Taïna, indienne des Caraïbes, a été instruite dès son enfance pour devenir chamane, mais Christophe Colomb et les Espagnols arrivent...
Un homme et une femme qui habitent l'un en face de l'autre, ne se connaissent pas et s'épient en fantasmant l'amour de toute une vie. C'est le début d'un amour où les deux protagonistes sont persuadés d'être faits l'un pour l'autre et de s'aimer toute leur vie. Rien de plus banal... c'est immédiatement l'osmose, deux âmes sœurs qui se comprennent.
Puis on se retrouve vingt ans après, un mariage et un enfant plus tard, au cœur de ce couple dont on se dit que tout compte fait il y a eu une erreur de casting tant finalement ils semblent différents. Où peut-être le sont-ils devenus. Une épouse et mère plutôt psychorigide, un époux et père plutôt le contraire et un enfant, Toby, caractériel. Je n'ai pas pu m'empêcher de me demander qui en était responsable, et ma déduction de l'affaire n'a pas été très sororale. Cette mère est exaspérante tant elle veut (trop) bien faire.
Le point commun de Jack et Elizabeth c'est que chacun cherche la perfection dans des théories pensées par d'autres, Elizabeth victime d'une société du bien-être, Jack de son besoin viscéral d'être aimé. Tout ce que fait Elizabeth se retourne contre elle sans qu'elle ne s'en rendent vraiment compte, et de son côté, Jack se donne beaucoup de mal pour, euh, rien en fait. Et Elizabeth construit sa vie en se référant constamment à des écrits qui expliquent les meilleurs comportements à avoir. Et ça ne fonctionne pas avec son fils, enfant tyrannique et explosif.
Et puis il y a Brandie, épouse et mère comblée, qui affiche son bonheur insolent sur les réseaux sociaux en donnant une image idyllique de sa vie. Kate, qui prône l'amour libre tant, selon elle et son mari, c'est le seul moyen de ne pas se lasser de la vie de couple. Puis Benjamin et son obsession de la pureté du corps, qui avale des potions plus étranges les unes que les autres. Il est aussi beaucoup question du pouvoir et de la malléabilité du cerveau, cet organe qui est en réalité le grand chef des armées. La famille, l'amour, les deux entremêlés, et l'usure du temps, ce rouleau compresseur qui agit sur les corps et sur les âmes. C'est drôle et consternant à la fois.
Dans ce roman, on passe sans cesse d'une époque à l'autre, l'enfance puis la vie étudiante jusqu'à la quarantaine, ce qui nous permet de mieux appréhender les personnages en découvrant leur histoire douloureuse. C'est très efficace mais le contraste entre les débuts idylliques et le train-train quotidien vingt ans plus tard, ça met une grosse claque à la vision de "l'amour toujours".
Pendant un certain temps j'ai ressenti beaucoup de stress à cette lecture. Sans doute que tous ces gens qui cherchent le bien-être à tout prix, qui affichent leur bonheur sur les réseaux sociaux, cette quête totalement biaisée de ce que doit être la vie m'a montré à quel point trop de gens sont à côté de leurs pompes. Car certains veulent avoir la plus belle maison, être un couple que tout le monde envie, les plus beaux enfants et aussi les plus intelligents, une voiture luxueuse, des vacances de rêve, être enviés et admirés et finalement passent à côté du vrai bien-être. Tous ces gens qui rêveraient que la vie soit une longue et grande fête ignorent que le bonheur est simplement l'absence de malheur.
Nathan Hill raconte le temps qui passe et les désillusions qui l'accompagnent avec talent et acuité. Mais je crois que c'est justement cette acuité qui m'a fait passer une partie de cette lecture avec le cœur dans un étau. J'ai trouvé ça tellement cruel la dissection de ces tristes vies. C'est peut-être l'état du monde actuel qui m'a empêchée, jusqu'à un certain point, de voir le côté jubilatoire que beaucoup ont trouvé dans ce roman. Je trouve qu'on a perdu de vue l'essentiel et qu'on n'arrive pas à revenir en arrière, comme si tout n'était que fuite en avant. Cependant, il y a beaucoup d'humour et même des moments hilarants. Car arrivée quasiment à la moitié, je me suis énormément amusée. Et là, OUIIII j'ai trouvé ce récit jubilatoire ! Et je dois dire que j'ai adoré Jack, petite herbe verte et aimable qui a réussi à pousser dans le purin, avec des parents insupportables, voire toxiques mais heureusement avec une sœur qui a su lui montrer la beauté. Quant à Elizabeth, vraiment elle se donne du mal...
