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Ilonka, Peter, Judit sont les acteurs d'un même drame. Chacun à leur tour, ils confient « leur » histoire comme on décline un rôle. L'épouse amoureuse et trahie. Le mari cédant à la passion. La domestique ambitieuse qui brise le couple.
En trois récits-confessions qui cernent au plus près la vérité des personnages par un subtil jeu de miroirs, Sandor Marai analyse avec une finesse saisissante sentiments et antagonismes de classe. Mais, au-delà, c'est la fin d'un monde et d'une société - la bourgeoisie hongroise de l'entre-deux-guerres - que dissèque avec lucidité le grand écrivain de la Mitteleuropa.
Une oeuvre maîtresse de l'auteur des Braises.
Livre en 3 parties. 1ere partie : Sa version à elle. Elle, c'est Ilonka. Femme divorcée qui relate à une amie, son histoire. Sa rencontre avec Peter, leur mariage, leur divorce. Elle lui explique les années de doute, la mort de leur fils, le caractère distant de Peter et sa trahison.
2eme partie : Sa version à lui, Peter. Comme Ilonka, il discute avec un de ses amis et lui explique son premier mariage avec Ilonka, leur divorce, son deuxième mariage et son deuxième divorce.
3ème partie : La version de l'autre. L'autre c'est judit. La deuxième épouse de Peter. Celle pour qui il a divorcé d'Ilonka. Elle, elle discute avec son amant et lui explique comment elle est entrée dans cette famille riche. Petite fille très pauvre, elle est entrée au service de la maman de Peter comme femme de ménage. Elle raconte comment elle a rencontré Peter, comment elle a assisté à son divorce pour se remarier immédiatement avec lui.
A travers ces 3 personnages et cette idée de roman "confession", l'auteur décrit parfaitement les sentiments de chacun par rapport à la classe sociale dont il fait partie. Mais aussi, il dépeint à merveilles (un peu cynique parfois) la bourgeoisie hongroise de l'entre-deux-guerres.
J'ai beaucoup aimé la structure du roman. Très intéressante cette façon de donner à chacun la parole ! Je sais qu'aujourd'hui encore la vision du monde dépend totalement de la classe sociale dans laquelle tu grandis ... mais même si c'est vrai, même si c'est intéressant ça me gonfle !! Pour moi, que tu sois riche ou pauvre... si t'es con, même avec de l'instruction que ton statut social a pu te permettre d'acquérir, tu restes un con ! A l'inverse, si tu as envie de "grandir", qu'importe ta fortune, tu trouveras toujours un moyen de devenir quelqu'un ! C'est beaucoup plus facile, certes, quand tu as les moyens mais c'est trop facile de s'arrêter sur ton nom de famille ! Biensuuuur, comme à chaque fois, ce n'est que mon humble avis que j'aime partager avec vous !
Quelle écriture ! Quel sens des non-dits, de ce qui doit être socialement, des sentiments que l'on tait, de cette si grande solitude finalement. C'est aussi l'évocation du poids de l'éducation qui façonne les classes sociales, le cloisonnement de celles-ci (quand Peter épouse Judit, ils sont rejetés par la société), les réflexions sur le couple, l'amour, la littérature, la culture, le travail, la politique en filigrane.
Ce livre n'est pas un essai mais bien un roman. La structure narrative m'a fait pensé à Molly dans Ulysse de Joyce. Cette oralité, mais en rien sexuelle par rapport au monologue de Molly, est fluide, elle nous parle, à nous qui sommes là, incarnés. Les relances de notre attention par les interpellations comme "tu crois que...?", "Je t'ennuie n'est-ce pas ?" donnent du rythme à chaque partie.
