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Le récit qui donne son titre à ce recueil est né de la lecture du journal intime du poète hébreu Noah Stern (1912-1960), totalement ignoré bien qu'il fût le traducteur de T.S. Eliot et l'auteur du premier poème hébraïque résolument moderne. Plusieurs fils s'entre-croisent dans ce texte en « arabesque » : les errances dans Jérusalem du narrateur qui cherche à percer l'énigme de cette vie, à l'instar des tailleurs de roche qui, au VIIIe siècle avant notre ère, percèrent le tunnel d'Ézéchias ; le journal du poète, qui finira par se suicider après un procès pour tentative de meurtre, constatant qu'il n'a nulle part où aller ; l'archéologue qui met au jour un palais dans lequel se retira, il y a une quinzaine de siècles, un khalife épris de poésie.
Les deux autres récits sont de facture plus classique, des récits de voyage à la frontière de l'essai. « Attir » est le nom d'un village dans le nord du Néguev. Gabriel Levin s'y rend pour tenter de comprendre de l'intérieur ce qu'est l'existence des derniers Bédouins d'Israël ; et se lie d'amitié avec Suleiman et sa belle-fille Rita, une jeune juive de Tel Aviv qui a accepté de tout quitter pour ce mode de vie archaïque. Il croise aussi des Bédouins, plus proches de leurs conditions originelles, dans ses « Notes du Wadi Rum », journal de voyage dans ce désert du sud de la Jordanie, connu pour son temple nabatéen et pour le lieu dit « la source de Lawrence ». Mais, plus encore qu'à l'auteur des Sept Piliers, c'est à l'autre Lawrence que ces notes font penser, celui des Croquis étrusques que Gabriel Levin préface pour la nouvelle édition que publie Le Bruit du temps en mai 2010. On y trouve la même fraîcheur de notation, de savoir archéologique, le même mélange d'attention à un monde inconnu dont on cherche à percer le mystère. On pense aussi aux journaux de voyage du poète japonais Bashô. Après l'évocation magnifique de la Vénus de Beth Shean, qui le fait s'interroger sur la rencontre chez les Nabatéens de l'éros hellénique et d'une civilisation nomade iconoclaste, ces notes s'achèvent lorsque le poète s'aperçoit qu'en cherchant à déchiffrer ainsi les signes du désert, il ne fait que redécouvrir l'écart infranchissable qu'il percevait enfant, à l'âge de l'apprentissage de la lecture, entre les mots et les choses.
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