vécus toxiques, il va y avoir les formes les plus évidentes, celles auxquelles on pense intuitivement immédiatement mais aussi les plus insidieuses. Il y a bien les parents qui ne jouent pas leur rôle en protégeant leurs enfants : les parents violents, les accros aux jeux, les alcooliques… Mais il y a aussi ceux qui poussent à l'excellence de manière abusive, ceux qui vont couver excessivement et empêcher de se développer comme il faut, ceux qui sont dans le chantage affectif avec le très fameux après tout ce que j'ai fait pour toi, ceux qui ont des attentes particulièrement égoïstes pour ne pas être seuls plus tard… Tout ce panel est là, dans tous les cas, ça empêche de se développer comme il faut, d’être bien dans ses baskets, d’avoir confiance en soi… Il n’y a pas de jugement sur la façon dont chacun a évolué suite à leur vécu. A aucun moment, il y a de réflexion envers ceux qui pourraient encore trouver des excuses à des comportements qui ne sont pas normaux. Cette succession d’histoires plus banales qu’on pourrait l’imaginer avec l'évolution de la vision de l'éditrice permet d’illustrer ce qu'on appelle exactement comportement toxique. Les dessins sont assez simples, limite simplistes mais ça rend encore plus fort les messages. C’est une lecture nécessaire que j'ai beaucoup aimé.
Ce manga n'obéit pas aux codes du manga japonais ce qui est une immense déception. Il semble formaté pour l'Occident avec un discours occidental en causes-effets, une inspiration freudienne, un marketing outrancier (à chacune des 11 histoires, il est rappelé les livres de l'auteur ou ceux édités par Akata), et une Mme HATANO qui doit probablement symboliser ce que pense un japonais d'un occidental (émotif, naïf et peu combatif). Le dessin est simpliste, les planches ont peu d'arrières plans, les expressions faciales sont chiches et répétitves.
Ce livre est constitué de 11 histoires de personnes adultes (homme et femme) insérées dans la société japonaise où leur enfance est terriblement violentée par un père, une mère, une grand-mère ou un grand-père avec un thème de violence directeur : violences physiques et verbales, humiliations, instrumentalisation, racket, abandon parental, carence affective, agression sexuelle, etc.
Le point fort est qu'il n'y a rien de voyeuriste. Nous comprenons la violence des situations sans que cela soit trash. Nous comprenons aussi la défaillance des adultes et l'interrogation de ces personnes violentées sur le silence de ceux-ci (familles, amis, autres) voire même la participation de tierces personnes à la violence parentale (exemple de Kanako Toriumi, 9e histoire, où les clients de l'auberge de sa mère la violentaient).
L'autrice pointe du doigt les phrases toutes faites de gens qui n'ont pas été violentés dans leur enfance et qui n'aident en rien : tu avais qu'à partir, tu avais qu'à parler, tu avais qu'à dire non... Or, l'enfant pense que ce qu'il vit est normal même s'il pressent que c'est horrible.
En conclusion, c'est intéressant mais décevant d'autant plus quand ces thèmes sont plus profonds, précis, justes et travaillés quand c'est du manga fictionnel avec l'esprit japonais (exemples : Asuka de "Neon Gneis Evangelion" - maltraitance physique et peut-être sexuelle, Rei - négation de son identité - ou Shinji - humiliations répétés par son père qui le méprise ; les personnages de "L'Infirmerie après les cours", etc.)
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