Mais au fond, jusqu'où serions-nous prêts à aller pour sauver notre couple de l'ennui, faire rejaillir le feu d'un amour qu'on croyait devoir durer toujours ? Et que faire de ces valises qu'on se trimballe depuis la naissance et des traumatismes bien rangés à l'intérieur ?
Ce roman nous fait passer par de nombreuses phases, qui vont de l'exaspération à l'incrédulité, en passant par de l'émotion, de la tristesse, de la joie et du rire.
Le livre refermé, j'ai eu l'impression d'avoir été bombardée de particules élémentaires car Nathan Hill m'a emmenée dans des recoins de l'humanité où je ne m'attendais pas à aller, comme si plein de petits bouts d'humains arrivaient pour s'amalgamer et devenir des échantillons de mes semblables qui se débatte
Ma chronique :
"De quoi est faite la vie intime des gens, la vie secrète qu'ils cachent derrière celle qu'ils affichent ?"
Notre monde est malade à chercher sans cesse la performance et le bonheur sous l'influence des diktats des réseaux sociaux.
Malgré le titre, BIEN ÊTRE n'est pas un énième roman de développement personnel. C'est bien mieux ! C'est un roman extraordinaire, qui frôle le chef d'œuvre. Un roman dense, ample, sophistiqué, 700 pages qui vous attrapent en explorant plusieurs sujets entremêlant les époques. Vous serez tour à tour amusé, ému, déconcerté.
Bien qu'ils le recherchent tous, ce" bien être" est souvent absent de la vie des personnages. "Bien être" c'est une analyse du couple, du mariage, de la famille et du temps qui passe. Les moments de vie surgissent en désordre.
C'est aussi une analyse de l'éducation reçue et de ses répercussions sur nos comportements et nos choix.
L'auteur pointe du doigt les dérives d'Internet et le besoin d'être toujours connecté à des applications pour optimiser nos vies.
Ce n'est pas une banale histoire d'amour entre Jack et Elizabeth, deux étudiants bohèmes des années 90 à Chicago comme on pourrait l'imaginer au début. C'est bien plus que çà ! Vingt ans plus tard tout a changé, prisonnier de la routine, le couple se délite en même temps que la ville elle-même change, les galeries d'art deviennent des banques ou des Fast Food.
Elizabeth, issue d'une famille très riche ( des escrocs en col blanc), à dû supporter l'autorité violente de son père. Devenue scientifique dans une clinique du "Bien Être", elle fait des recherches approfondies sur les placebos. Ces écrans de fumée qui donnent l'illusion du bonheur.
Jack vient d'une famille de fermiers du Kansas. Il a un grand besoin d'affection mais, face à une mère acariâtre, il a perdu toute confiance en lui, et dès que possible a fui ce milieu oppressant. Il est artiste et prof à l'université. Ses relations avec son père sont complexes.
Le couple intellectualise tout, surtout ce qui touche à l'éducation de leur fils. Puis l'achat de la maison de leurs rêves dans une banlieue chic complique encore plus leur vie.
Leurs amis sont des caricatures, Benjamin le "bobo" connecté et Brandie une horrible moralisatrice qui affiche sa réussite sur les réseaux.
Les nombreux retours sur l'enfance de chacun nous éclairent sur leur conduite et leurs décisions..
Pour moi c'est un grand coup de cœur pour ce roman qui est avant tout une vraie histoire d'amour dans un monde en perpétuel changement.
A partir d’une simple histoire d’amour, analyser de fond en comble la société américaine : c’est le tour de force que réussit Nathan Hill dans cet ample et passionnant roman de près de sept cents pages.
