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Adolescente revêche et introvertie, Jenny Marchand traîne son ennui entre les allées blafardes de l'hypermarché de Sucy-en-Loire, sur les trottoirs fleuris des lotissements proprets, jusqu'aux couloirs du lycée Henri-Matisse. Dans le huis-clos du pavillon familial, entre les quatre murs de sa chambre saturés de posters d'Harry Potter, la vie se consume en silence et l'horizon ressemble à une impasse.
La fielleuse Chafia, elle, se rêve martyre et s'apprête à semer le chaos dans les rues de la capitale, tandis qu'à l'Élysée, le président Saint-Maxens vit ses dernières semaines au pouvoir, figure honnie d'un système politique épuisé.
Lorsque la haine de soi nourrit la haine des autres, les plus chétives existences peuvent déchaîner une violence insoupçonnée.
Jenny est une adolescent de quinze ans mal dans sa peau, très mal même.
En décalage avec ses parents, transparente pour les autres, humiliée par un garçon, elle se réfugie sur les réseaux sociaux dans le silence de sa chambre.
Et là, une personne enfin la comprend, c'est Dounia, une jeune radicalisée.
Une sœur, une vraie.
Les échanges se multiplient et Jenny franchit le pas à son tour.
Voilà une histoire bien actuelle.
Alors que dire ?
Le processus de décrochage social puis d'enrôlement est bien cerné.
On comprend bien comment ça se passe pour tous ces jeunes paumés qui n'ont plus de références.
Il y a une quarantaine d'année, il entraient dans des sectes.
Maintenant, c'est l'Islam qui les guette.
Certaines phrases sont très longues, certains passages aussi.
On sent l'avocat là-dessous.
Les passages Harry Potter m'ont semblé un peu superflus, mais bon, il s'agit d'une adolescente.
Les clins d''œil à des gens publics existants sont un peu gros.
Ceci dit, j'ai lu tout ça avec intérêt et plaisir, c'est globalement un bon livre.
Je n'ai pas grand chose à ajouter aux commentaires déjà faits si ce n'est que ce roman m'a fortement rappelé celui, magnifique et prémonitoire, de Thierry Jonquet sur un sujet proche intitulé "Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte ", son dernier livre, écrit en 2006, dont le titre provient des vers écrits par VICTOR HUGO au sujet alors des communards :
"Etant les ignorants, ils sont les incléments, / Hélas combien de temps faudra-t-il vous redire/ A vous tous que c'est à vous de les conduire, / Qu'il fallait leur donner leur part de la cité / Que votre aveuglement produit leur cécité ! / D'une tutelle avare, on recueille les suites, /Et le mal qu'ils vous font, c'est vous qui le leur fîtes. / Vous ne les avez pas guidés, pris par la main / Et renseignés sur l'ombre et sur le vrai chemin. / Vous les avez laissés en proie au labyrinthe, / Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte. / C'est qu'ils n'ont pas senti votre fraternité. / Comment peut-il penser, celui qui ne peut vivre ? "
Nul doute qu' Abel Quentin connait ces vers qui pourraient si bien résumer son roman.
Un premier roman proche de notre actualité, celle des risques de terrorisme, et en particulier, des jeunes gens qui prêtent allégeance à l'Etat Islamique et sont prêts à partir combattre en Syrie ou à effectuer des actes sur le territoire français contre les impurs. Jenny, est une adulescente "normale", un peu isolée, solitaire, avec un sentiment de rejet face aux autres ou qui n'arrive pas à trouver sa place, à se faire des amis. Elle a une scolarité un peu laborieuse, elle vivrait bien des aventures dignes du monde de Harry Potter. Alors, un jour, elle va rencontrer sur Internet Dounia, qui va l'entraîner, comme une soeur, dans la religion musulmane et elle va passer à l'acte. Pas facile de romancer un tel sujet, mais l'auteur arrive à nous toucher dans le portrait de cette jeune fille ordinaire, dans l'engrenage où elle va s'enfoncer, dans les relations qu'elle a avec les autres (un touchant portrait du père et de la mère qui vont essayer de comprendre, même s'ils sont vite perdus et ont l'impression d'être très seuls face à ces faits.. Plusieurs textes tentent de romancer et nous interpellent sur ces faits.
Ce livre démontre admirablement bien le mécanisme de l’endoctrinement. Je parle d’endoctrinement et non de radicalisation car Jenny était mûre pour suivre n’importe quelle personne s’intéressant à elle.
Un livre très très intéressant à lire est à decouvrir comment ses ados peuvent etres tres influencables est finir par tuer c est incontrolable car même les parents n on pas pu la sortir de la un livre prenant jusqu à la fin
J’avance sûrement dans mes chroniques et lectures pour les 68 premières fois. La session de janvier ne saurait tarder et je vous invite à vous inscrire à cette expérience si vous ne connaissez pas les bonnes fées des 68 premières fois !
