Et si on composait un texte nous aussi ?
En dehors de sa passion pour sa femme Betty, Don Dechine a un but dans la vie : écrire. Seulement voilà, pas facile d'écrire un roman fracassant quand on est prof de lycée et qu'après les avanies de la journée, il faut encore affronter un voisin pas content, les tracas de la copropriété, le harcèlement fiscal et les PV pour stationnement interdit. Rien de plus normal, pour se détendre, que de consacrer ses soirées à l'intégrale des six saisons des Soprano. Sauf que ça n'aide pas non plus à trouver la fortune et la gloire littéraire.
Il y aurait bien une solution : tout plaquer pour aller vivre à la campagne. Comme l'explique Don Dechine, il n'y a que dans la nature qu'on peut valablement produire un chef-d'oeuvre. Armés d'une confiance et d'un humour à toute épreuve, Betty et lui vont donc se lancer dans la quête de la maison idéale, tenter de se débarrasser d'un appartement invendable et se perdre dans un monde inconnu et atroce : la jungle impitoyable de l'immobilier.
Une sacrée aventure quand on est un futur génie de la littérature et qu'on se réveille un matin avec un cloporte dans l'oeil !
Et si on composait un texte nous aussi ?
Et vous, quels sont vos coups de cœur dans la liste ?
Avant tout, je tiens à remercier les éditions Buchet Chastel ainsi que Babelio pour m'avoir donné la chance de découvrir à la fois cet auteur et cet éditeur. Nous avons trop souvent tendance à oublier que les mots s'apprécient mieux lorsqu'ils sont présentés dans un bel écrin alors je tenais à saluer la qualité de l'ouvrage, la sobriété élégante de sa présentation ainsi que la qualité du papier, quasiment sans transparence, qui met le lecteur dans de bonnes dispositions pour apprécier l'univers de cet auteur.
"Extermination des cloportes". Lorsque j'ai découvert le titre de ce roman que me proposait Babelio dans le cadre d'un Masse Critique, je dois dire que j'étais intrigué. Que pouvait bien cacher ce titre énigmatique ? Un essai explosif sur l'entomologie, une réponse musclée à la trilogie des "Fourmis" de Werber à moins que ce ne soit un livre anti-système ? Mais dans ce cas-là, qui sont les cloportes ? Une fois terminé l'énumération des hypothèses les plus farfelues, les réflexes de Pavlov du peu original lecteur que je suis m'ont inévitablement poussé à lire la quatrième de couverture. Tout de suite, trois groupes de mots ont attiré mon attention : l'intégrale des saisons des Soprano, un cloporte dans l'œil, jungle impitoyable de l'immobilier. Est-ce la présence du cloporte, mais l'idée que ces trois éléments se mélangent, s'opposent ou se complètent m'a semblé quelque peu kafkaïen.
Rien à dire pour l'instant, le terrain était bien préparé et la piste suffisamment dégagée pour se lancer dans cette lecture qui s'annonçait mouvementé, mais laissait deviner des excursions littéraires, plutôt savoureuses. L'embarquement du lecteur est immédiat, la plume de Philippe Ségur est habile, les chapitres sont courts, l'intrigue rythmé et le personnage principal, ce Don Dechine qui doit son nom au Don Drapper de la série "Mad men" semble doté d'un esprit fantasque prometteur. Passé les vingt premières pages, j'en viens même à trouver dans ce roman un (tout) petit côté "page-turner" qui s'estompe toutefois rapidement.
Arrivé à la cinquantième page, l'horizon si dégagé voit pointer quelques nuages. La raison de ce brusque changement de température ? Une certaine tendance à l'immobilisme, un personnage féminin qui a du hérisser les poils de nombre de lectrices - Betty ne serait-elle pas un peu tarte, fade, dépendante et sans relief - et surtout l'impression de s'être un peu fait avoir sur la marchandise ? Où sont les affres de la création ? Pourquoi la maison de campagne ne devient-elle pas la terre promise, le lieu qui va permettre à Don Dechine d'enfin franchir le pas de la création ? Pourquoi si peu de personnages secondaires étoffés ? C'est un roman sur l'immobilier finalement ?
