Le roi Gisunzu, souverain du Bushiru, se croyait insubmersible. Non seulement son arrivée au pouvoir avait généralement été plutôt bien accueillie, et le début de son règne avait coïncidé avec une période prospère, ce qui lui avait permis de multiplier des gestes de générosité à l?égard de son peuple qui lui vouait une dévotion quasi religieuse.
Mais la fin du règne commença à l?intérieur de son sein. La corruption mina toute l?administration, les détournements de fonds et les concussions devinrent monnaie courante, la discrimination fut érigée en mode de gouvernement et les défections se multiplièrent. Une partie de la population se retourna farouchement contre son roi. Petit à petit, celui-ci perdit pied, devint l?ombre de lui-même et prit une série de mauvaises décisions qui déstabilisèrent le royaume. Lorsque, de retour d?une réunion de paix dans un pays voisin, son avion fut percuté d?un missile lancé par ses ennemis les plus déterminés, il se remémora ce que lui avait dit le divin Magayane dix ans plus tôt : " Je vous vois, roi, tranquille et inquiet à la fois, dans le sein bouillant d?un oiseau vrombissant qui, ne dépliant pas ses ailes abimées, fonce dangereusement vers un petit jardin qui ne supportera ni le choc ni le poids?" Il sut alors, avant de rendre l?âme, que la prophétie allait s?accomplir dans ses moindres détails, que le chaos s?installait pour longtemps au Bushiru, que son peuple allait grandement souffrir, que les morts se compteraient par centaines de milliers.
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