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Après avoir enchanté les lecteurs en réglant leur compte à ses souvenirs et à ses illusions perdues, l'ex-parolier de Zebda s'attaque au "vrai" roman pour raconter une émancipation tardive : celle d'une femme algérienne sacrifiée à sa mission de mère dans une France presque aussi rassie que raciste. Et comment, pour la rencontrer enfin, son fils - et toute la fratrie - devront apprendre, d'abord, à s'en séparer. Entre tendresse et cruauté, drôle et parfois - par surprise - bouleversant, "La Vie de ma mère ! " est une déclaration d'amour éperdu déguisée en portrait de femme crépitant.
C'est un bien chouette roman que "La vie de ma mère !" de Magyd Cherfi. Un roman au plus proche des êtres, de la complexité de leurs liens, des sentiments et de la vie.
Kabyle de deuxième génération, Slimane, le narrateur, semble réunir toutes les conditions pour passer une cinquantaine paisible. Excellent cuisinier, il possède un food-truck, réputé pour l'inventivité de ses burgers halal ; ses deux grands fils s'émancipent peu à peu, loin des cités et de leurs innombrables trafics, tout en gardant une belle complicité avec leur père ; sa femme, dont il est séparé, continue à le soutenir de sa tendresse et de sa compréhension. Oui, la vie de Slimane pourrait être parfaite... Mais voilà qu'après huit mois de silence, il se décide à rendre visite à Taos, sa mère. Et là tout vacille, tout convulse, tout chavire et tout blesse.
Déterminé à être le "bon fils", affamé d'une tendresse maternelle évanouie depuis le temps de l'enfance, Slimane passe outre les rebuffades, les méchancetés, les remarques acerbes et prend en charge les soins nécessaires à Taos, malgré la désapprobation de ses frères et soeurs. Et une métamorphose survient : celle qui était vouée à n'être que leur mère, aliénée à son mari et à sa progéniture, n'ayant d'autre existence que celle de les servir, de s'occuper de leur bien-être, de les aimer sans rien demander en échange, devient une femme volontaire, pleine de vie et d'envies, indépendante, chaleureuse et démonstrative ! Pour les cinq enfants de Taos, c'est un cataclysme et chacun y fait face avec son vécu, ses rancœurs et son amour refoulé.
C'est avec un ineffable plaisir que je suis entrée dans la famille de Slimane et Taos, que j'ai accompagné ses soubresauts douloureux et le réveil d'une femme longtemps assujettie aux seuls rôles qui lui étaient assignés par d'autres. Magyd Cherfi parvient, avec une infinie subtilité, à disséquer l'écheveau composite des relations filiales ancrées dans une culture et des traditions coriaces. Comme Slimane dans ses recettes, l'âpreté du piment, apportée par les ressentiments de la fratrie, s'entremêle intimement avec la suavité de la fleur d'oranger et de la tendresse retrouvée, pour donner un roman savoureux. Ni concessions, ni mièvreries, dans ce récit d'émancipations mutuelles, mais énormément d'émotions pudiquement suggérées par une écriture dynamique, d'une spontanéité loin de toute affectation. La dureté des situations et des affrontements familiaux est sans cesse contrebalancée par l'humour et l'autodérision dont fait preuve le narrateur, conscient de ses failles et de ses motivations égoïstes.
"Une déclaration d'amour maquillée en bras de fer" affirme le point de vue des éditeurs sur la quatrième de couverture. Je souscris complètement à cette définition en y ajoutant mon propre point de vue : un trésor vivifiant de délicate acuité et d'humanité.
Slimane ou plutôt Slim, après avoir assisté aux obsèques du père de son meilleur ami, va tenter de renouer avec sa mère dont il s'est éloigné depuis huit mois... En pleine crise dans sa vie personnelle et professionnelle, il va tenter de l'accompagner dans une sorte de renaissance physique et morale et va ainsi renouer avec ses frères et soeurs.
J'ai eu un peu de mal à rentrer dans l'histoire au début tant l'écriture est particulière: tournure orales, mots d'autres langues, argots...mais rapidement le charme a pris et j'ai suivi ce narrateur fragile et perdu dans sa quête de famille avec beaucoup de plaisir! Que dire également de cette mère dont la personnalité et les envies ont été réprimées toute sa vie et qui renaît à la fin celle-ci! Un joli sujet, traité avec tendresse et humour!