Le style permet de cheminer avec les personnages et la construction du roman nous permet d'être comme assis en face de celui qui parle. On a envie de dire à Ilonka, la 1ère épouse "ne culpabilise pas, Ilonka. Tu es une belle personne". Les personnages secondaires sont très important et on s'en fait une image précise : la belle-mère qui semble si gentille est celle qui a permis le marasme et le malheur de son fils (et de sa belle-fille) en maintenant Judit sous ses yeux pendant près de 15-20 ans ; le curé odieux qui enfonce Ilonka quant à la mort de son enfant (gardé par la belle-mère !), etc. Peter est un doux rêveur qui veut s'échapper de son carcan sans en avoir la possibilité mentale. Les parties évoquant la lutte des classes et la bourgeoisie sont anthologiques pour comprendre le monde de cette époque. Judit est imbuvable mais déterminée. Aujourd'hui on dirait que c'est une femme forte et libérée. Il y a aussi l'écrivain qui ne croit plus en rien, pas même en la culture (ce qui me fait penser à Bernhard Schlink qui se pose les mêmes questions en voulant y croire) et c'est lui le fil conducteur des 4 récits.
En effet, il n'y a pas 3 récits mais bien 4, le 4e étant narré par l'amant de Judit. Pour reconstituer la vie et le cheminement de chacun (personnages secondaires inclus) il faut être sensible et attentif. Rien n'est descriptif, tout est dit dans la conversation, au fil de l'eau au travers des quatre récits.
C'est vraiment un très beau roman !
Un homme et deux femmes. L’homme a été marié à ces deux femmes. Péter, Illonka et Judit. Chacun à son tour va raconter son histoire dans un long monologue et va revenir sur la relation qui les lie. Péter et Illonka se sont mariés. Issus du même monde bourgeois, leur union allait de soi. Mais très vite, Illonka a senti une fêlure chez son mari. Elle a compris qu’elle était seule à aimer, que Péter était pris ailleurs. De désillusions en dialogues qui tournent court le couple se délite jusqu’au divorce. De son côté Péter est un être constamment insatisfait, toujours en quête de quelque chose qu’il n’a pas. Et ce qu’il n’a pas, c’est cette autre femme qui occupe tout son cœur et son esprit. Judit, domestique chez ses parents et pour qui il éprouve une attirance irrépressible. Judit pour qui il finira par quitter Illonka et qu’il épousera. Avant de découvrir que cette femme ne l’aime pas mais l’a utilisé pour sortir de sa condition.
Un jeu de miroir semble donc s’être installé entre Ilonka qui aime Péter sans retour et Péter qui aime Judit sans être aimé d’elle.
Chronique de la déception, de l’échec amoureux, de la solitude et de l’exil ce livre possède une véritable atmosphère. Sans grandiloquence et de manière feutrée Sándor Márai donne la parole à ses trois personnages livrant des vies faites de compromis, de renoncements ou de prises de décisions à la fois courageuses et irrévocables. Des vies conditionnées par une appartenance à une classe sociale, à un sexe, à une époque, à un pays. Mais des vies qui se dévoilent sans far dans ce qu’elle ont de plus magnifiques comme de plus mesquins, ne cachant rien de leurs sentiments et de leurs actes.
C’est magnifiquement écrit, dans une langue pleine, riche et élégante qui donne toute sa dimension aux récits des trois personnages. Ainsi malgré la longueur des monologues le lecteur n’éprouve aucun ennui, totalement happé par les confessions des personnages. L’aspect historique et politique joue aussi son rôle dans ce roman donnant au lecteur un aperçu de la Hongrie du XXème siècle jusqu’au delà de la seconde guerre mondiale. Un récit d’une grande profondeur qui se lit à plusieurs niveaux.
Mon premier Sandor Marai, et quelle belle surprise !
Il s'agit d'une histoire à trois voix, où chacun à leur tour ils racontent leur vision d'un même drame. "L'épouse amoureuse et trahie. Le mari cédant à la passion. La domestique ambitieuse qui brise le couple". Dans le contexte historique de l'entre-deux-guerres de la Hongrie.
Il y a une réflexion sur l'amour, et sur les êtres humains. Vraiment très bien écrit. Je le recommande vivement. :)
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