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Raphaëlle, condamnée à perpétuité pour avoir tué son bébé dix ans auparavant, alors qu'elle était la maman aimante de deux autres enfants, demande à rencontrer Salomé, mariée, maman d'un bébé de 13 mois, écrivaine dont le premier roman feel-good a été un succès. Raphaëlle lui demande d'écrire son histoire afin que sa parole, et pas uniquement celle de la justice et des médias soit entendue.
Ce roman, c'est la rencontre de deux femmes, de deux mères, l'une infanticide, l'autre maman comblée, qui n'aurait jamais dû se rencontrer et qui vont devoir s'apprivoiser. Un lien inattendu et profond va se nouer entre elles. Salomé est touchée par cette femme rongée par la culpabilité, la douleur et comprend que la frontière entre elles deux est finalement assez ténue, que ce sont les circonstances qui peuvent faire pencher d'un côté ou de l'autre. Raphaêlle s'est enfoncée dans une dépression post-partum qui a amplifié les fragilités jusqu'à la submerger, de celle qui fut une petite fille en manque d'amour maternel, qui a subi les attouchements de son beau-père à l'âge de 12 ans, qui devient orpheline de père à 14 ans, à laquelle on a enlevé ses deux aînés, confiés à une famille d'accueil car elle n'arrive plus à s'en occuper, dont le mari est alcoolique, démissionnaire et qui l'abandonne quelques jours avant le drame. Personne n'a entendu son extrême détresse, sa solitude; personne vers qui se tourner pour chercher de l'aide jusqu'à ne plus voir d'autre issue que la mort pour protéger son bébé. le roman pose une question embarrassante : pourquoi en cas d'infanticide et face à la démission, l'absence du père, seule la mère est jugée?
Le roman développe également un autre thème important : la réinsertion de prisonnier(e)s ayant purgé une longue peine, qui se sentent d'une certaine façon à l'abri en prison, qui ne sont pas préparés à affronter ni la vie dehors, ni le regard et le jugement des autres. C'est un plaidoyer pour une prise en compte sérieuse et globale de cet après, essentiel pour réduire les récidives et éviter les suicides.
Le style elliptique, qui ne montre pas mais laisse à ressentir, l'expression de la douleur de Raphaëlle, rendent ce texte particulièrement poignant. Une très belle découverte.
Une mère infanticide a-t-elle droit au pardon?
Dans son nouveau roman, Vinciane Moeschler suit une femme emprisonnée pour le meurtre de son fils et qui décide de contacter une romancière. Le début d'une relation très particulière.
La vie de Raphaëlle Lombardo a tout d'un chemin de croix. Dès son enfance, elle a subi la violence d'un père qui frappait son épouse avant de s'en prendre à ses enfants. Si à 20 ans, son décès l'a délivrée d'un lourd fardeau, elle n'en a pas moins gardé un lourd traumatisme. Et quand, à son tour, elle se met en couple, elle ne veut pas écouter les conseils de sa mère qui voit dans cette union la reproduction du schéma qui lui a été fatal.
Les premières années semblent lui donner tort. Le mari de Raphaëlle est attentionné et promet de l'aider dans son ménage. Les grossesses vont s'enchaîner et la situation se dégrader. Face au poids de ses responsabilités, le mari démissionne et laisse son épouse gérer le chaos. Elle se raccroche alors à son petit dernier, le bébé d'amour que personne d'autre ne serrera plus dans ses bras, car dès la préface on comprend qu'elle se retrouve en prison pour un infanticide.
Derrière les barreaux, elle lit et découvre le premier roman de Salomé. Une œuvre qui lui donne envie de contacter cette romancière à succès et de lui proposer de lui raconter son histoire.
La relation qui s'installe est alors l'occasion de reprendre depuis le début le «parcours criminel» sous le regard bienveillant du directeur de la prison, toujours persuadé que ses détenus devraient tous avoir droit à une seconde chance.
Vinciane Moeschler, comme dans Alice et les autres, son précédent roman qui traitait le cas d'une personne souffrant d’un trouble dissociatif de la personnalité, aime explorer les marges de notre société, creuser derrière le fait divers. En remettant en perspective un geste aussi extrême que celui de donner la mort à son propre enfant, elle nous pousse à la réflexion et à nuancer une condamnation quasi inéluctable. Mais l'intérêt de ce roman est double. Il nous propose aussi une nouvelle plongée dans l'univers carcéral. Depuis Surveiller et punir de Michel Foucault, la question du rôle de la prison reste toujours en débat. La détention reste d'abord et avant tout un moyen d'isoler les délinquants et les criminels de la société. Mais elle semble oublier la préparation des détenus, une fois leur peine purgée, à retrouver une place parmi les hommes. Avec l'exemple de Raphaëlle, mais aussi de l'une de ses codétenues, on comprend que cet aspect des institutions pénitentiaires reste à améliorer.
Ajoutons-y l'effet-miroir introduit par la mise en scène d'une romancière. Salomé, en s'interrogeant sur son rôle, en racontant les difficultés qu'elle rencontre avec son texte, en cherchant des parallèles avec sa propre histoire, le couple qu'elle forme avec Lucas et son rôle de mère, joue avec subtilité la part introspective du livre. Ajoutons-y l’expérience accumulée depuis plus d’une décennie maintenant avec le travail effectué en asile psychiatrique, à commencer par l’animation d’ateliers d’écriture.
Comme dans toute son œuvre, Vinciane Moeschler joue d'une plume sensible, toute en nuances, pour nous parler de l'une de nos valeurs cardinales, l'humanité.
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Vinciane Moeschler peint avec justesse et finesse de sentiments, le portrait de trois femmes aux caractères bien trempés qui se réapproprient leur histoire et leur destin."Trois incendies " pour décrire le feu intérieur logé en chacune d'elle, celui qui leur permet de braver avec courage et obstination les épreuves que la guerre ou la mémoire de la guerre, les obligent à surmonter.
Trois incendies de Vinciane Moeschler, évoque, les blessures et traumatismes transmis entre génération. L’impact qu’ils produisent sur les suivants malgré eux. Toujours l’horreur, dont seul l’humain, aliéné, se rend coupable. Les atrocités, le pillage des corps et des âmes et la reproduction inconsciente mais vengeresse sur l’autre de ce qu’il ne peut maitriser chez lui.
Léa la grand-mère malaimé par sa mère et abimé par la guerre et ces pertes.
Alexandra la mère n’arrivant pas à vivre loin de l’horreur et des conflits, y retournant sans cesse malgré l’amour des siens. Alexandra qui se noie dans les fractures du monde, vivante uniquement à travers le risque.
Maryam la fille, qui essaie de s’extraire de ce poids, cherchant la légèreté et le bonheur, appelant la sérénité pour conjurer la douleur des siens.
Ce roman balaye trois douleurs, trois vies, trois générations, trois réflexions sur le sens de la vie face à ses absurdités, ses atrocités, ses violences.
Trois destins de femmes fortes survivant à la douce mélancolie des années.
Autour de cette lecture :
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A voir :
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Du côté de la jeunesse :
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