J’ai été souvent mal à l’aise d’une part à cause de l’écriture souvent trop crue et d’autre part à cause des relations exécrables entre une mère et ses enfants
Pourtant, certains passage sont intéressants ; comment un fils d’immigré se sent ‘il ? français, arabe ou musulman ? comment ces enfants mélangent ‘ils tradition et modernité ? mais aussi, comment un fils doit ‘il élever ses enfants ou se rapprocher de sa mère ? ou comment une mère musulmane illettrée se libère des traditions séculaires. Bref, beaucoup de sujets d’actualité…
L’auteur manie aussi l’humour et quelques fois la tendresse, mais pas assez à mon goût
Alors qu’il assiste aux obsèques du père de son meilleur ami, Slimane regrette de ne plus être allé rendre visite à sa propre mère depuis huit mois.
Il lui faut bien reconnaître qu’à cinquante ans passés, il ne supportait plus les jérémiades, les reproches, les plaintes de celle-ci. Mais taraudé par la crainte qu’elle puisse bientôt quitter ce monde, il décide de renouer avec elle, et du même coup avec ses frères et soeurs.
Ce ne sera pas chose aisée, sa mère étant particulièrement aguerrie au chantage affectif et se plaignant de douleurs physiques invalidantes.
Mais Slimane, qui n’a plus de travail, deux fils adolescents et une épouse qui met sur pause leur vie commune pour se donner le temps de la réflexion quant à l’avenir de leur couple, tiendra bon.
Ce que j’ai aimé dans ce roman : les portraits des membres de la famille, les relations entre eux, leur mode de fonctionnement qui diffère de celui de la famille française lambda, l’évolution de la mère et l’ajustement que ses enfants sont obligés de faire pour la comprendre et accepter son changement, son envie de profiter un peu de la vie maintenant.
Un bon moment de lecture.
Si cette mère kabyle n'était qu'un personnage de fiction, on pourrait certainement rire de la caricature que nous en offre Magyd Cherfi. La comédie de cette « tribu rebeu » de cinq enfants, menée d'une main de fer par un père violent et une mère illettrée et irascible serait alors un vrai moment de plaisir.
Mais les adultes qui se sont construits dans le sillage d'une « mère fouettarde et castratrice » n'ont rien d'équilibré et ce n'est pas la maladie de cette femme, devenue veuve, qui leur permettra de faire la paix avec une enfance marqué par le manque d'amour.
Slimane, l'un des 3 fils, cuisinier au chômage, est le narrateur de ce roman qui, en décidant de faire soigner sa mère handicapée, tente de créer des liens qui n'ont jamais existé, au sein de cette famille déchirée par la haine.
Si tout n'est que plainte, reproche ou sentence dans la bouche de sa mère, la surprise de sa guérison pourrait bien redonner un semblant de normalité à cette fratrie qui a reproduit, chacun à sa façon, le traumatisme d'une éducation de frustration.
Magyd Cherfi ne manque pas d'humour pour nous immerger dans le noyau incandescent de cette famille Kaoui aux répliques drôles et acerbes.
Au-delà de la comédie familiale, ce roman nous parle de cette première génération d'immigrés d'Afrique du Nord venus travailler en France et dont les enfants ont tout fait pour s'intégrer à leur nouveau pays. Avec les générations suivantes, on voit apparaître ce que l'auteur appelle « la tectonique des plaques identitaires » générée par une assimilation plus ou moins bien réussie de croyances et de cultures différentes.
Un premier roman entre amertume et humour qui nous interpelle sur les conséquences d'un vécu familial déséquilibré et laisse entrevoir la lueur d'une résilience rendue possible avec le temps.
Pourquoi pas, en tout cas le propos ne peut pas laisser indifférent et cette lecture en est d'autant plus intéressante.
C'est un joli texte sur la relation mère-fils mais également sur le désir d'émancipation d'une femme, avec tout ce que cela comporte de défis vis à vis de la société mais également de sa propre famille. Comment se libère-t-on du poids des traditions et des douleurs du passé ? Est-ce que posséder veut dire aimer ?
Famille kabyle, père violent, illetrisme, manque d'amour dans l'enfance et Flaubert ...
Une belle réussite pour un 1er roman.
C’est d’une plume tendre, dure et piquée d’humour que nous livre ici Magyd Cherfi sa première fiction qui traite du sujet de l’identité quand on est issu de l’immigration et trace un portrait d’une mère maghrébine, toute puissante, abusive, voire castratrice. Il y développe aussi la question du féminisme sous l’angle novateur de l’ émancipation tardive et libératrice d’une mère kabyle sacrificielle et possessive. Cette remarquable histoire peut ,bien évidemment , être celle de n’importe quelle famille toutes origines confondues.
