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Dans ses collines du Kentucky, Virgil mène une existence paisible, entouré par les bois qu'il affectionne tant. Il peut à tout instant s'y enfoncer et trouver la sérénité et le calme dont il a besoin. Mais quand son frère aîné Boyd, la tête brûlée de la famille, est assassiné, Virgil doit faire face à une décision impossible. Dans les Appalaches, le sang doit être vengé par le sang. Et puisque tout le monde sait qui a tué Boyd, on attend sa riposte. Quelle que soit la direction que Virgil choisira, sa vie en sera bouleversée.
Le Bon Frère est un formidable roman sur la liberté, qui éclaire d'une lumière nouvelle la notion de frontière dans l'Ouest américain contemporain, des vallons du Kentucky aux rivières du Montana.
Jusqu'où peuvent mener les choix d'une vie ? Ceux qu'on fait ou ceux qu'on subit ? Dans ce premier roman très réussi, l'auteur joue avec le destin, celui que les autres vous créent, celui que vous croyez dessiner. Le héros, Virgil devenu Joe, n'a rien à faire de tout ça. Il n'a ni ambition, ni rêves, il mène une vie tranquille, ponctuée de rituels sans importance et suit, malgré lui, une voie qu'on lui a tracée.
Changer d'identité ne résout aucune équation, comme s'il était toujours pris dans une toile d'araignée, comme s'il faisait chaque fois le mauvais choix, comme si, à chaque fois, son destin le rattrapait.
Mais Le bon frère explore bien d'autres thématiques : jusqu'où est-on libre ? et si l'Etat Fédéral était une façon de priver les individus de leurs libertés et de leurs droits ? Le roman évoque l'Amérique en crise, les difficultés de la population rurale, le port d'armes , le racisme et la religion...Il décortique les sentiments de Virgil-Joe, ses hésitations, ses frustrations, ses regrets.
La narration, sans être absolument lyrique, est poétique et sert les mots justes pour une histoire qui valse entre violence et apaisement, certaines scènes oscillant entre tragédie et émerveillement au rythme des saisons.
Un beau roman !
Deux Gallmeister chroniqués aujourd'hui, deux coups de cœur ! Voilà un de mes petits bijoux de l'année, une découverte : celle d'un auteur, d'un univers... Belle claque littéraire !
L'histoire en elle-même me rappelle un de mes films préférés : Les Brasiers de la colère au travers d'une histoire de vendetta, de fraternité dans un coin paumé des Etats-Unis. J'attendais cette sortie avec grande impatience et je peux vous dire que j'ai été servie : c'est un drame d'une grande force narrative, d'une puissance stylistique avec une montée crescendo de la tension du lecteur.
Vous allez peut-être me demander ce que ce livre a de plus que les autres dans le même genre ? Je dirai que Chris Offutt fait partie des plus grands, il est l'héritier des légendes du roman noir, il en est un des membres. Le Bon frère est la quintessence de tout ce que j'aime dans la littérature américaine : il donne autant d'importance au cadre spatio-temporel, à l'histoire et aux personnages. Ils ont tous un rôle à jouer jusqu'au grand final !
Lorsque le nature writing rencontre le roman noir, lorsque le drame rencontre la folie, lorsque le sang appelle le sang : des paysages grandioses sont dépeints sous une plume poétique mais aussi tranchante qu'un couteau (bravo à Freddy Michalski pour la traduction). Virgil est l'antithèse de son frère : c'est un être rangé, calme, serein et qui souhaite par dessus tout vivre une existence paisible en communion avec son environnement. Pourtant un choix terrible va l'amener à sortir de sa léthargie quotidienne : il doit venger la mort de son frère. Un dilemme est au cœur de l'histoire, un dilemme existentiel qui changera la vie de notre héros à jamais.
J'ai eu le coup de cœur pour ce roman car j'ai vécu aux côtés de Virgil, j'ai senti ses hésitations, ses peurs, ses pensées; j'ai vu ces sublimes rivières et ces magnifiques vallons; je me suis plongée dans ce livre en oubliant tout et en vivant l'Amérique grandeur nature. Les éditions Gallmeister ont le pouvoir de publier ces livres qui nous font voyager, qui nous font respirer au rythme des protagonistes et de la nature.
En définitive, la collection Totem a accueilli un nouveau maître du genre en son sein : Chris Offutt et son grand roman Le Bon frère !