Heureusement, lorsqu'on entame le dernier tiers du livre et qu'on se fait à l'idée que ce roman n'est pas le nôtre mais celui de l'auteur et que c'est lui qui donne la direction, que c'est lui qui tient les ficelles (narratives), on finit par se résoudre à céder à l'ambiance singulière de cette "Extermination des cloportes" qui a plus d'un mérite. Non seulement, l'auteur ne déroge pas de sa trajectoire, pas même d'un chouïa - saluons le jusqu'au-boutisme et l'intégrité du concept - mais il a pour lui une aisance avec les mots qui rendent la lecture fluide et plaisante.
"Extermination des cloportes" est habile, ne manque pas de charme, offre quelques belles répliques, quelques jolies tournures, se lit d'une traite, mais manque quelque peu de fond pour qu'on y retourne une seconde fois.
Le titre de ce roman, atypique, a tout de suite capté mon attention.... ainsi que le résumé qui me promettait une aventure truculente! Alors ni une ni deux, me voilà plongée dans le quotidien de Betty et de Don Dechine!
Mon grand coup de coeur a été pour les personnages autant principaux que secondaires qui sont des plus atypiques. Le couple que forme Betty et Don Dechine est vraiment attachant. Je me suis d'ailleurs vite reconnu dans ce couple qui pratique l'art de la procratisnation comme personne! Mon préféré de tous reste le narrateur de l'histoire, Don Dechine, qui m'a énormément fait rire par son éco surdimentionné. Une petite citation pour vous montrer la personne : "La puissance de mon cerveau me stupéfiait. J'étais un médium, j'étais comme possédé. Un esprit confondant s'exprimait par ma bouche."
Il n'y a pas de grands coups d'éclat dans ce livre, pas de retournements de situation spectaculaire, d'intrigue haletante,... mais plutôt une succession d'évènements et de non-évènements farfelus! Par leur grande naïveté, Betty et Don Dechine se retrouvent à faire face à des situations les plus cocasses les unes que les autres... pour notre plus grand bonheur!
L'auteur manie à la perfection un humour à la fois léger et décalé. Mais, si c'est vrai que si j’ai souvent souris, je n’ai jamais éclaté franchement de rire. Extermination des cloportes n'en reste pas moins un roman plaisant et drôle... tout est réuni pour passer un bon moment!
Don Dechine, prof de lycée et accessoirement grand écrivain (ce qu'il croit être le jour où il aura écrit un livre...) et sa femme Betty veulent changer de vie, s'acheter une maison à la campagne pour mieux se consacrer à l'écriture pour l'un, à la rédaction d'une thèse pour l'autre. Le chemin est semé d'embûches, que le couple a d'ailleurs du mal à éviter, d'autant que Don est atteint de la maladie de Fuchs, ce qui n'arrange rien.
J'ai pris ce livre comme un livre bourré d'humour décalé dont l'histoire semble ne servir que de cadre pour permettre à l'auteur, Philippe Ségur, de laisser libre cours à des dialogues mordants. Donc j'ai souvent souri, parfois j'ai ri. Je ne garderai que cela de ce livre: un bon moment.
Extermination des cloportes est un roman formidable !
Nous rencontrons Don Dechine et Betty Dechine, mari et femme qui paraissent tout à fait banals au premier abord et qui paradoxalement sortent de l’ordinaire. Don Dechine n’a qu’un but dans la vie : écrire un best seller, Betty quand à elle doit rédiger une thèse. Tous deux sont la motivation incarnée mais lorsqu’il s’agit de véritablement se mettre au travail, c’est une autre histoire… Comprenez, il y a l’intégrale des Soprano à regarder, du thé à préparer, une bonne tarte à cuisiner… Et puis surtout, il y a l’environnement à changer, Don Dechine recherche la nature et encore plus important, l’écrivain en devenir à un problème, il a un cloporte dans l’oeil…!
Ce roman est exceptionnel ! C’est bien simple : j’ai tout aimé !
J’ai adoré le choix de la narration à la première personne, du point de vue (totalement tordu) de Don et le ton caustique utilisé. Nous sommes immergés dans l’esprit complètement truculent de Don qui a l’air de sortir tout droit d’une autre dimension. On décèle assez rapidement chez lui un narcissisme et une confiance à toute épreuve, qui surplombent la vérité et bravent l’évidence. Son jugement est on ne peut plus biaisé, il est en proie à une véritable distorsion de la réalité mais c’est un vrai régal de suivre le fil de sa pensée. Pour résumé le personnage de Don Dechine, je dirais qu’il est complètement à l’ouest. Il voit le mal partout quand il n’y en a pas et paradoxalement, il n’arrive pas à repérer l’escroquerie quand elle se présente devant lui.