Voici une de mes dernières lectures de cette expérience : il s’agit de Sœur d’Abel Quentin qui aborde un sujet fort, celui de la radicalisation chez les jeunes filles françaises.
Voici la présentation de l’éditeur – éditions de l’Observatoire :
Adolescente revêche et introvertie, Jenny Marchand traîne son ennui entre les allées blafardes de l'hypermarché de Sucy-en-Loire, sur les trottoirs fleuris des lotissements proprets, jusqu'aux couloirs du lycée Henri-Matisse. Dans le huis-clos du pavillon familial, entre les quatre murs de sa chambre saturés de posters d'Harry Potter, la vie se consume en silence et l'horizon ressemble à une impasse.
La fielleuse Chafia, elle, se rêve martyre et s'apprête à semer le chaos dans les rues de la capitale, tandis qu'à l'Élysée, le président Saint-Maxens vit ses dernières semaines au pouvoir, figure honnie d'un système politique épuisé.
Lorsque la haine de soi nourrit la haine des autres, les plus chétives existences peuvent déchaîner une violence insoupçonnée.
Le sujet choisi par l’auteur n’est pas aisé. La radicalisation est en effet un sujet d’actualité et si on sent le travail documenté de l’auteur, il n’en reste pas moins que Sœur est un roman. Certes réaliste mais un roman dont l’implicite est de délivrer un message à ses lecteurs. Et je pense qu’Abel Quentin réussit cet exercice de style. En nous expliquant le mécanisme de la radicalisation d’une adolescente que rien ne devrait mener sur le chemin du terrorisme, il rappelle à chacun que personne n’est à l’abri de cette infernale machine de haine et que les responsabilités sont bien souvent partagées.
Tableau glaçant de l’endoctrinement, ce roman est prenant. Malgré tout ce que l’on en a pu entendre sur le sujet, tous les reportages et émissions sur la radicalisation, j’ai lu ce livre avec intérêt car il porte un nouveau regard ou plutôt des regards multiples sur ce phénomène social.
En croisant les regards, ceux de Jenny, de ses parents et des hommes politiques, il analyse les mécanismes, le rôle que chacun joue à son niveau et comment tout se met en place pour aboutir à la haine, la violence et la terreur.
En résumé : un roman percutant et d’actualité.
Dévoré en une journée, je n'ai cependant ni aimé ni pas aimé. Mes attentes étaient peut-être trop grandes...
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Un livre sur la conversion à l'Islam puis sur la radicalisation d'une adolescente lambda, jusqu'à l'extrême...
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Ce livre n'est rien de plus qu'une synthèse tout juste romancée de tout ce qui a déjà été dit dans les médias de même qu'une succession de clichés. J'ai eu le sentiment à sa lecture de ne lire qu'une succession froide d'énoncés de faits...
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Ce n'est cependant pas mal écrit mais car oui il y a encore un mais, c'est comme si l'auteur avait voulu étaler sa culture verbale comme on étale de la confiture...
"Le terrorisme commence par une explosion de mots,
et finit dans une explosion de sang." - Oscar Consoli
"On saisit une arme et les cartes sont rebattues d’un coup, l’amour propre restauré en une seconde, les événements cessent de vous échapper, votre sujet enfin maîtrisé."
Autant passer aux aveux tout de suite, "Sœur" est un roman vers lequel je ne serais pas allée s’il n’avait pas fait partie de la sélection des #68premieresfois.
Pour son 1er roman, Abel Quentin, avocat, a fait le choix courageux d’écrire sur un thème risqué en diable par les temps que nous connaissons : l’embrigadement d’une jeune Française de 15 ans. Embrigadement et non radicalisation : une nuance qui a son importance ici, car l’adolescente n’était auparavant ni pratiquante ni croyante.
Jenny Marchand coule des jours mornes auprès de ses parents propriétaires d’un morne pavillon du morne Sucy-en-Loire et "ses rues étriquées qui tissent leur réseau en damier autour d’une église déserte, ses façades mal entretenues qui cachent des intérieurs confortables, bled impossible où l’on dit tranquillité pour parler d’ennui mortel, où la construction d’un dos-d’âne a divisé ses cinq mille habitants comme s’il s’agissait de l’affaire Dreyfus."
En se plaçant à hauteur de son personnage, dans une écriture précise, brute et terriblement bien documentée il faut bien en convenir, Abel Quentin retrace le parcours mortifère qui conduit une fille banale que rien ne prédisposait à se convertir à l’islam, à commettre un attentat terroriste.
Les 256 pages de "Sœur" répondent remarquablement, implacablement à la question au demeurant fort simple :
"Comment devient-on Chafia Al-Faransi ?"
La réponse, elle, est plus compliquée.