P.S. : Cette couverture est juste magnifique, je crois que je n'ai jamais eu autant le coup de coeur pour une couverture ! (Je tenais à le dire ^^)
Tout le monde le sait : Billy Rodale a tué Boyd Caudill, le frère de Virgil. Et c’est bien ça le problème. Les gens attendent. A Blizzard, dans ce coin perdu du Kentucky, on ne laisse pas un crime impuni, c’est une question d’honneur. Alors, Virgil se doit d’agir, de venger son frère. Les gens ne parlent pas mais les silences sont lourds de reproches. On sait ce qu’ils ont dans la tête, ce qu’ils veulent. Et puis, il y a la famille : la mère et la sœur Sara. Elles sont gênées. Virgil ne passe pas à l’acte et ça fait six mois que ça traîne, six mois qu’il ne fait rien. « Et on sait tous ici ce que tu fais pas » murmure-t-on à son oreille.
Alors Virgil se met à « envier aux pierres leur existence parfaite. Personne n’attend rien d’elles. » Lui, il doit agir, se convaincre qu’il n’a pas le choix. Mais tuer lui correspond si peu…
Il faut dire, Virgil ne ressemble pas à son frère, vraiment pas. Il aime être tranquille, dans la nature. C’est un contemplatif comme on dit, un taiseux. Il observe les oiseaux, coupe du bois, marche dans les collines, traverse les forêts, pêche et respire. Il connaît tous les coins par cœur, c’est son pays et il y est très attaché. Tout ce qu’il souhaite, c’est vivre dans la cabane en bois de son père et qu’on le laisse tranquille. Il n’est pas un tueur et n’a pas envie d’en devenir un. Supprimer la vie, ce n’est pas pour lui. Ça n’entre pas dans sa philosophie. Et puis, comme il le dit, une fois que c’est fait, c’est fait : « ce n’était pas comme redevenir sobre, il ne pourrait pas arrêter et revenir en arrière. »
Sans compter qu’il a un travail et fréquente une femme qu’il va certainement épouser. D’ici quelques années, il aura même un tas de gamins, c’est sûr ! Son avenir est tout tracé, alors cette histoire de vengeance l’ennuie. Profondément. Finir sa vie en prison, ça n’est pas pour lui, il a d’autres projets. Il veut rester libre…
Son frère, Boyd était très différent : un « fêtard incontrôlable. Il roulait vite, buvait sec, jouait aux cartes et courait les femmes. » Il fascinait ceux qui l’approchaient. Certains disent encore qu’ « il fichait la trouille, mais y avait pas d’homme plus aimé dans cette vallée. Et c’est bien ça qui l’a tué, m’est avis. Les hommes voulaient s’en faire un pote et les femmes le voulaient à leur façon. Lui, il était comme la peinture sur une bagnole qu’on vient de repeindre : impossible de résister à l’envie de la rayer d’un coup de tournevis. Les gens voulaient le voir mort et ils le savaient même pas, jusqu’à ce qu’y soit plus là. Il a jamais suivi une seule règle de sa vie. » Un mythe ce frère, quelqu’un qu’on n’oublie pas. Mais de là à devenir un meurtrier, il a beau réfléchir, ça ne passe pas….
C’est pourtant dur de se sentir comme un « tuyau d’arrosage que l’on plie pour étouffer son chagrin. » Ça ronge, ça empêche de vivre… Il faudra prendre une décision, c’est sûr, mais laquelle ?
Le bon frère est un grand texte superbement écrit qui met en scène un homme subissant une véritable « tempête sous un crâne » pour reprendre des termes hugoliens. Il faut choisir entre l’honneur ou la vie, la prison ou la honte. Décision impossible. Le bon frère est un homme tragique.
C’est aussi un livre qui nous parle de l’Amérique profonde, une Amérique qui a peur de l’autre, des autres, car ils sont multiples, qui vit armée jusqu’aux dents, persuadée qu’elle est la prochaine victime d’un complot national, voire international qui la laissera exsangue, sans terre, sans racines, perdue.
Des êtres sans repères, en quête d’identité, souffrant dans ce monde moderne où ils ne trouvent plus leur place et revendiquant encore une liberté qui n’est peut-être plus qu’illusion…
Superbe !
http://lireaulit.blogspot.fr/
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