C’est lors de l’enterrement du père de son meilleur ami, en écoutant sa veuve s’épancher sur l’ingratitude de son défunt mari à son égard, sur ce qu’elle a vécu auprès de son bourreau de mari , que Slimane comprend qu’il est temps de faire enfin la paix avec sa mère et d’être à ses côtés pour ce qui lui reste à vivre, afin qu’aucun remord ne lui torpille sa vie. Il ne peut laisser son orgueil boursoufflé de bêtise empoisonner le reste de sa vie non plus. A cinquante ans, il se pense assez sage pour pouvoir accepter de ne pas lui faire entendre raison et de se faire pilonner comme aux plus beaux jours de son adolescence. N’est-il pas capable de reconnaître que quelque chose le lie à elle de plus fort que ses tombereaux d’insultes ? Il tente également de reprendre contact avec ses frères et sœurs, ces étrangers perdus de vue au fil des ans, afin que tout comme lui, ils accompagnent leur mère pour ses dernières années. Dès la première visite, après huit mois de bouderie, il retrouve une vieille femme aux prises avec ses rhumatismes et ses douleurs diverses qui ne lui laissent aucun répit et là encore, il hésite entre peine et méfiance. Rompu au chantage affectif il est incompris de ses fils quand au téléphone il prend de la distance avec le flot de plaintes douloureuses de cette mère qui les essore et les use.
« J’ai écouté en me demandant si quoi que ce soit qui vous lie par le sang valait d’être vécu. » p 98
« Sur le retour, me suis maudit d’être né, j’ai pensé à tous ces frères et ces sœurs morts en couche et me suis dit - veinards ! » p 98
« Moi maman, je l’avais toujours embrassée, par défi la plupart du temps, comme pour lui arracher des sentiments qu’elle me refusait. »p 113
Invité chez sa sœur, Soraya, Slimane pose un regard lucide et désenchanté dont découle une profonde réflexion sur la vie de cette dernière, qui adolescente, se rêvait coiffeuse pour finir esclave de son mari et de ses enfants, à l’image de leur mère. Il se met à haïr leurs racines qui décident du destin des femmes, tableau d’un moyen âge à rallonge.
« Chez Soraya aussi, c’était la traque, tous ces appels, une meute à ses trousses qui essoufflait son cœur, ça m’a laissé muet » p 136
« J’oubliais que maman attendait ça, l’impair, pour lancer son attaque , se sentir vivre, parce que l’adversité provoque cette sensation. » p 137
La fratrie tombe dans un abîme d’incompréhension quand , cette mère percluse de douleurs autant qu’enfermée dans ses rancœurs, après une intervention chirurgicale qui la soulage et du même coup soulage sa conscience , casse les codes et enfin se libère. Hafida, rencontrée au centre de réadaptation gériatrique fait entrer dans la famille un vent d’émancipation qui sidère et encourage la mère et les filles à ne plus avoir peur et à redresser la tête.
« Les filles sont restées sans voix, sidérées que cette Hafida puisse prendre les trois frères d’une main et de l’autre leur donner la fessée, oui, sidérées qu’on puisse avoir l’apparence d’une dévergondée et les tripes d’un cascadeur. » p 240
« Nous les garçons, on s’est sentis si riquiquis qu’on pouvait rentrer dans nos poches sans se plier. » p 240
Je me suis véritablement sentie happée par ce roman , lu d’une seule traite, tellement bien écrit, qui nous fait passer du sourire aux larmes. On y rencontre un homme, la cinquantenaire, plein de rancœur envers cette mère avec qui il va tenter de retisser un lien inédit qui le conduira de surprises en surprises jusqu’à se découvrir lui-même.
Nous avons ici le roman plein d’humanité qui nous livre un portrait de femme explosif doublé d’une déclaration d’amour maquillée en bras de fer.
Je recommande vivement ce livre où chacun , invariablement pourra s’y retrouver.
Lu dans le cadre du « Coup de cœur des lectrices ». Je remercie Version Femina ainsi que les Editions Acte Sud
Après huit mois de « bouderie », Slimane veut retisser un lien avec sa mère, il est temps de la retrouver, de faire la paix avec elle pour partager ce qui lui reste à vivre sans remords.
Une langue parlée, directe, crue, tendre et poétique. Une famille kabyle déchirée et au milieu une mère possessive, injuste et ingrate qui décide de s'émanciper, de s'extirper du naufrage de la vieillesse et de profiter des dernières années de sa vie pour devenir une femme libre de ses faits et gestes.
Un récit sur l'identité à travers le portrait décapant de cette mère qui a tout sacrifié à sa famille. Un roman intime et féministe, un bel hommage, une déclaration d'amour.
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