La démonstration est habile et éclatante, d’autant qu’en multipliant et en diffractant les points de vue - celui de Jenny, de ses parents, mais aussi des personnes alors au pouvoir - Abel Quentin offre une mise en perspective pertinente et achevée de la situation.
Tout est question de trouver la faille, puisque faille il y a, là où se tapit l’extrême mal-être de Jenny dont la vie, faute d’horizon, s’aigrit entre les quatre murs de sa chambre.
"Croupir dans l’ombre des autres si doués pour l’existence, bien décidés à en retirer le maximum de plaisir, pleins d’allant, les gestes amples, prenant ce qui est à prendre, contournant les obstacles, assurant leurs arrières, s’accommodant du monde tel qu’il est, du vif-argent dans les veines et du plomb dans la tête, les jambes bien campées, parfaitement lestées, et vous si gourde, empêchée, planant comme un oiseau de mauvais augure au-dessus de vous-même."
Une fragilité que sont formés à repérer les recruteurs de Daech pour faire irruption au moment le plus opportun, celui où l’adolescente se retrouve seule, s’étant peu à peu isolée tant de ses camarades de classe que de ses parents, un peu perdus eux aussi face à cette enfant qu’ils ne déchiffrent plus. Quand le travail de sape a fait son œuvre, ils savent qu’il suffit de quelques mots empathiques pour harponner leur proie qui ne sait plus quelle place est la sienne.
"Jenny n’est pas exactement un souffre-douleur. […]
Elle n’est pas non plus équipée pour tenir le haut de l’affiche […] la politique budgétaire des époux Marchand ne lui permet pas de faire l’acquisition d’un de ces artefacts qui asseyent une réputation et confèrent un insaisissable chic que la foule pubescente appelle le swag."
Ce besoin d’exister, d’appartenir à un groupe sont autant de manques que va combler Dounia, rencontrée lors d’un chat sur Internet et vite basculé sur la messagerie cryptée Telegram. Dounia, cette meilleure amie que Jenny espérait sans plus l’attendre, Dounia qui va petit à petit mener une guerre d’usure en devenant "[…] la soul sister, l’épaule amie et la parole enveloppante, la grande sœur, le bureau des pleurs et surtout l’initiatrice, la maîtresse de cérémonie, le pygmalion, la chaperonne, l’accoucheuse et l’alma mater. Dounia, la Lionçonne du califat."
À partir de là, il n’y aura plus de retour arrière possible, tout ne sera que fuite en avant, du port du voile, à la récitation des sourates du Coran jusqu’à l’ultime sacrifice pour la cause :
"Prendre la vie d’autrui n’est pas une décision facile, mais elle fraye son chemin sans trop d’encombre dans cette cervelle d’étourneau. […] Tuer un de ces êtres, ce n’est pas se tuer soi-même : c’est supprimer l’absolu étranger, la créature d’une autre rive."
Cependant, avant d’éclater au grand jour, la lutte à l’œuvre est avant tout intérieure et Abel Quentin développe habilement, sur plusieurs pages, ces deux faces d’une même personne,
"Jenny la poltronne procrastinatrice ne serait pas contre un report sine die de l’apocalypse. Chafia voudrait en finir sans attendre."
Il nous amène sans difficulté – et croyez bien que ça donne à réfléchir - à ce moment de bascule, à cette poussée incontrôlable de haine aussi épaisse envers soi-même qu’envers les autres, à cette ivresse qu’il y a à devenir quelqu’un au moment de disparaître pour connaître une gloire posthume :
"Enfin elle est en charge de quelque chose, elle est tendue, elle est même espérée, apaisante sensation qui diminue un peu l’urgence de sa propre disparition."
Quelques bémols toutefois à cette lecture concernent :
- ces zones d’ombre que l’auteur n’a pas exploitées (intentionnellement ?) : quid de sa conversion ? De qui elle reçoit les instructions ? le Glock ? Qui a décidé quelle serait sa cible ? quel serait le jour ? ;
- le contexte politique de l’histoire avec de fréquentes allusions à notre système épuisé, à bout de souffle, qui ont grossi le récit d’événements digressifs inutiles ;
- une fin vite expédiée avec la référence de trop à Harry Potter (fil rouge tout au long du roman) dont je me serais passée.
Il reste que "Sœur" est un 1er roman prenant de la 1re à la dernière page. Un roman saisissant, en ce qu’il dose au plus juste éléments de pure fiction et emprunts à une réalité avérée, et donc glaçant pour ce qu’il laisse entrevoir.
"Elle a remarqué que lorsqu’il s’agit de s’envoyer dans le décor les astres s’alignent comme par magie, les obstacles s’évanouissent, et il y a quelque chose d’amer dans le constat de cette baraka autodestructrice."
Combien de Jenny ?
1er roman,
Lu pour la session automne 2019 des #68premieresfois
https://www.calliope-petrichor.fr/2019/12/01/soeur-abel-quentin-éditions-de-l-observatoire/
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