Elizabeth et Jack sont étudiants lorsqu’ils se rencontrent à Chicago. Lui vient de la campagne profonde du Kansas et rêve de percer dans les arts plastiques. Elle, en rupture avec sa famille bourgeoise, s’intéresse à la psychologie cognitive et aux neurosciences. Leurs aspirations contestataires et leur vie bohème les rapprochent, c’est le coup de foudre. Deux décennies plus tard, leur quartier s’est gentrifié et leur vie professionnelle stabilisée, à huit ans leur fils Toby déjoue toutes leurs théories éducatives et le couple s’apprête à acheter un nouvel appartement configuré pour lui permettre de faire chambre à part. Quand s’est donc éteinte la mélodie du bonheur ?
La première grande force du roman tient en la crédibilité des personnages et en l’exploration de leur psychologie profonde. Réunis par leur détermination à sortir de leurs milieux respectifs, persuadés de leur anti-conformisme alors qu’ils ne font qu’exorciser les fantômes de leur enfance, ils projettent sur ces atomes crochus le mythe de l’amour parfait et éternel jusqu’à ce que leur embourgeoisement vienne justement saper ce qui précisément les rapprochait. Nathan Hill excelle à souligner les déterminismes initiaux et les malentendus qui en découlent, l’amour et le couple semblant fonctionner exactement comme les placebos dont Elizabeth s’est faite la spécialiste dans son institut du bien-être, c’est-à-dire par l’autosuggestion et l’envie de croire aveuglément aux mythologies du bonheur auxquelles la société nous biberonne.
Des mythologies qui sont loin de se cantonner à l’amour, puisque, étendant le raisonnement, l’auteur déploie ce qui s’impose comme l’autre force du roman : le décorticage des phénomènes qui font la société contemporaine, comme l’envahissement des pratiques numériques et la propagation algorithmique des pseudo-informations complotistes sur les réseaux sociaux, la tyrannie du bonheur et tous les faux-semblants qu’elle traîne dans son sillage, ou encore l’impasse des discours post-modernistes. Précis et factuel, le texte n’oublie rien des dernières mutations, tendances et façons de penser, et si l’ensemble, d’un pessimisme froid malgré l‘humour, peut souvent sembler d’une sécheresse quasi médicale, l’on reste impressionné par l’ampleur et la clarté de cette analyse si évocatrice et instructive.
Miroir impitoyable d'une époque abusée encore loin du bout de ses mutations numériques, un roman qui décrypte magistralement les désarrois et le mal-être d'une société qui, derrière les façades riantes affichées sur les réseaux sociaux, semble ne jamais avoir été moins heureuse. Coup de coeur.
Une intéressante fresque sociale et sentimentale des années 1990 à nos jours ; couronnée par le Grand Prix de Littérature Américaine 2024.
Depuis sa naissance en 1975 dans l’Iowa et durant toute sa jeunesse, Nathan Hill a déménagé plusieurs fois ce qui pourrait expliquer toute la finesse de description de la société américaine de son livre. Son père les ayant baladés à travers le pays, il a observé et su restituer le fonctionnement et la psyché des humains.
Diplômé en journalisme et doté d'une maitrise d’écriture créative, eux-mêmes suivi par une période d’enseignement en Floride puis dans le Minnesota, il semble avoir peu à peu affuté son couteau et peaufiné sa prose. Ce livre plaira et intéressera pas mal de lecteurs et de passionnés de littérature américaine. Mais il peut tout aussi bien déranger et être jeté dans un coin de la bibliothèque.
L’histoire et cette manière que l’auteur a d’aborder le thème de la romance est également intéressante. Les deux protagonistes, elle étudiante en psychologie, lui photographe indocile, s’épient, se jaugent en douce. Mais lorsqu’Elizabeth rencontre Jack ça fait Tilt et le feu prend à tous les étages. Un feu qu’ils sont convaincus de pouvoir faire brûler jusqu’au bout du bout. Qu’importe les différences d’ambition et de finalité, l’amour triomphera. Oui mais, vingt ans plus tard, l’acquisition d’un appartement sur plan secouera cette famille qui s’est entre-temps agrandie d’un fils tyrannique et humainement moche.