Cette altération du jugement est visible à plusieurs reprises, provoquant des situations très cocasses qui engendrent un rire, parfois franc et d’autres fois jaune. Je pense notamment à quelques événements liés à un plombier urgentiste dont émane un sentiment d’arnaque à trente kilomètres ou un agent immobilier qui semble avoir tout appris du métier au sein de la mafia sicilienne etc… Ce sont des situations que Don nous décrit clairement, en prenant soin d’exprimer ses doutes, ses impressions négatives et qui forcément, induisent chez le lecteur la compréhension d’une escroquerie évidente mais que Don n’arrive pas à appliquer à lui-même. Cela confère un sentiment ambivalent chez le lecteur qui rit du personnage autant qu’il s’irrite de le voir autant à côté de la plaque alors que toutes ses impressions sont bonnes.
J’ai également apprécié le personnage de Betty, sa femme, que l’on a un peu du mal à appréhender. Elle nous parait toute ingénue, auréolée d’innocence et de naïveté de telle sorte qu’elle nous charme autant qu’elle nous agace. On a envie de la protéger mais on a également envie de la secouer pour qu’elle réalise que Don maîtrise autant chaque événement qu’il est un écrivain prolifique. Curieusement, on a aussi la sensation que Betty n’est pas si innocente qu’il n’y parait puisqu’à plusieurs reprises, on constate quelques dons de manipulation à l’encontre de Don. Elle use et abuse de la psychologie inversée à son égard, elle semble parfois dire certaines choses qu’elle ne pense pas dans l’objectif ultime de voir Don faire l’inverse, et donc lui donner raison au final. Betty est un personnage complexe, extrêmement intéressant à observer par l’intermédiaire du regard que Don porte sur elle.
L’alliance des deux personnages est savoureuse. Ce sont les rois de la procrastination, bien qu’ils ne l’avoueraient pour rien au monde. Les deux ont un objectif simple : l’une doit rédiger sa thèse, l’autre un roman. Ils s’échinent à mettre en place des plans pour optimiser chaque minute de leur vie de couple afin de se mettre au travail mais trouvent toujours quelque chose de plus important dans l’immédiat à faire. Qu’il s’agisse de leur série phare Les sopranos (un épisode en entraînant un autre), une patisserie à réaliser, un thé à faire infuser à la perfection, une maison introuvable en pleine nature à rechercher, tout est bon pour repousser leurs projets respectifs. La manière dont l’auteur rend compte de cette procrastination est vraiment hilarante, puisque l’on suit les pérégrinations mentales de Don qui aboutissent à chaque excuse permettant de repousser l’objectif. C’est un vrai régal !
Si tout le roman repose sur un humour par moments léger, à d’autres caustiques, un drame se profile en filigrane tout au long du récit, par la maladie de Fuchs, qui touche Don du jour au lendemain. Cette maladie est traitée avec humour, incarnée par ce fameux cloporte qui prolifère chaque jour un peu plus, mais n’en reste pas moins tragique dans la manière qu’à Don de nier l’évidence.
En définitive, Extermination des cloportes est un roman exceptionnel que j’ai pris grand plaisir à découvrir ! Je ne connaissais pas l’auteur mais je suis désormais certaine que je lirais ses autres ouvrages quand l’occasion se présentera. C’est un vrai bonheur !
J’aime bien procrastiner (le ménage peut attendre, et le repassage aussi, d’ailleurs, je ne le fais plus). Mais dans ce roman, le personnage principal a propulsé cette activité au rang de Grand Art.
Il échafaude pourtant des plans sur la comète pour enfin se mettre à écrire. Mais voilà : la réalité reprend le dessus, et puis Les Sopranos n’attendent pas.
J’ai trouvé ce roman plein d’humour et les situations bien vues.
Le personnage de Betty qui arrive toujours à ses fins tout en jouant les ingénues m’a plu ; sans oublier le voisin procédurier.
Bref, j’ai passé un bon moment de lecture, malgré les cloportes dans l’oeil de Don.
L’image que je retiendrai :
Celle de leur salle de bain ravagée par un plombier pendant 3 semaines.
http://alexmotamots.fr/?p=2531
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