L’autre versant de l’histoire c’est cette Amérique profonde, ce Chicago grandiose au début du livre et dont la beauté s’éteint au fil de l’amour qui diminue. L’auteur a su créer cette ambiance que beaucoup d’entreprises nous ont également connue dans leur vie : celle d’un amour qui s’étiole et de la vie alentour qui défaille pareillement. Le rythme de l’un se mêle au rythme de l’autre. Notre amour peut tout illuminer mais aussi tout effacer au point où nous ne voyons même plus la beauté du monde que nous avons la chance de regarder, de côtoyer. L’auteur est à la fois sensible à la vie des habitants de cette planète mais tout autant à celle du sentiment amoureux.
670 pages (ma nièce rajouterait « écrits avec une police d’écriture serrée ») qui n’ont en fait que peu de chose en commun avec le titre ‘’Bien-être’’, je dirais même qu’il est ici en opposition avec sa signification première.
L’analyse sociologique se fond totalement dans le regard des personnages. Le contenu est celui d’un sociologue mais les phrases sont celles d’un être profond. Il peut prendre vingt pages pour nous parler d’Elizabeth qui essaie de faire manger son enfant ou presque autant pour parler du régime de son homme, puis il trouvera quelques phrases d’une densité imparable. Je l’ai accepté mais pourrais aussi comprendre que certains abandonne cette lecture.
Le style est certes particulier, quelquefois déstabilisant, parfois un peu longuet dans les descriptions, mais n’est-ce pas là la marque d’un petit chef-d’oeuvre ?
Dans son livre, Nathan Hill passe en revue de multiples thèmes liés au sentiment amoureux. Il passe des illusions perdues du libéralisme à la récente béatification de la gentrification, de la notion de parentalité à celle d’un esprit libre et ainsi de suite.
Vivre avec l’autre n’est pas chose facile, le tout est de le savoir, le tout est de l’admettre.
Citation, une seule mais reflétant assez bien cette oeuvre :
« Ah oui bien sûr, la courbe en U : elle y avait souvent fait référence ces derniers temps, chaque fois que Jack la bousculait de cette façon-là. Un phénomène bien connu de certains économistes et des psychologues comportementaux, selon lequel, sur une vie, le bonheur avait tendance à suivre un schéma familier : les gens étaient plus heureux dans leurs jeunes années puis pendant leur vieillesse que pendant les décennies du milieu. Le bonheur était à son maximum autour de la vingtaine, puis à nouveau vers soixante ans, mais il touchait le fond entre les deux. Et c’était là que Jack et Elizabeth se trouvaient en ce moment, au fond de cette courbe, au milieu de leur vie, période qui s’illustrait beaucoup moins en réalité par les fameuses « crises de la quarantaine » (un phénomène finalement plutôt rare puisque seulement 10 % des gens affirmaient en vivre une) que par sa lente et déroutante glissade vers une insatisfaction et une frustration chroniques. C’était, Elizabeth insistait bien là-dessus, une constante universelle : la courbe en U concernait aussi bien les hommes que les femmes, les couples mariés que les célibataires, les riches que les pauvres, les actifs que les inactifs, les diplômés que les non-diplômés, les parents que les sans-enfants. Quel que soit le pays, quelles que soient la culture et l’origine ethnique, des décennies d’études démontraient scientifiquement qu’en milieu de vie les gens portaient en eux, en permanence, un sentiment qui, statistiquement parlant, était semblable à la perte d’un être cher. Voilà ce qu’on éprouvait, soutenait
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Taïna, indienne des Caraïbes, a été instruite dès son enfance pour devenir chamane, mais Christophe Colomb et les Espagnols arrivent...
Une belle adaptation, réalisée par un duo espagnol, d'un des romans fondateurs de la science-fiction, accessible dès 12 ans.
Merci à toutes et à tous pour cette aventure collective
Lara entame un stage en psychiatrie d’addictologie, en vue d’ouvrir ensuite une structure d’accueil pour jeunes en situation d’addiction au numérique...